Monaco-Matin

UN MOULIN NOMMÉ BONHEUR

Posé sur une petite hauteur, il est un moulin qui, perdu au milieu du maquis, fut abandonné pendant près de 200 ans. Aujourd’hui, il a retrouvé ses ailes grâce à un enfant du pays.

- NELLY NUSSBAUM nous@nicematin.fr

Une restaurati­on à l’identique.

L’île de Porqueroll­es, la plus grande des trois îles d’Or du golfe d’Hyères, est surtout un « jardin extraordin­aire » ensemencé de fleurs et de plantes indigènes à jamais protégées.

Mais c’est aussi sur ce bout de terre au milieu de la Méditerran­ée que se trouve un vieux moulin à vent provençal datant du XVIIIe siècle, âge d’or des moulins à vent en Provence. Ceci n’a rien d’exceptionn­el, nous direz-vous, car la région possède de nombreux moulins. Mais, ce qui distingue celui-ci des autres, c’est son nom le moulin du Bonheur. (lire encadré) Majestueux, il s’offre au vent, perché sur une petite éminence à 200 mètres au sud du fort Sainte-Agathe. Si, nous n’avons aucune preuve de sa date de constructi­on, on peut supposer que cela remonte entre 1720 et 1728. Huit années pendant lesquelles Jean et François Oliviers, pilotes du Roy au départemen­t de Toulon, ont réalisé divers croquis des rades et ports de Méditerran­ée. Et sur l’un d’eux, on distingue la première représenta­tion du moulin de Porqueroll­es avec son esplanade.

Détruit par l’armée anglaise

Son édificatio­n devait correspond­re à la nécessité économique de l’époque. En effet, à cette période, le royaume était importateu­r de blé et l’exportatio­n en était interdite. Sans compter que la farine, qui arrivait à Marseille par la mer, était exempte de taxes. Ce qui fait que de nombreux moulins furent édifiés sur les îles proches du littoral comme Porqueroll­es et celle du château d’If. Pendant quelques années, passant de mains en mains, le moulin porqueroll­ais fut administré avec plus ou moins de succès, mais il faisait son office. D’ailleurs, sur une carte du cartograph­e Jacques-Nicolas Bellin (1703-1772) datée de 1764, il est représenté avec ses ailes en mouvement. Il a cependant dû s’arrêter de fonctionne­r vers 1775 au moment où son dernier meunier, Antoine Toiton, un invalide de guerre arrivé sur l’île vers 1750, a pris d’autres fonctions. Car, lorsqu’il réapparaît sur la carte Cassini, relevée par le cartograph­e et astronome Cassini en 1778, il s’agissait d’« un moulin en ruines ».

Mais, en 1793, lors de la retraite des troupes anglaises qui avaient occupé l’île pendant le siège de Toulon, il sera détruit par des explosifs. Dès lors, il ne reste qu’une tour ruinée isolée au milieu du maquis. Une carte de 1818 réalisée par les autorités militaires dans le but d’une estimation, mentionne : « Nous avons estimé des murailles de la plus grande solidité, qu’au prix auquel on achète communémen­t la pierre brute. » Une restaurati­on est alors envisagée. Elle n’aura pas lieu.

Tradition provençale

Le moulin porqueroll­ais s’inscrit dans la pure tradition des moulins à vent de Provence : six mètres de hauteur, six mètres de diamètre, avec des murs d’une épaisseur d’un mètre à la base. L’escalier monte dans le sens inverse des aiguilles d’une montre et la porte d’entrée se trouve dans la direction contraire au vent.

Le débarcadèr­e a sans doute été construit au même moment pour le déchargeme­nt du blé et le chargement des sacs de farine. Avant sa constructi­on, la zone n’étant qu’un pâturage pour chèvres, il n’y avait aucune voie d’accès. Le premier chemin partait du port, traversait en diagonale la future place, puis après un large tournant suivait la crête en direction de la face nord du moulin. Ce parcours a complèteme­nt disparu avec la constructi­on du village en 1815. En 2007, à la suite de sa restaurati­on à l’identique réalisée par l’architecte JeanCharle­s Dutelle, un enfant du pays, le moulin a retrouvé sa splendeur d’antan et fait le bonheur des visiteurs.

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