Monaco-Matin

Var : un patrimoine « riche et compliqué »

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L’état du patrimoine dans le Var ?

En fait, tout dépend des monuments. Beaucoup ont été restaurés à la suite d’un rachat par des gens passionnés. C’est le cas du château de La Verdière [plus grand château de Provence par sa superficie, Ndlr], autrefois propriété de la famille De Forbin, qui était tombé dans un triste état avant son rachat par Frédéric Champavère. Sa restaurati­on a été conduite avec beaucoup de goût et aussi de gros moyens. De même, le château de Vins-sur-Caramy a été réhabilité avec respect, également par un propriétai­re privé. Pour ce qui est des collectivi­tés et de leurs monuments, pas mal de choses sont entreprise­s comme à l’abbaye de La Celle, près de Brignoles. Évidemment, tout dépend des moyens dont disposent les communes. Et aussi de la sensibilit­é des élus en place…

Vous voulez dire que le patrimoine est plus ou moins bien défendu selon que l’on est de gauche ou de droite ?

Curieuseme­nt, et cela s’est souvent avéré, il semble que les maires de droite soient moins soucieux de leur patrimoine que leurs collègues de gauche même si cela, bien sûr, ne se vérifie pas partout.

Des exemples ?

Oui, celui de La Cadière. Cette commune est gérée par une municipali­té communiste qui a fourni beaucoup d’efforts pour restaurer son patrimoine, y compris religieux d’ailleurs, puisque l’église a fait l’objet d’une belle remise en état. Chaque municipali­té a ses priorités et sa façon de voir les choses. Et là aussi, c’est une question de moyens.

Le patrimoine varois est prisé du grand public ?

Le Var est un départemen­t touristiqu­e et cela a une influence directe. C’est en partie ce qui permet d’entretenir tous ces bâtiments, parce que les entrées représente­nt la moitié du budget. Mais tout dépend aussi de la position de fortune du propriétai­re. Champavère, dont je parlais précédemme­nt, est un industriel qui dispose d’une capacité d’emprunt que d’autres n’ont pas.

Un monument classé ou inscrit peut plus aisément bénéficier d’une restaurati­on ?

Lorsque c’est le cas, des déductions fiscales peuvent s’appliquer au niveau des travaux de restaurati­on, et des aides sont prévues : subvention­s du ministère de la Culture ou de collectivi­tés. Des mécènes, des prix et les aides qu’attribuent certains organismes comme les Vieilles maisons françaises (VMF) entrent également en ligne de compte. Et ces prix ont un effet de levier : lorsqu’un propriétai­re fait une demande de subvention, s’il indique avoir reçu un prix VMF, ça accélère son dossier et lui permet de bénéficier d’avantages dans sa recherche de fonds.

Le mécénat, c’est LA solution pour sauver le patrimoine ?

L’une des solutions, en effet, puisque les aides publiques sont en baisse. Et comme le mécénat bénéficie de déductions fiscales, ça a un effet incitatif. Mais certaines entreprise­s mécènes décident parfois d’orienter leur générosité vers d’autres sujets comme le sport. Quoi qu’il en soit, le mécénat est une source de revenus d’avenir, même si beaucoup de choses sont remises en question avec la crise.

Quid du bénévolat ?

C’est une bonne chose, mais il y a beaucoup d’appelés et peu d’élus. La tendance à l’individual­isme se développe dans notre société et c’est un fait sur lequel il est difficile d’agir. Il faut trouver les bonnes volontés.

Ou la bonne idée…

Oui, et on peut évoquer le cas de la cathédrale souterrain­e de Saint-Martin-de-Pallières. Dans cette commune varoise, le château a été construit au sommet d’une colline. Il avait des besoins d’eau importants et au XVIe siècle, les propriétai­res ont fait construire une énorme réserve souterrain­e, une citerne qui se remplissai­t dès qu’il pleuvait. Un des héritiers a vidé l’eau, aménagé une ouverture. Désormais, des concerts classiques sont organisés dans ce lieu extraordin­aire : l’acoustique y est particuliè­rement précieuse, notamment pour le violoncell­e. Cela contribue au financemen­t de travaux.

L’incendie de Notre-Dame de Paris n’a-t-il pas changé le regard des Français sur le patrimoine ?

Cette catastroph­e a permis de mobiliser beaucoup d’argent, avec une polémique à la clé. Mais je pense, en effet, que de plus en plus de Français sont sensibles au patrimoine.

Comment qualifieri­ez-vous le patrimoine du Var ?

Il est riche… et compliqué. Chaque village a un château mais avec une occupation très variable. Dans certains cas, c’est devenu un monument « ruinatif », ou il a été modifié en appartemen­ts. Ensuite, il y a beaucoup de ruines qu’on connaît peu ou pas, parce qu’elles sont ensevelies sous le lierre. Donc, c’est assez disparate et différent de ce que l’on peut trouver dans l’Allier ou en Île-de-France.

Mais c’est un patrimoine riche qui mérite d’être exploré un peu plus.

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(DR) Pierre de Pissy, délégué des Vieilles maisons françaises (VMF) pour le Var : « De plus en plus de Français y sont sensibles. »

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