Vingt-trois ans de réclusion au terrassier de Gilette
Paul Cuevas a toujours clamé son innocence mais c’est sans un mot qu’il a écouté le verdict prononcé par la cour d’assises. Il a été déclaré coupable du meurtre aggravé de Patrice Ferrari
Tout au long de la semaine, Paul Cuevas, 48 ans, terrassier à Gilette, très à l’aise devant ses juges, volubile, combatif voire théâtral, a tenté de démontrer son innocence dans la mort tragique de son ami Patrice Ferrari, 49 ans.
La victime, ancien gérant d’une société d’équarrissage, diminuée après une trépanation, avait disparu mystérieusement le 23 décembre 2015 de son domicile de Castagniers. Elle avait été retrouvée morte le 9 janvier, jetée dans un ravin de Malaussène, massacrée à coups de couteau, la carotide tranchée, le crâne défoncé.
La cour, présidée par Catherine Bonnici, et les jurés ont reconnu coupable hier Paul Cuevas de « meurtre sur personne vulnérable, escroqueries, vols et falsifications de chèques ».
Dans le box, l’accusé écoute la sentence sans broncher : vingt-trois ans de réclusion criminelle et deux tiers de peine de sûreté.
Sur les bancs des parties civiles, Marie-Claude, la mère de la victime et son fils Daniel restent impassibles, vidés par cinq jours d’un éprouvant procès, inconsolables d’avoir perdu Patrice dans ces atroces circonstances. « Je veux surtout qu’il ne recommence jamais », confie Daniel Ferrari.
« Ce dossier est une fumisterie »
Un second procès en appel ne fait guère de doute. Me Éric Scalabrin, l’avocat de la défense, l’a annoncé lors dès sa plaidoirie. Il admet que son client « charmeur, hâbleur, escroc », apparaît peu crédible. «Onne pardonne jamais un mensonge aux assises, même sur un détail. S’il escroque, c’est que c’est un tueur...»
Mais peut-on condamner quelqu’un sur un tel syllogisme ? Cuevas a souvent menti, changé de version. Cela en fait-il un tueur sanguinaire dénué de remords ? En retrait tout au long des débats, Me Scalabrin met toute son énergie à démonter cette procédure : «Un château de cartes qui s’effondre ! », « une fumisterie ». « Ce dossier ne respecte pas les règles », s’indigne le pénaliste qui n’hésite pas à prendre le directeur d’enquête « en flagrant délit de mensonge », à railler les carences des analyses téléphoniques. La tâche de la défense paraît pourtant immense tant les proches de la victimes, les avocats des parties civiles et l’avocat général n’ont pas ménagé l’accusé, persuadés de sa culpabilité. Me Boano, estime qu’il y a eu « une planification » de la part de Cuevas, qu’elle qualifie de «manipulateur, menteur ». Me Latella, conseil de la mère de la victime, estime qu’« un faisceau d’indices démontre sa culpabilité [...] Elle stigmatise : « Sa fascination pour l’argent, enfin surtout celui des autres. »
Trente ans requis
L’avocat général Vincent Edel porte le coup de grâce dans un réquisitoire méthodique. Le magistrat qui porte l’accusation répertorie l’ensemble des éléments à charge, « son comportement anormal, surprenant avant, pendant et après les faits ». Il requiert trente ans de réclusion avec une peine de sûreté des deux tiers. En 2015, Patrice Ferrari a régulièrement cherché à contacter par téléphone Cuevas. À chaque fois, les appels ont été transférés sur le répondeur. De guerre lasse, il avait fini par déposer plainte.
Ses soupçons se portaient, avec raison, sur Paul Cuevas. Plus de 80 000 euros avaient disparu de son compte en banque.
Le soir du 23 décembre 2015, Cuevas a emprunté le Renault Espace de sa compagne du moment. Les gendarmes parviendront à isoler l’ADN du défunt dans le coffre de ce véhicule pourtant nettoyé de fond en comble dans la nuit du 23 au 24 par Paul Cuevas.
Ses explications sur la présence du sang de la victime dans le coffre du véhicule n’ont manifestement pas convaincu la cour et les jurés.