Le talentueux Mister Dale
Depuis quelques numéros, les Annales monégasques s’attardent à des pans d’existence de la vie du prince Rainier III. Cette année, c’est à un conseiller du souverain dans les années soixante, Martin Dale, que Nathalie Ubeda Molines consacre un article. Ce jeune diplomate américain, ex-consul de son pays à Nice, est nommé à 28 ans, en 1960, conseiller privé du prince Rainier III pour l’économie. Sa feuille de route : accompagner le développement économique du pays. Ce jeune loup imagine alors faire de la Principauté un pôle financier international fiscalement intéressant et mobilise ses réseaux outre-Atlantique.
Il imagine un Palais des congrès parmi les plus vastes et modernes d’Europe pour 1966, un hôtel de luxe au Larvotto, approche Sheraton ou Pan American. L’ambition est aussi présente d’accueillir une grande industrie cinématographique sur le terrain plein de Fontvieille.
Si les Monégasques le surnomment avec ironie « le boy-scout », ce diplômé de Princeton impulse la création du Monaco Economic Development Corporation, qui propose de la documentation et aide à l’installation des entreprises sur le sol monégasque.
Une quinzaine d’entreprises américaines semblent intéressées. Une façon d’accomplir la volonté fixée par le souverain. Martin Dale avait été aussi choisi pour que la jeune princesse Grace, qui parle encore mal français, puisse côtoyer des compatriotes de sa génération. L’épouse de Martin Dale, Joan, devient proche, à cette époque, de la princesse.
Le parcours de Dale est vu d’un mauvais oeil de l’autre côté de la frontière. Il est accusé de favoriser les intérêts américains au détriment de la France. « C’est un peu celui par qui la crise franco-monégasque du début des années soixante est arrivée », détaille Thomas Fouilleron, « le général De Gaulle avait vu rouge que le prince Rainier III ait comme conseiller spécial un ancien diplomate américain ». Le président français refuse même d’être présenté au conseiller du prince lors de sa visite officielle en Principauté le 23 octobre 1960.
Finalement les intérêts franco-monégasques seront confortés. Après la signature de l’accord de 1964, Martin Dale accepte un poste pour développer le port de Freetown aux Bahamas. L’année suivante, le prince Rainier le nommera consul honoraire de Monaco aux Bahamas.