Routes effondrées : ils ne peuvent plus aller travailler
Des axes rayés de la carte. Des villages coupés du monde. Et des habitants coincés sur place. Comment s’arranger avec son employeur ? Quels droits pour les salariés ? Que dit la loi ? On vous dit tout
Après l’effroi vient rapidement l’heure des questions. Comment faire pour aller travailler ? Les violentes intempéries qui ont dévasté les vallées azuréennes il y a 8 jours ont aussi rayé de la carte de nombreuses routes. Les habitants se retrouvent coincés dans leurs villages. Coupés du monde. Alors qu’un chômage partiel a été versé durant le confinement, à quoi peuvent prétendre les salariés sinistrés dans l’incapacité de se rendre sur leur lieu de travail ?
Que disent les employeurs ?
● C’est dans le public ,que les salariés semblent le mieux s’en sortir. Daphné habite dans la vallée
(1) de la Vésubie et travaille à la préfecture. Elle confie : « Nous avons appris mercredi matin que nos salaires seraient maintenus. C’est un soulagement. »
Pour les employés de la Ville de Nice et la Métropole, Christian Estrosi a fait communiquer à chaque agent et chef de service, le numéro du pôle d’action sociale du personnel. Au bout du fil, des assistantes sociales pour les accompagner et les aider dans leurs démarches. La Ville et la Métropole délivrent « au cas par cas » : bons alimentaires, bons essence (si le trajet domicile/travail est rallongé), aides financières (allant de 100 à 600 euros), aide au relogement, mise en lien avec des psychologues...
● Dans le privé, ça reste flou. La plupart des entreprises nous ont affirmé être encore en recherche de solutions. L’heure des réponses, ce n’est pas pour tout de suite.
Chez Arkopharma, entreprise pharmaceutique dans la zone industrielle de Carros ,« 20 collaborateurs sont impactés ». Sur ce nombre, « trois ont pu se mettre en télétravail, trois autres ont pu être hébergés par de la famille ». Pour les cas plus compliqués, la direction annonce : « Une prise en charge des absences jusqu’à la fin de la semaine avec des dons de congés payés pour les employés pour lesquels la situation va perdurer. » L’entreprise avoue rester attentive aux mesures d’aides aux sinistrés qui seront mises en place dans le département. Pour d’autres sociétés, on organise des réunions afin d’apporter des réponses aux salariés. Nombre de ces derniers sont parfois injoignables, à cause des problèmes de communication liés à la tempête.
Pour d’autres entreprises encore, ça sera une perte sèche de salaire si on ne se présente pas à son poste.
« Nous avons eu au téléphone l’employé d’une entreprise de terrassement à qui on a dit d’être là, comme d’habitude, à 7 h 30, sur le chantier. Le type doit se faire 4 heures de route dans la journée », rapporte Jean-François Monti, secrétaire général CGT à Carros.
Quels sont les droits des salariés ?
« Tout dépend des conventions collectives de l’employeur », répond Jean-François Monti, qui ne manque pas de souligner : « Nous sommes encore au début, il est difficile d’avoir des réponses claires dès maintenant. Un travail énorme nous attend dans les prochaines semaines. » Le représentant syndical affirme toutefois que certains employés ont pu aménager leur temps de travail avec leur patron, « dans les cas où le temps de trajet est rallongé ».
Que dit la loi ?
Maître Walter Valentini, avocat aux Prud’Hommes à Cagnes-sur-Mer et Mougins éclaircit : « Aucun texte de loi n’oblige l’entreprise à continuer de verser le salaire d’un employé qui est dans l’incapacité de venir travailler à cause des intempéries. Même si ce n’est évidemment pas de sa faute. »
Ce« cas de force majeure » n’autorise pas pour autant un licenciement.
« C’est une situation particulière. Aucun autre organisme ne peut se substituer à l’employeur comme la sécurité sociale par exemple, dans le cas d’un arrêt maladie. »
Le spécialiste précise toutefois : « Si des mesures sont prises au niveau national, pour prendre en charge la rémunération des sinistrés, c’est différent. Cela a été le cas durant le confinement par exemple. »
C’est d’ailleurs cette solution que de nombreux sinistrés semblent espérer. Car dans le cas d’un relogement, un problème subsiste pour les parents : qui accompagnera leurs enfants scolarisés dans les vallées ?