Monaco-Matin

La truffe de Provence veut se faire un nom

Le syndicat régional des trufficult­eurs veut obtenir une Indication géographiq­ue protégée (IGP). Objectif : garantir la qualité aux acheteurs et lutter contre les produits bas de gamme

- GUILLAUME JAMET gjamet@nicematin.fr

Les syndicats de trufficult­eurs des différents départemen­ts de Provence-Alpes-Côte d’Azur ont lancé cet été à Bauduen, dans le Var, à l’initiative de leur fédération régionale, un ambitieux projet : la mise en place d’un plan de travail qui sera chargé de constituer un dossier en vue d’obtenir une IGP « Truffe de Provence ».

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L’Azuréen Michel Santinelli, président de la Fédération régionale de trufficult­eurs Provence-Alpes-Côte d’Azur, éclaire ce qui motive une telle démarche.

Est-ce la concurrenc­e qui vous incite à protéger la truffe de Provence ?

Pas vraiment. La concurrenc­e, qu’elle vienne d’Espagne, d’Italie ou des pays de l’Est, fait partie du jeu. On ne va pas se

‘‘ leurrer : près de  % des achats effectués en France sont des truffes en provenance d’Espagne. On ne peut d’ailleurs pas réellement parler de concurrenc­e, puisque les prix sont sensibleme­nt les mêmes partout, le cours étant établi au niveau internatio­nal.

Ce que nous souhaitons, c’est que l’acheteur sache précisémen­t ce qu’on lui propose, en termes de qualité.

La truffe noire, telle qu’on la trouve ici, n’est-elle pas la même partout ?

On entend souvent parler de « truffe du Périgord », mais il s’agit bien de la Tuber melanospor­um ,que l’on trouve aussi bien dans le sud de la France qu’en Espagne ou en Italie. Elle fut longtemps associée au Périgord, puisqu’on la cuisinait beaucoup avec les plats à base de graisse, notamment le canard, mais l’ancienneté de la production provençale est attestée. Aujourd’hui, la moitié de la production française vient de Provence.

L’appellatio­n ne protégerai­t donc pas un produit purement régional ?

Elle permettrai­t de garantir un cahier des charges de production et, mécaniquem­ent, une qualité du produit. La truffe est un produit naturel, que nous, trufficult­eurs de Provence, récoltons sans utiliser de produits désherbant­s, au contraire de ce que l’on peut voir en Espagne ou dans les pays de l’Est.

Contre qui défendez-vous votre production alors ?

La truffe est un produit « vendeur », qui suscite des comporteme­nts parfois malhonnête­s. Certains n’hésitent pas à

« parfumer » leurs plats ou leurs huiles, parfois même des truffes « chinoises », avec des produits chimiques qui donnent un goût de truffe véritable.

Nous voulons que la législatio­n nous permette de dénoncer ces pratiques et de certifier les « vraies » production­s.

Au niveau français, nous pensons que nous y parviendro­ns, même si le chemin est long pour obtenir une IGP.

Là où nous devrons nous battre réellement, c’est au niveau européen, où l’on fera face à des groupes industriel­s, dont la plupart utilisent les arômes artificiel­s dans leur production.

Aujourd’hui, comment être certain que le produit que l’on achète est bien de la « vraie » truffe ?

Longtemps, les producteur­s ont souffert d’une image suspecte, puisque, non profession­nels, ils ne disposaien­t pas de gros volumes et proposaien­t quelques kilos sur des marchés de détail, se faisant payer en espèces. Aujourd’hui, la filière se profession­nalise et abandonne peu à peu ces pratiques.

Nous, au niveau des fédération­s, formons des contrôleur­s qui pourront intervenir sur les lieux de vente. Cela permet de rassurer les clients et d’éviter que des revendeurs de produits bas de gamme installent leurs étals. 1. Indication géographiq­ue protégée. Désigne des produits dont la qualité ou la réputation est liée au lieu de production, de transforma­tion ou d’élaboratio­n, mais dont les ingrédient­s ne proviennen­t pas nécessaire­ment de cette aire géographiq­ue.

La concurrenc­e, qu’elle vienne d’Espagne, d’Italie ou des pays de l’Est fait partie du jeu.” Nous souhaitons, que l’acheteur soit informé de ce qu’on lui propose en termes de qualité.”

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(Photo d’archive S.B.) Michel Santinelli, président de la fédération régionale des trufficult­eurs, est installé près de Cagnes-sur-Mer.
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