Le Chili de Salvador Allende, de l’espérance à la fin tragique
Après Là où se termine la terre, Désirée et Alain Frappier poursuivent leur exploration, entre le documentaire et l’intime, d’une histoire chilienne aux résonances universalistes.
Demain, le Chili commémorera le demi-siècle de l’accession au pouvoir de Salvador Allende, après l’élection du 4 septembre 1970. C’est une histoire qui a déjà cinquante ans, mais dont les plaies sont toujours ouvertes.
Après Là où se termine la terre, dont l’action se déroule de 1948 à 1970, Désirée et Alain Frappier poursuivent leur exploration de l’histoire chilienne là où ils l’avaient laissée.
De la victoire des urnes au coup d’État militaire
La grande Histoire est ainsi bien connue : celle du Chili que le monde entier observait en 1970, en pleine guerre froide. Celle de Salvador Allende, président socialiste parvenu au pouvoir par les urnes, et qui tenta, le temps de mille jours de pouvoir, de mettre en place un État socialiste (nationalisations, réforme agraire, etc.) de façon non-violente et légale. Jusqu’au coup d’État militaire du 11 septembre 1973, dans lequel il trouvera la mort, avant qu’un régime militaire autoritaire, incarné par Augusto Pinochet, lui succède. Nourri de nombreux documents d’époque – coupures de presse, interventions radio ou télé, témoignages... –, les faits historiques sont retranscrits avec minutie et passion par Désirée et Alain Frappier, fournissant un précieux travail historique et documentaire.
Mais il fallait aussi l’histoire intime, un visage incarnant cette période, cette espérance et cette issue tragique. Ce sera le visage de Soledad, rencontrée dans son exil belge. Elle a quinze ans lors de l’élection de 1970, et rencontre Ricardo, de trois ans son aîné et membre charismatique du « Mir », le mouvement de la gauche révolutionnaire.
Les incarnations, Soledad et Ricardo
Ricardo est responsable de la toma, une occupation illégale de terrain par des « sin-casa », avec pour projet de loger décemment cette population pauvre. Soledad et Ricardo traverseront amoureusement, donnant naissance à deux enfants, les événements chiliens. La petite et la grande histoire sont narrées avec humanité et authenticité. Les liens entre l’une et l’autre sont tissés avec intelligence et fluidité, et le récit est haletant de bout en bout.
Porteur d’un message universaliste et humaniste, malgré sa sombre conclusion, l’ouvrage est, en outre, dédié à la mémoire de l’immense écrivain chilien Luis Sepúlveda, décédé en avril 2020, qui avait pu apprécier Le Temps des humbles. « Plus qu’un roman graphique, cette oeuvre de Désirée et Alain Frappier est une saga qui raconte les mille jours du gouvernement d’Unité populaire dirigé par Salvador Allende et de la volonté du peuple chilien de s’approprier son destin », a déclaré l’écrivain.
Un ouvrage dédié à la mémoire de Luis Sepúlveda