Olivier Faure : « Nous devons éviter les querelles de coqs »
Alors que le PS organise ses « Journées de la gauche d’après » à Blois, son premier secrétaire milite pour un large rassemblement de la gauche et des écologistes, sur la base d’un projet préalable
D’aujourd’hui à dimanche, le PS fait sa rentrée politique, non plus à La Rochelle, mais à Blois. Des Journées d’été de « la gauche d’après » que son premier secrétaire, Olivier Faure, a voulu ouvertes à la gauche dans ses grandes largeurs, des Insoumis aux écologistes. On y retrouvera notamment Clémentine Autain, Yannick Jadot, Eric Piolle, Raphaël Glucksmann…
Stéphane Le Foll a estimé que le PS n’avait pas assez travaillé pour se refonder ces dernières années… Dans quel état jugez-vous votre parti aujourd’hui ?
Les Français ont tranché aux municipales, où nous avons obtenu d’excellents résultats et conforté nos positions. Je n’entrerai dans aucune polémique inutile avec un socialiste. Je comprends qu’il y ait encore des aigreurs, mais il faut avancer maintenant. Une génération s’installe, qui a travaillé depuis deux ans et demi et fait des propositions chaque semaine au Parlement.
Il n’y a pas plus aveugle que celui qui ne veut pas voir.
Médiatiquement, ce sont malgré tout les écologistes qui occupent le devant de la scène. Quelle articulation envisagez-vous avec eux en vue des régionales puis de la présidentielle ?
Effectivement, la presse en général donne la primauté aux écologistes, alors que si l’on regarde les résultats des municipales, ils sont infiniment plus favorables au PS qu’aux écologistes… La réalité, c’est que le parti le plus important en France au plan territorial à gauche, c’est de loin le PS. Ceci dit, il y a un impératif pour la gauche et l’écologie, c’est le rassemblement. Si nous nous présentons les uns contre les autres, nous connaissons déjà l’issue, ce sera un second tour Macron-Le Pen. Éviter cela suppose une lucidité que je n’observe pas pour l’instant chez les uns et les autres. Chacun dit : «Jeveuxle rassemblement, mais ce sera derrière mon projet. » La seule façon de procéder est, sans chercher à effacer nos différences, de voir ce sur quoi nous pouvons nous mettre d’accord pour acter un programme de coalition, afin de rendre ce pays plus social, plus écologique et plus démocratique. Tous ceux qui essaieront de construire un rapport de force en espérant l’abdication de tel ou tel se tromperont. Le problème n’est pas de gagner une élection, mais de transformer le pays, et il y a pour cela besoin de fédérer.
Aux régionales, les Verts entendent partir sous leur propre bannière à la bataille… Allez-vous discuter avec eux ?
Je souhaite que nous puissions discuter partout pour choisir celui ou celle qui sera le mieux placé. Sans esprit boutiquier, mais pour en finir avec l’esprit de défaite. Attention à la tentation de jouer des primaires entre les uns et les autres au premier tour. Les régionales, notamment en Paca, on l’a vu la dernière fois, se jouent au premier tour. La seule façon de ne pas redonner les clés à Renaud Muselier en Paca ou Xavier Bertrand dans les Hauts-de-France, ce sera le rassemblement.
Pour la présidentielle, comment devra être choisi le candidat de rassemblement auquel vous aspirez ? Par une primaire ouverte ?
On n’en est pas là. La première chose qui intéresse les Français est de savoir non pas qui, mais pour quoi faire : nous devons élaborer un projet commun qui permettra, ensuite, de désigner celui ou celle qui incarnera le mieux ce bloc social et écologique. C’est tout le sens des « Journées de la gauche d’après » que nous organisons à Blois. On voit bien que la crise sanitaire a réhabilité l’État-providence et développé un regard nouveau sur la façon de travailler, de gérer nos vies. Nous devons être capables de profiter de ce moment pour faire la pédagogie d’une société qui doit être plus humaine qu’elle ne l’est, plutôt que de nous cantonner dans une querelle de coqs aspirant à chanter en haut du tas de fumier.
Mais il faudra bien définir une règle
‘‘ pour choisir le candidat le moment venu…
Je dirai, le moment venu, quelles sont les possibilités.
Mais je souhaite d’abord que nous ayons un processus qui conduise à un choix commun qui ne se fasse pas les uns contre les autres, mais qui soit celui d’un candidat qui porte ce que nous aurons décidé ensemble.
Sans langue de bois, nous devons d’abord définir ce que nous voulons faire, avant de savoir avec qui. Depuis d’ailleurs, le candidat annoncé vainqueur de la présidentielle deux ans avant ne l’a jamais gagnée. Ça devrait nous faire réfléchir. On ne peut pas être de ceux qui disent qu’il faut faire évoluer la vie politique vers moins de personnalisation et de présidentialisation et, en même temps, endosser de manière caricaturale les tics de la Ve République.
Votre regard sur le mouvement lancé par Laurent Joffrin pour refonder « une gauche réaliste et réformiste » ?
Je n’ai aucun avis sur la question. On verra bien ce que Laurent Joffrin fera. Tout ce qui permettra de rassembler la gauche sera le bienvenu, encore faut-il que ce soit sincère… Je me concentre sur ma détermination à construire une gauche sociale, écologique, démocratique, féministe, qui s’assume comme une gauche de transformation. Tous ceux qui voudront contribuer à cet objectif commun seront les bienvenus.
‘‘
Les régionales se jouent au premier tour”
Votre regard sur la gestion actuelle de la crise sanitaire et économique ?
Elle ressemble toujours beaucoup à une grande improvisation. Ordres et contre-ordres se succèdent et participent à la confusion générale. Alors que nous avons nous-mêmes présenté un plan de relance dès juin, le gouvernement repousse la présentation de ce plan pourtant indispensable. Et chaque semaine perdue allonge la facture et élargit la fracture. Nous allons payer cette procrastination, qui se soldera par des plans sociaux, des entreprises qui fermeront et une précarité généralisée. L’exécutif n’a pas su donner aux entrepreneurs les outils leur permettant de se projeter et de construire leur propre rebond.
D’abord définir ce que nous voulons faire”