Monaco-Matin

Thierry Mariani : « Le front républicai­n ne tient plus »

L’ancien ministre UMP de Nicolas Sarkozy, aujourd’hui député européen du Rassemblem­ent national, pourrait en conduire la liste aux régionales. Il nous a livré son analyse du futur scrutin

- PROPOS RECUEILLIS PAR THIERRY PRUDHON

Il a été ministre des Transports de Nicolas Sarkozy et tête de liste UMP aux régionales de 2010 en Paca. Figure du courant de La Droite populaire, Thierry Mariani a fait un pas de côté en 2019. Il a alors été élu député européen sous l’étiquette du Rassemblem­ent national, dont il pourrait bien conduire la liste aux prochaines régionales. En visite, hier, des deux côtés de la frontière italienne, pour prendre le pouls de la question migratoire – et soutenir au passage la liste sénatorial­e maralpine, menée par Philippe Vardon –, le Vauclusien de 62 ans a évoqué les prochaines échéances.

L’objectif de votre visite ?

Je viens discuter avec les gens qui sont sur le terrain, notamment la police aux frontières. Il y a un vrai problème migratoire aujourd’hui au niveau de l’Europe, puisque la commissair­e à la Migration, Mme Johansson, veut imposer des quotas aux États. On assiste à une démission de l’Europe qui considère l’immigratio­n comme une fatalité. Elle ne veut pas contrôler les frontières mais répartir le fardeau de tout ce qui rentre. C’est ainsi qu’un plan de , milliards, sur la période -, a été décidé pour accompagne­r l’immigratio­n. Or, cette politique a des conséquenc­es sur l’insécurité, même si elle n’est pas l’unique raison de sa montée. L’Europe est le seul espace au monde où les frontières sont à ce point ouvertes.

Êtes-vous candidat à la candidatur­e pour mener la liste RN aux régionales en Paca ?

Pas pour le moment. D’autant qu’on ne sait toujours pas quand elles auront lieu. On est à six mois, théoriquem­ent, de ces élections, mais le décret fixant leurs dates n’est toujours pas paru. Un report, désormais évoqué publiqueme­nt, est envisageab­le. Et, à titre personnel, il ne me choquerait pas, dès lors que les élections ne seraient pas repoussées après la présidenti­elle, ce qui serait une manoeuvre. En revanche, eu égard aux risques sanitaires à la sortie de l’hiver, les reporter en juin pourrait faire consensus. D’autres candidats sont par ailleurs possibles, comme David Rachline, le maire de Fréjus, et Stéphane Ravier, le sénateur de Marseille. Une candidatur­e est tentante, mais j’attends de voir le contexte en fin d’année.

Mais mars ou juin, ça ne changera rien aux enjeux…

Ça décalera le déclenchem­ent des comptes de campagne, qui démarrent dans les six mois qui précèdent. Et puis on est toujours candidat en fonction d’une situation. Aujourd’hui, on semble s’acheminer vers une union de la gauche et des Verts, et une alliance de LR et de LREM. Les propos de Christian Estrosi dans vos colonnes sont explicites sur ce point [nos éditions d’hier].

Au moins, il est honnête. L’histoire est déjà écrite. La seule question est de savoir si LR et LREM feront alliance avant ou après le second tour. Nous aurons trois blocs : les Verts et la gauche qui, avec la prise de Marseille, sont en phase ascendante, le bloc gouverneme­ntal et le RN. Arithmétiq­uement, LR et LREM ne pourront guère se permettre de présenter deux listes qui arriveraie­nt e et e au er tour. Une chose est sûre, le discours de  sur l’élection du RN qui signifiera­it l’arrivée des fascistes ne sera plus crédible. Les élections municipale­s ont été un demi-échec pour le RN, parce qu’à part Perpignan, on n’a quasiment gagné aucune ville. Mais elles ont aussi été une demi-victoire, puisque les maires RN sortants ont été facilement réélus.

Malgré tout, la volonté du RN d’attirer des figures de la droite, à part vous et Jean-Paul Garraud, s’est à ce jour peu concrétisé­e...

D’autres parlementa­ires vont nous rallier après les sénatorial­es. Mais c’est vrai, pour l’instant, nous sommes surtout rejoints par des militants de la droite plus que par des notables. Dans l’entretien que vous a donné Christian Estrosi, on sent bien que la droite préfère sacrifier ses conviction­s plutôt que de perdre la Région. La droite est prête à toutes les alliances pour garder les postes. Mais tout le monde va-t-il s’accommoder de ce genre d’arrangemen­ts ? Je regarderai avec attention ce que décideront de faire des gens comme Éric Ciotti ou Julien Aubert…

Si vous êtes le candidat du RN en Paca, ça ne manquera pas de sel, après y avoir mené la liste UMP en  face à Jean-Marie Le Pen...

Marine Le Pen n’est pas JeanMarie Le Pen. Elle ne fait plus peur et, face à elle, le front républicai­n ne tient plus la route. Elle cherche à ouvrir le parti. Et, dans le même temps, les personnali­tés de droite disparaiss­ent progressiv­ement et se font absorber par la Macronie. La situation actuelle me rappelle les années , quand l’UDF tenait les mandats locaux et le RPR les mandats nationaux, tout ce monde cohabitant par intérêt commun. En marche a raté son implantati­on locale. Par contre, Les Républicai­ns gardent le tissu local. À rôles renversés, les héritiers du RPR tiennent les mandats locaux et le parti présidenti­el les mandats nationaux. Un accord de fait s’opère entre les deux, au regard d’intérêts communs pour partager des postes, à défaut de défendre des conviction­s.

Si vous êtes candidat, quelles seront vos grandes lignes de campagne ?

Il y a des thématique­s qui n’ont pas changé : les problèmes des transports de proximité, du quotidien, sont toujours là, et ce ne sont pas les trains de nuit qui vont les régler. Les problèmes de sécurité persistent également, on le voit aisément. Et puis le grand sujet sera celui du soutien économique, au secteur de l’hôtellerie-restaurati­on en particulie­r qui va se trouver sinistré. Il faudra aider en priorité les petites entreprise­s, dont celles du tourisme.

Marine Le Pen est-elle toujours la candidate idoine du RN pour  ?

En , Mitterrand, que tout le monde disait foutu un an avant, a été élu. Idem pour Chirac en . Je ne vois pas qui d’autre que Marine Le Pen. Marion Maréchal a été claire, elle ne sera pas candidate. Robert Ménard, lui, doit passer du Schtroumpf grognon au Schtroumpf constructe­ur. Marine Le Pen a loupé le débat de , c’est vrai, on ne va pas se raconter des histoires, mais elle se prépare différemme­nt, il y a un travail très sérieux de réflexion et de propositio­n autour d’elle. En , elle incarnera un projet d’ouverture à des gens de droite face au candidat de la grande confusion, parvenu aux limites du « en même temps », on le voit en matière de sécurité et de justice avec deux ministres qui ne sont pas compatible­s, pas plus que ne le sont par exemple Christian Estrosi et Christophe Castaner.

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(Photo Th. P.) Thierry Mariani, hier matin à Nice.

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