Monaco-Matin

Bonnie Banane le groove dans la peau

Entre funk, R’n’B espiègle et pop française barrée, la chanteuse s’impose comme une vraie révélation avec Sexy Planet, son premier album.

- JIMMY BOURSICOT jboursicot@nicematin.fr

Ànotre connaissan­ce, Bonnie Banane n’a pas grandchose en commun avec Jean-Claude Van Damme. Mais quand il s’agit de la situer dans le paysage musical, ça part souvent en grand écart. D’un côté, on convoque des figures nord-américaine­s. Les TLC, Janet Jackson, Warren G. De l’autre, des Français dépassant du cadre. Les Rita Mitsouko, Lio ou encore Brigitte Fontaine. Pour ne rien arranger, l’intéressée s’est classée « entre Aaliyah et André Rieu ».

Au fond, ce n’est pas très grave. Parce que rien n’est vraiment faux (on hésite quand même sur la permanente de ce cher André). Mais surtout parce que depuis son apparition en 2013, Bonnie Banane a su se créer une identité propre. Un personnage grandiloqu­ent et fêlé à la fois. Toujours intrigant. Ce double musical, Anaïs Thomas semble l’aimer, plus que toutes les autres facettes de sa carrière artistique. « C’est vraiment ma création la plus libre, là où je peux vraiment m’exprimer », nous glisse-telle en visio.

Les autres aspects de son parcours sont relégués à l’arrièrepla­n, histoire de laisser « parler » sa musique. Ses apparition­s en tant qu’actrice chez Bertrand Bonello, dans L’Apollonide et Saint Laurent, ou dans la série Netflix Mortel ? « Rien de spécial à dire. Des jobs, quoi. »

Guère plus à déclarer sur l’enfance tropézienn­e de l’artiste aux origines bretonnes. « Ma mémoire a pris un coup, il y a sans doute des trucs que j’ai oubliés. Dès l’adolescenc­e, je savais que je devais partir ailleurs, à Paris par exemple. »

Niveaux de lecture

Une fois lancée sur Sexy Planet, Bonnie Banane deviendra plus volubile. « C’est une photograph­ie sonore de ce que je peux donner maintenant. Pour y arriver, il a fallu que j’apprenne à accepter les imperfecti­ons. Elles donnent un côté plus réaliste. »

Une affaire d’intuitions, de premiers jets à ne pas trop dénaturer pour qu’ils conservent leur force. Tout en n’ayant pas la tentation de trop en faire. « J’aime quand c’est clair, quand les mots vont à l’essentiel. Quand j’ai commencé cet album, j’étais en période de deuil. Je le vois aussi comme un testament. Je ne veux pas laisser de superflu. »

Ce sens de l’épure la guide vers des contrées poétiques et l’emmène, presque par magie, à une évidence très pop, à l’image de La Lune et le Soleil. Comme d’autres, le titre possède plusieurs niveaux de lecture, histoire de « jongler entre premier et second degrés ».

Au gré des collaborat­ions, avec Flavien Berger, Myth Syzer ou encore Chassol, celle qui est passée par le Conservato­ire, où elle a travaillé le chant lyrique, a su trouver sa clique.

Dans son sillage, un joli bataillon de producteur­s prêts à imaginer des textures rondes, chaudes et parfois désarticul­ées. Sur Sexy Planet, Para One, Varnish La Piscine ou encore Loubenski ont mis la main à la pâte. « Avec eux, je me sens à l’aise. Parfois, on discute. Mais souvent, c’est évident, on a les mêmes références. »

Dans le magazine Le Point, interrogée sur ses intentions, elle avait résumé de cette formule : «Jeveux faire groover la France. » Sacrée ambition. « C’est vrai que c’est pas facile », nous glisse-t-elle, pleine de malice. « Ici, on ne sait pas vraiment bouger. Un peu comme dans ces fêtes de villages, où les gens essayent de danser en étant tout coincés ! »

Le fun et la forme

Bonnie Banane, un pseudo qu’elle avait choisi pour Facebook, apprécie les rythmes qui ondulent, les boucles obsédantes. « Dans la musique que j’apprécie, il y a un côté mantra. Tu vois, comme dans Freed from Desire, de Gala. C’est hyper fort. »

Avec son morceau d’eurodance sorti en 1996, l’Italienne avait conquis les clubs, avant de s’inviter dans les stades et les cortèges de manifs. Derrière le fun, il y avait aussi la forme. « La chanson parle de l’importance d’avoir des croyances fortes. C’est un hymne à la liberté, liberté de ne pas toujours en vouloir plus », expliquait Gala au magazine Trax en avril dernier. Chez Bonnie Banane, une ritournell­e entraînant­e comme Limites peut porter une lourde charge sur le consenteme­nt. Le morceau lui a été inspiré par une amie victime d’un viol. Sur Béguin, elle aborde le sujet sous un autre angle et chante : « Mais ça promet, continue comme ça / Tu m’excites quand tu me respectes. »

« Ben ouais ! Comment être plus claire que ça ? », sourit-elle derrière la caméra de son smartphone.

Sexy Planet. (Péché Mignon/Grand Musique Management).  titres.

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