Les impôts de Mme Michu
Promettre de ne pas augmenter les impôts en ayant débloqué milliards en urgence dès mars puis annoncé un plan de relance de milliards supplémentaires, il fallait oser. Sur l’air du « quoiqu’il en coûte » cher à Emmanuel Macron, le gouvernement a fait un pari. Celui d’une dynamique qui permettra de sauver l’économie, mais aussi de générer des recettes nouvelles en soutenant la croissance. Fidèle à sa parole, Bercy vient de valider dans le budget la suppression progressive de la taxe d’habitation pour les plus aisés ainsi que la baisse de l’impôt sur les sociétés. Le gouvernement entend, avec ces confirmations, démontrer que, contrairement au fameux adage chiraquien, les promesses n’engagent pas seulement ceux qui les croient. Pour convaincre les Français, logiquement plus prompts à siffler les hausses qu’à applaudir les baisses, il n’hésite pas à en faire des tonnes. Tandis que Bruno Le Maire répète à l’envi que tant qu’il sera ministre, « il n’y aura pas d’augmentation d’impôts en France », Jean Castex jure ses grands dieux que le gouvernement « ne reproduira pas l’erreur de procéder à des hausses de la fiscalité qui affaibliraient notre croissance et enverraient des signaux négatifs tant aux entreprises qu’aux ménages ». S’il déploie des trésors de pédagogie, le Premier ministre admet en privé la difficulté de convaincre l’opinion que les prélèvements ne flamberont pas. Il le déplore, « Mme Michu de Prades » àlaquelle il fait fréquemment référence à l’appui de ses démonstrations, ne le croit pas lorsqu’il affirme que les impôts n’augmenteront pas. Ce personnage ancré dans le terroir, boussole imaginaire du locataire de Matignon, « prend volontiers les prestations, mais à du mal à accepter de payer pour les avoir », s’amuse Jean Castex. Une ingrate, Mme Michu ? Simplement une Française qui, comme saint Thomas, ne croit que ce qu’elle voit. Si elle se mettait par exemple en tête d’acheter une voiture neuve pour pouvoir rendre régulièrement visite à sa fille Mlle Michu à Perpignan, elle constaterait que le malus écologique est sur le point d’être revu à la hausse tandis que les primes pour l’achat de véhicules électriques et hybrides s’apprêtent à fondre. En France, un impôt peut toujours en cacher un autre.
« Le gouvernement entend démontrer que les promesses n’engagent pas seulement ceux qui les croient »