Monaco Info sur la voie de l’indépendance ?
C’est l’avis soulevé par plusieurs élus en séance publique au Conseil national qui plaident de dissocier le média de l’administration. Le ministre d’État a accepté d’examiner la question
La chaîne de télévision Monaco Info doit-elle gagner en indépendance ? Au moment de voter la ligne budgétaire dédiée à la direction de la Communication vendredi soir en séance publique d’étude du primitif 2021, la question est revenue au milieu de l’hémicycle.
Un sujet soulevé d’abord par JeanLouis Grinda, qui, félicitant «la réactivité » des équipes de Monaco Info pendant la période de confinement, s’est questionné sur la façon de faire évoluer cette «télévision d’État, qui en 2021 ne peut pas être l’ORTF de 1965 ». L’occasion pour l’élu d’Union Monégasque de se remémorer une volonté affichée il y a quelques années par l’ex-ministre d’État Serge Telle de faire évoluer le modèle de cette chaîne. Volonté restée sans acte. Le débat lancé, le président Stéphane Valeri l’a attrapé au vol. Lui aussi a félicité le travail des équipes de la chaîne nationale. « Nous avons eu le sentiment, au plus fort de la crise, que Monaco Info devenait une chaîne d’information pluraliste, équilibrée, avec des contrepoints intéressants, n’hésitant pas à poser des questions, pas toujours à faire des compliments. En faisant d’ailleurs sur ce point, si on est objectif, preuve de davantage de liberté lorsqu’il s’agissait de me challenger moi-même ou un élu dans les questions pertinentes, que les membres du gouvernement » soulignet-il, écho à quelques interviews musclées à l’antenne.
Mais pour le président Valeri, si la modernisation est à noter sur la forme, elle doit s’accompagner d’une restructuration de fond.
En finir avec des « journalistes fonctionnaires » ?
« Monaco Info est la chaîne de Monaco, elle fonctionne grâce aux crédits de l’État, votés par le Conseil national et utilisés par le gouvernement. En ce sens, cette chaîne ne saurait redevenir le canal de communication du seul gouvernement.
Il s’agit de la chaîne publique de l’État monégasque. Elle ne peut plus souffrir la dichotomie entre information et communication. Un pas en avant a été fait durant le confinement, il ne faut pas reculer désormais ».
Prenant lui aussi la métaphore de l’ORTF française, reformée par le président Giscard d’Estaing, il continue : « On a transformé en France il y a quelques décennies des journalistes fonctionnaires en journalistes non-fonctionnaires, par un organisme public où le gouvernement n’est pas le seul à donner des instructions. Si on veut une info pluraliste dans ce pays, ce qui me semble la moindre des choses, il faudra bien que vous entendiez un jour ce message. Si on veut être efficace, il faut être pluraliste, les téléspectateurs ne sont pas dupes. Si on veut qu’un journaliste se sente totalement indépendant et libre, il ne faut pas qu’il soit un employé du gouvernement, c’est tellement évident ».
« Il y a de l’objectivité dans les journaux télévisés »
La réforme envisagée par Serge Telle il y a quelques années n’a pas eu lieu. « Il avait annoncé qu’il ne fallait plus que la communication du gouvernement soit confondue avec l’information de Monaco Info. Puis il y a un recul à grands pas, un rétropédalage et rien n’a changé » regrette Stéphane Valeri. Le débat a fait réagir sur le siège l’actuel ministre d’État, qui s’est dit « sensible » aux interventions entendues par les élus de bords différents.
« Les journalistes ont beau être rémunérés par le gouvernement, il n’en demeure pas moins qu’ils ont une déontologie et une exigence d’objectivité pour être crédibles visà-vis de la population. Et je trouve qu’il y a de l’objectivité dans les journaux télévisés » répond Pierre Dartout.
« Cette télévision publique, qui a le souci d’impartialité en Principauté, ne peut pas être de même nature que dans les grandes nations, et il y a des adaptations qui sont nécessaires. Mais aussi la nécessité de faire passer un certain nombre de messages Et je suis prêt à examiner avec vous un certain nombre d’évolutions qui pourraient être faites ».
Une réponse saluée par les élus qui espèrent sa concrétisation en actes.