Marineland : un combat de longue haleine
Le parc animalier antibois suscite la fronde grandissante des opposants aux delphinariums. Mais le combat a semblé s’accélérer ces dernières années, notamment via les réseaux sociaux
Octobre : tensions après le décès de l’orque Valentin
Les 3 et 4 octobre 2015, des pluies diluviennes s’abattent sur la Côte d’Azur. La Brague, rivière attenante au parc, sort de son lit. Une vague de deux mètres déferle sur les bassins animaliers décimés. « Les dégâts matériels sont très importants, 90 % du site a été touché », réagit la direction de Marineland. Parmi les 20 animaux décédés, Valentin (19 ans), une des cinq orques, succombe quelques jours plus tard, victime d’une torsion de l’estomac. L’affaire défraie la chronique. Plus de 300 défenseurs de la cause animale défilent, trois semaines après les intempéries, le 25 octobre, aux abords de « Prisonland », comme ils disent, en répondant à l’appel du collectif « Sans voix Paca ». Jusqu’à la réouverture du parc aquatique, le 21 mars 2016, les manifestations anticaptivité se succèdent.
Le 27 mars, Sea Shepherd annonce attaquer Marineland en justice pour « maltraitance involontaire animale », après le troublant décès de Valentin. Dans sa plainte, l’association environnementale met également en cause Marineland pour « pollution volontaire » des eaux environnantes. De son côté, Marineland annonce un nouveau concept plus pédagogique avec des visites guidées, des nourrissages commentés et de nouveaux spectacles. La direction souligne également que « les conditions de bien--être des mammifères marins sont soigneusement et strictement contrôlées par plusieurs organisations et réglementations européennes et internationales ».
Mai : une première « révolution » retoquée pour vice de procédure
Dans l’entre-deux-tours de l’élection présidentielle, la ministre de la Transition écologique Ségolène Royal signe le 3 mai 2017 un nouvel arrêté modifiant la loi de 1981 réglementant « strictement » les delphinariums. [lire ci-dessous]
Juillet : manifestants anticaptivité à l’action
Ce 22 juillet 2018, une quarantaine de manifestants s’enchaînent les uns aux autres à l’entrée principale et aux rambardes du parc animalier. Trois heures de « captivité » simulée sous le regard des visiteurs du parc médusés, sur un parvis écrasé de chaleur.
Mars : une plainte pour « cruauté » sur l’orque Inouk
Dans un conflit de communication permanent, les deux mondes font bloc. Tandis que les happenings citoyens anticaptivité se multiplient, le parc collectionne les labels de protection environnementale.
Le 9 avril, l’association One Voice, soutenue par le Gac, sort du bois et dépose plainte visant Marineland pour « cruauté » envers une de ses orques au parquet de Grasse. Il s’agit de la santé d’Inouk, 20 ans, qui aux dires de l’association « souffre le martyr à force de ronger les parois du bassin [...] Nous demandons qu’il soit placé dans un sanctuaire marin » . Le parc dénonce, lui, « la manipulation médiatique» pour lui nuire. « Inouk est en bonne santé [...], il n’y a aucune souffrance », assure-t-il. « C’est chaque année la même chose, au mois d’avril, puis avant l’été, les hostilités se déclenchent pour nous affaiblir économiquement avant les vacances de Pâques ou d’été. »
Septembre : l’Etat assigné devant le tribunal administratif
One Voice saisit une nouvelle fois le Conseil d’Etat pour l’inaction du gouvernement. Pour l’association, le retoquage de l’« arrêté Royal » ne passe pas.
L’objet de la procédure lancée quelques mois plus tôt ? Obliger l’Etat a prendre un arrêté assurant le même degré de protection que celui pris en 2017, qui fixait les caractéristiques générales et les règles de fonctionnement des établissements présentant des cétacés au public. Trois parcs sont concernés : le Marineland d’Antibes, le Parc Astérix (Oise) et la Cité de Marine de Port Saint Père (Loire-Atlantique). L’association réclame une nouvelle législation ainsi que le versement d’une somme de 500 000 € à titre de dommages-intérêts en réparation «du préjudice moral aux intérêts qu’elle défend ». La décision sera rendue dans les prochaines semaines. Mais cette bataille judiciaire s’annonce compromise. Le 17 septembre à Paris, le rapporteur public du Conseil d’Etat a sèchement retoqué la demande de l’association
Avant de demander le rejet de la requête, le magistrat parisien s’est autorisé une « remarque générale » en doutant du bien-fondé de la demande de réparation financière de One Voice et doutant que « cela serve la cause qu’elle défendait ».