Alex Lutz « Une affection particulière pour les outsiders »
Dans 5ème Set, de Quentin Reynaud, le comédien endosse le maillot d’un tennisman au crépuscule de sa carrière… qui cherche à revivre des instants de gloire. En salle le 2 décembre 2020.
Après avoir joué et interprété le chanteur vieillissant Guy Jamet, qui lui a permis de rafler le César du meilleur acteur en 2019, Alex Lutz livre une nouvelle performance intense, physique et mentale dans un film émouvant, en partie tourné à Roland Garros. Le complexe sportif ayant pour la première fois ouvert ses portes à une équipe de tournage. Kristin Scott Thomas et Ana Girardot figurent également au casting.
Thomas Edison est un ancien espoir, qui malgré son âge et ses blessures refuse de prendre sa retraite. La trajectoire de cet outsider vous a particulièrement touchée ?
J’éprouve une véritable affection pour ces personnages aux parcours chaotiques. J’ai aussi un rapport extrêmement fort au temps qui passe. Comment composer avec lui ? Avec les erreurs que l’on commet ? Les victoires que l’on gagne ? Ou encore avec ses propres satisfactions qui ne sont pas vécues de la même façon par les gens qui nous entourent ? Je me demande toujours comment matérialiser cette sensation, finalement universelle, dans les projets que j’entreprends. En revanche, je ne sais pas exactement d’où ça vient… Sans doute du moment où j’ai compris que l’on n’est pas éternel.
Étiez-vous familier avec le tennis et comment s’est déroulée la préparation ?
Pas vraiment… J’ai surtout pensé à ces moments, ces épilogues à Roland Garros. Vous savez, quand le silence s’installe et précède les cris du public… Je tenais à aller vers cette rencontre, à trouver le chemin par lequel il faut passer pour obtenir ces applaudissements. J’ai été doublé pour des scènes de matchs. C’est la magie du montage. Il a fallu cependant un entraînement quotidien car il fallait que les services et les frappes soient crédibles… Des coachs et des préparateurs m’ont aidé, notamment dans la petite gestuelle. Savoir comment récupérer les balles, comment un joueur boit une bouteille d’eau après quatre heures d’efforts, on a aussi imaginé des petits rituels.
La solitude que ressent le tennisman est-elle comparable à celle qu’un artiste peut éprouver lors d’un one-man-show ?
On peut effectivement effectuer un petit parallèle. Contrairement à des métiers comme médecin,
‘‘ où il y a une utilité immédiate, comme lors d’une pandémie, dans ces métiers liés au sport ou au spectacle, on peut se demander où est la logique, la foi. On compose avec quelque chose d’un peu dérisoire… Mais ce n’est pas inutile pour autant dans la mesure où on procure des émotions aux autres ainsi qu’à soi-même. S’en rendre compte, c’est faire le pari que c’est essentiel… Cela demande une véritable force mentale pour continuer, pour ne pas lâcher.
La dépense physique est
ème
également importante dans les deux cas…
Mes spectacles sont physiques et j’en sors toujours épuisé. L’essentiel est de donner son meilleur et de chercher la véracité de ce que l’on a voulu exprimer lors de l’écriture. La vibration doit partir dans le bon sens. Réussir plusieurs fois de suite à provoquer le rire, à toucher les gens… À chaque fois, les balles sont différentes. Sur scène il faut aussi faire abstraction de ce qui a pu se passer dans la journée. Le côté sportif se situe dans cette énergie et dans le travail du corps. Après, la différence c’est qu’au tennis il y a la violence du classement. C’est un véritable couperet qui peut briser bien des espoirs de carrière, notamment chez les jeunes.
J’ai un rapport fort au temps qui passe”