« Le vélo s’est aseptisé »
Détenteur du record de participations sur le Tour (18), Sylvain Chavanel en 2018. Cette année, il parcourt les routes pour ASO, l’organisateur a pris sa retraite
Sylvain Chavanel a fait ses débuts sur le Tour à tout juste 22 ans. C’était en 2001. Le Poitevin portait alors les couleurs de l’équipe Bonjour de Jean-René Bernaudeau et incarnait l’avenir du cyclisme français. En 2018, il raccrochait le vélo à 39 ans, après un dernier Tour de France disputé avec Direct Energie et le manager qui l’avait lancé. Entre les deux dates, 18 Tours de France disputés et 16 bouclés, soit deux records dans la Grande Boucle. Depuis ses débuts, Chavanel n’a jamais manqué une édition du Tour. Une course qu’il aura marquée, en remportant trois victoires d’étapes (à Montluçon en 2008, à Spa et aux Rousses en 2010), portant le Maillot Jaune deux jours (en 2010) et en terminant supercombatif à deux reprises (2008 et 2010).
Quel est votre rôle sur le Tour de France ?
Je fais partie de l’organisation, je suis avec les invités dans le cadre du programme hospitalité. C’est autre chose, une expérience nouvelle par rapport à où j’étais avec les journalistes (pour l’Equipe). Je suis plus au coeur de l’action même si c’est particulier avec la Covid. C’est intéressant de voir les coulisses de l’épreuve. Ça change énormément, je parle beaucoup avec les invités, il y a des passionnés, des novices, des curieux. J’essaie d’apporter mon expérience accumulée pendant ans sur le vélo.
Votre regard sur ce début de Tour ?
Le premier week-end, on a commencé par deux belles étapes, avec du spectacle. Sportivement, c’était très intéressant et ça va l’être de plus en plus avec ce tracé jusqu’à la troisième semaine. Ce Tour est très dur.
Les Français peuvent-ils faire quelque chose ?
Les Tricolores ont déjà prouvé leur niveau depuis un certain temps, ils sont capables de monter sur le podium, certains ont même la gagne dans les jambes. Mais c’est tellement difficile, il y a tellement d’obstacles sur semaines, il faut de la réussite aussi. J’attends des Français des victoires d’étapes mais aussi une victoire finale.
Pour Pinot ?
Ça peut être lui ou un autre coureur. Mais c’est lui la meilleure carte française actuellement. Je préfère analyser l’après Tour que de mettre de la pression sur un coureur. Il sait ce qu’il a à faire, il est là pour gagner le Tour.
Vous avez couru Tours de France, un record, êtes-vous encore impressionné par l’épreuve ?
Oui, par l’organisation, par ce que dégage le Tour. Le Tour ça reste le Tour, c’est la pierre angulaire de ce sport. Tout tourne autour du Tour.
Aviez-vous conscience de tout ça sur le vélo ?
Non, je ne m’en rendais pas compte. Je ne pensais qu’à pédaler, on ne pense pas à ce qui se passe derrière les barrières.
Le Tour comme coureur, ça vous manque ?
Non, car je sais les sacrifices que ça demande. Je fais toujours du sport, encore du vélo, du triathlon, je vois d’autres choses, je découvre d’autres milieux, c’est bien aussi.
Votre record de participations : est-ce une fierté ?
Oui, mais je n’y pense pas tous les jours. Ça fait partie de ma vie, de mon parcours. Maintenant c’est dans un placard, dans une armoire. Mais c’est vrai que prendre le départ de Tours, c’est impressionnant, c’est ans au haut niveau. Ça paraît exceptionnel avec le recul.
Ce record, êtes-vous allé le chercher ?
Même pas, c’est le hasard et c’est venu naturellement. Peut-être que le dernier, j’ai été le chercher sur la ligne car ils étaient trois à (George Hincapie, Jens Voigt et Stuart O’Grady), je voulais aller les sauter sur la ligne (rires). Ce n’est pas demain la veille qu’on va le sauter ce record. Le dernier Tour a été parfait car je suis rentré sur les Champs-Élysées, seul, pour mon e et dernier
Tour. Je suis parti comme ça, un tour sur la plus belle avenue du monde, tout seul.
Ce record, c’est au-dessus de vos victoires d’étapes ?
Non, les participations sont venues naturellement, car le Tour c’est un passage obligé quand on est Français. Le Tour vous amène
Sylvain Chavanel SA FICHE
Né le juin en à Châtellerault. Cycliste professionnel de à (Bonjour, Brioches La Boulangère, Cofidis, Quick Step, Omega Pharma, IAM, Direct Energie).
Palmarès : Tours de France (e en , victoires d’étapes, Maillot Jaune jours en ),
Vueltas (e en , maillot rouge jours en ), un Giro.
Six fois champion de France du chrono (record national), et une fois en ligne ().
Victoires sur : A travers la Flandres (), le Grand Prix de Plouay (), Quatre Jours de Dunkerque (, ), Trois Jours de la Panne (, )... une notoriété. Si je suis populaire c’est grâce à mes raids solitaires, j’allais de l’avant, j’étais aux avant-postes, on m’a beaucoup vu devant. Mais les victoires d’étapes ça reste superbe…
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Mon record de participations, ce n’est pas demain la veille qu’on va le sauter. ”
Aujourd’hui, le peloton ne veut même plus jouer avec les échappées. ”
Existe-t-il un Sylvain Chavanel en ?
C’est dur d’être bon partout, moi j’étais bon partout, aujourd’hui pour exister il faut se spécialiser. Être bon partout, ce n’est pas forcément la meilleure chose aujourd’hui. Le vélo s’est aseptisé et professionnalisé. Jérôme Cousin qui fait un raid lors de la troisième étape (vers Sisteron), c’est suicidaire mais s’il ne fait pas ça, on s’ennuie derrière l’écran. On lui a laissé minutes, on le casse direct. Il y a ou ans on pouvait prendre - minutes. Aujourd’hui, le peloton ne veut même plus jouer. C’est dommage.
Et vous investir dans une équipe cycliste ?
Pas pour le moment. Je suis dans les chevaux, je me suis investi dans le milieu des trotteurs, ça me plaît. J’entraîne et j’ai découvert la compétition récemment, j’adore. Je suis aussi ambassadeur pour la marque de vélo Giant. C’est particulier car tout est annulé en , sinon on m’aurait vu partout, notamment sur l’Etape du Tour, mais aussi dans le triathlon car je vais me lancer dedans aussi.