Monaco-Matin

En Thérapie,

Adaptation de la série israélienn­e Betipul, En Thérapie va s’appuyer sur les attentats de novembre 2015 pour raconter la société française. Un projet très ambitieux signé Arte, confié au duo Olivier Nakache-Eric Toledano et dont la diffusion débutera le 4

- MATHIEU FAURE mfaure@nicematin.fr

On se souvient tous où l’on se situait au soir du 13 novembre 2015. 137 morts et un traumatism­e immense. Cette vague d’attentats sera au coeur de la prochaine création originale d’Arte qui sera diffusée durant sept jeudis à partir du premier jeudi de février 2021 (1).

Sous quelle forme ? C’est là que le projet, immense, est singulier avec trente-cinq épisodes de 26 minutes chacun qui composent En Thérapie, l’adaptation française de la série israélienn­e Betipul.

Une adaptation recontextu­alisée au lendemain des attentats de Paris en 2015 à travers les séances hebdomadai­res de cinq patients dans un cabinet avec un psychologu­e, psychanaly­ste et psychothér­apeute joué par Frédéric Pierrot (Polisse, Jeune et jolie).

Derrière ce projet pharaoniqu­e, un duo bien connu mais qui débute dans l’univers de la série : Eric Toledano et Olivier Nakache les réalisateu­rs de Nos jours heureux, Intouchabl­es, Le sens de la fête et Hors Normes.

Le binôme s’est associé avec plusieurs réalisateu­rs (Mathieu Vadepied, Pierre Salvadori et Nicolas Pariser) pour cette adaptation très excitante, portée par un casting hors norme : Frédéric Pierrot donc mais aussi Carole Bouquet, Mélanie Thierry, Reda Kateb, Clémence Poésy, Pio Marmaï et Céleste Brunnquell.

Une vraie fierté pour la chaîne franco-allemande et notamment pour le président d’Arte France

Bruno Patino : « C’est un événement, un dispositif important. C’est une oeuvre qui a une résonance au-delà de ce que cela représente par rapport à l’époque que nous vivons ».

Pourtant, il a fallu convaincre la chaîne de se lancer dans la production d’une telle série. «On est venu nous proposer un monstre, se souvient en riant Olivier Wotling, le directeur de la fiction d’Arte France. Au début, on a commencé par en avoir peur et puis quand on a saisi le point de vue d’Olivier et Eric, on a dit banco ».

Dire sans montrer

Justement, comment le duo s’estil approprié la bête ? « Cela fait un moment que l’on a l’idée de faire une série dans nos têtes. C’est la période que l’on vit qui nous a donné envie d’avancer, explique Eric Toledano.

« Il y a une vraie cacophonie aujourd’hui, beaucoup de gens parlent mais peu écoutent. On voulait raconter comment un événement extérieur a fait remonter des traumatism­es internes. On s’est situé au lendemain du 13 novembre pour montrer que collective­ment on avait besoin de ce dialogue autour de cette période. On a voulu comprendre la société française à travers un cabinet. C’est une série sur la parole et l’écoute. Ça prend encore plus de sens en temps de Covid. Le jeu s’est retrouvé au centre de la série ». Pour son compère Olivier Nakache, il s’agissait surtout « d’un défi formel. On s’est concentré uniquement sur les acteurs et leurs joutes verbales. Il faut capter les maux de notre société, c’était fascinant et captivant de mettre une caméra à cet endroit. Pour se lancer dans l’univers de la série, il nous fallait quelque chose de différent. Dire sans montrer. Ça nous faisait peur mais c’est sain d’avoir peur avant de se lancer ».

Avant de faire le grand saut il a surtout fallu convaincre une chaîne française d’adapter la série originale d’Hagai Levi dont l’oeuvre avait été adaptée dans différents pays et notamment aux USA avec En analyse produit par HBO avec Gabriel Byrne.

Comme au théâtre

Pour les productric­es Yaël Fogiel et Laetitia Gonzales, « le défit était de tourner des 26 minutes en deux jours, c’était un objectif excitant. Soixante-dix jours de tournage pour faire trente-cinq épisodes, c’est une première pour tout le monde et ça pouvait faire peur à des chaînes.

On avait un lien de confiance avec Arte et la chaîne a été le plus rapide à nous répondre. Aucune chaîne française n’avait encore adapté un tel format, de trente-cinq épisodes. Le créateur nous a laissé les mains libres. Grosso modo : prenez-la et faites en ce que vous voulez ».

« Seuls deux pays en Europe n’avaient pas adapté la série originale, c’était la France et l’Allemagne. C’est donc paradoxal que ce soit une chaîne franco-allemande qui se lance dedans,

poursuit Olivier Wotling. C’est une série qui est un miroir de notre société ».

L’autre gros morceau concernait le casting qu’il fallait articuler autour de Frédéric Pierrot. Surtout dans une position aussi fragile que celles de patients traumatisé­s. « J’étais fan de la série américaine, il y a un vrai travail sur le texte et les auteurs, justifie Reda Kateb qui joue un policier de la BRI logiquemen­t traumatisé. C’est un challenge de tenir sur la distance. Il y a quelque chose qui se rapproche du théâtre. C’est un magnifique cadeau pour un acteur de pouvoir participer à une telle série ».

Même son de cloche chez Pio Marmaï pour qui « ce n’était pas évident ni facile à jouer car je suis une pile dans la vie et là il fallait être assis (rires). Il y avait parfois de la résonance avec nos vies personnell­es ».

De son côté, Carole Bouquet y voit une représenta­tion plus actuelle. « Ça résonne en ce moment car il y a une présence physique de l’un et de l’autre. Eric et Olivier ont une manière particuliè­re de saisir la distance dont on parle constammen­t dans la série. Cette privation de l’autre fait remonter beaucoup de fragilité et d’inquiétude en chacun de nous. La Covid rend la série encore plus pertinente. La solitude et la violence de la société sont montrées par la série ».

Et Frédéric Pierrot dans tout ça, lui qui est la pierre angulaire de la série ? « C’est un projet passionnan­t, un travail sur la parole, le langage et la simplicité de la présence physique. C’est un défi majeur ».

Un projet dense, passionnan­t mais surtout un vrai défi que même des habitués du succès comme Toledano et Nakache regardent avec beaucoup d’humilité. « Je conseille aux gens de ne pas s’envoyer les trente-cinq épisodes d’un coup, on a besoin de digérer une séance avant d’en faire

‘‘ Il y a une vraie cacophonie aujourd’hui, beaucoup de gens parlent, peu écoutent...”

‘‘ C’est une série sur la parole et l’écoute. Ça prend encore plus de sens en ce moment”

une autre », conclut en riant Olivier Nakache. Première séance cathodique à partir du 4 février 2021. D’ici là, prenez soin de vous. 1. La série sera disponible en intégralit­é sur arte.tv le 28 janvier.

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