Monaco-Matin

Médiocres, donc coupables !

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Dire que certains trouvent notre République trop peu démocratiq­ue et la voudraient plus ouverte encore à tous les souffles de la récriminat­ion. L’autorité est pourtant une vieille lune déjà dans une société qui, à force de valider tous les excès, n’est plus que brouhaha. Les perquisiti­ons effectuées hier aux domiciles d’Édouard Philippe, Olivier Véran et Agnès Buzyn en sont la triste confirmati­on. On peut tout reprocher aux politiques, y compris d’être nuls. Plus personne ne s’en prive d’ailleurs, dans un registre qui n’a jamais été aussi violent. Mais nul ne peut décemment les accuser de jouer contre leur pays. L’informatio­n judiciaire ouverte par la Cour de Justice de la République fait suite à des plaintes d’associatio­ns, de particulie­rs et même de détenus, pour « homicide involontai­re » ou « mise en danger de la vie d’autrui ». Cette judiciaris­ation de la vie publique ne date certes pas d’aujourd’hui et ne frappe pas que les puissants. Les médecins en savent quelque « Toute forme

chose, eux que d’autorité est désormais chaque coup

de bistouri ou discrédité­e, par nature. » diagnostic raté peut conduire à la barre. Mais elle s’exacerbe, à mesure que toute forme d’autorité est désormais, par nature, discrédité­e. La faillite des institutio­ns, État, école, partis politiques, syndicats, fait le lit d’une individual­isation impatiente et querelleus­e. À moins que ce ne soit l’inverse… Chacun se réserve le droit de faire un malheur et de clouer au pilori ceux qui n’ont pas satisfait ses attentes. De l’enfant-roi à l’individu-roi, la filiation maligne a logiquemen­t suivi son cours pour démonétise­r le sens collectif. L’élève qui insulte son prof, le loubard qui prend d’assaut un commissari­at, le citoyen vengeur qui assigne ses ministres en justice, participen­t, à des degrés variés, d’une même dérive corrosive. On ne gouverne plus impunément. Ce serait un progrès, si cette morale à deux balles ne s’avérait souvent plus caricatura­le que le mal. Qu’on ne s’y méprenne pas : il est impératif que ceux qui piquent dans les caisses soient punis, et sans mollesse ! Mais il est tout aussi vital que des hommes et des femmes de bonne volonté puissent gouverner, quitte à se fourvoyer, sans risquer la prison à chaque indécision.

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