Monaco-Matin

La stabilité pour socle

Malgré un profond changement de modèle, désormais tourné vers les jeunes et la formation, le RCT nouveau n’a renié aucune ambition. Ce qui ne l’empêche pas d’avancer prudemment

- Textes : Philippe BERSIA, Fabrice MICHELIER, Olivier BOUISSON

Cette fois, la page Mourad Boudjellal est vraiment tournée et le RCT de Bernard Lemaître a pris un virage à 180 degrés pour se tourner résolument vers sa formation avant de regarder si l’herbe est plus verte ailleurs.

Finis les grands mouvements de l’intersaiso­n, les valses d’entraîneur­s et autres perturbati­ons souvent nuisibles à la performanc­e. Bernard Lemaître comme Patrice Collazo en sont persuadés : seule la stabilité peut permettre d’avancer et de performer durablemen­t. Et leurs actes sont en adéquation avec leur discours. Le président vient ainsi de convaincre son manager de s’engager pour cinq nouvelles saisons.

Objectif ? « Ramener le RCT au tout premier niveau du gotha français et européen, explique Bernard Lemaître. Et pour ça, il faut des bases, des infrastruc­tures, une organisati­on profession­nelle adaptée et un projet sportif solide ancré dans les racines du club. Il faut aussi des facteurs de réussite basés sur la qualité des hommes, et il faut que tout cela s’inscrive dans la durée. »

Une douzaine de joueurs ont ainsi quitté le club pour faire de la place aux jeunes, et le recrutemen­t toulonnais a été particuliè­rement ciblé avec trois arrivées seulement (Toeava, Jolmes et Boyadjis). Côté staff, seul Sébastien Tillous-Borde a cédé sa place à Julien Dupuy pour s’occuper des trois-quarts varois.

Mais parallèlem­ent à cette vague de départs annoncée, de nombreux joueurs ont prolongé leur bail pour marquer leur confiance et leur engagement dans le projet RCT 2019-23.

Eben Etzebeth :

« Je veux gagner des titres avec Toulon »

Au-delà des jeunes, logiquemen­t motivés par ce nouveau contexte, Charles Ollivon avait ouvert la voie l’hiver dernier en paraphant un contrat de cinq saisons. Eben Etzebeth s’y est engouffré cet été. Il sera lui aussi toulonnais jusqu’en 2024 : « Même si elle a été tronquée, j’ai pris beaucoup de plaisir lors de ma première saison ici. Mes coéquipier­s, les gens au club et les supporters ont été “super” avec moi. Je me suis vite adapté à la vie à Toulon et je suis heureux ici. C’est pourquoi j’ai décidé de rester encore plus longtemps. Il y a plein de choses… J’aime la rugosité du Top 14. J’adore toute la passion qu’il y a autour du rugby. Toulon est vraiment une ville que j’adore », a ainsi justifié le champion du monde Springbok auprès du Figaro, précisant au passage pour ceux qui auraient pu en douter : « Quand vous jouez pour une équipe, vous devez vous fixer des objectifs élevés. C’est mon cas, je veux gagner des titres avec Toulon. »

Gagner des titres ? Le RCT n’a plus connu ce grand bonheur depuis cinq ans maintenant.

Mais ses performanc­es l’an passé et sa montée en puissance jusqu’à ce que la Covid-19 vienne le couper dans son élan, invitent à nouveau les supporters toulonnais à en rêver…

Après une première saison de transition très compliquée à son arrivée au RCT, Patrice Collazo a su recréer l’an dernier un vrai collectif, qui a commencé à donner de beaux fruits puisqu’il pointait en 4e position du Top 14 avant que celui-ci ne soit stoppé à l’issue de la 17e journée, et se préparait même à disputer un quart de finale de Challenge européen.

De quoi en faire un favori du Top 14 cette année, comme certains spécialist­es s’empressent de l’annoncer ? Ce serait aller un peu vite en besogne, et Patrice Collazo, qui n’a toujours rien gagné avec le RCT, réfute clairement l’idée.

Patrice Collazo : « Aller le plus loin possible »

Mais ce n’est pas parce qu’il préfère s’éviter une pression inutile que le manager général du RCT n’a pas envie de gagner. Il ne pense mêmequ’àça!

« Quand on est entraîneur du Rugby club toulonnais, l’objectif est d’aller le plus loin possible. La Coupe d’Europe, car c’est la première échéance qui va arriver très tôt, sera une étape importante pour ce jeune groupe qui est en constructi­on depuis la saison dernière. Et, bien sûr, nos objectifs seront élevés pour le Top 14. Mais on sait aussi que la concurrenc­e est là. Quand on commence un championna­t avec Toulon, c’est pour aller le plus loin possible et tout mettre en oeuvre pour le gagner. Mais on est plusieurs sur la ligne de départ à vouloir la même chose. Annoncer un titre ou une position au mois de juin me semble utopique. Mais ce qui est sûr, c’est que nous avons construit un effectif et surtout un état d’esprit pour que le RCT aille le plus loin possible. » Savant mélange de jeunes déjà un peu aguerris (Gros, Carbonel, Cordin, Belleau, Setiano, Dridi) et d’anciens rompus à tous les combats (Parisse, Lakafia, R. Taofifenua, Toeava, Serin...), l’effectif toulonnais va se présenter sur la ligne de départ avec de sérieux atouts dans sa manche. Mais à quelques heures du coup d’envoi de cette saison minée par la Covid-19, bien malin celui qui aurait une idée exacte des forces en présence et du déroulemen­t de la compétitio­n.

Entrée en matière musclée

Certes, le RCT a pour l’instant été épargné par le virus et semble mieux loti que certains de ses principaux rivaux déjà impactés (Lyon, Toulouse, Clermont…), mais rien n’assure qu’il ne devra pas lui aussi payer un tribut à la pandémie. Ce qui est sûr, en revanche, c’est que le calendrier de l’année, tant en Top 14 qu’en Challenge européen où il doit disputer son quart de finale dès le 19 septembre, ne lui permettra pas de rater son entrée en scène.

On sera donc sans doute assez vite fixé sur ses réelles potentiali­tés et sa capacité à aller chercher un nouveau titre dès cette année, première vraie saison post-Boudjellal, également marquée par l’achèvement d’un centre de performanc­e et de formation qui pourrait illustrer, à lui seul, le changement profond en marche à Toulon.

 ??  ?? Doublé par les puissances de l’argent, le RCT a tourné la page des années stars pour se diriger vers les jeunes et la formation. Après deux saisons «pour voir», le groupe de Patrice Collazo, très stable, semble en mesure de renouer avec l’ambition. (Photos Dominique Leriche et Patrick Blanchard)
Doublé par les puissances de l’argent, le RCT a tourné la page des années stars pour se diriger vers les jeunes et la formation. Après deux saisons «pour voir», le groupe de Patrice Collazo, très stable, semble en mesure de renouer avec l’ambition. (Photos Dominique Leriche et Patrick Blanchard)
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Patrice Collazo
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