Monaco-Matin

 : le Niçois Raiberti nommé ministre de la guerre

Cette nomination, si importante dans la période de l’après-guerre, est saluée avec fierté par notre région.

- ANDRÉ PEYREGNE magazine@nicematin.fr

Le 17 décembre 1920 – il y a cent ans – L’Éclaireur de Nice annonce triomphale­ment à sa une : « M. Raiberti est nommé ministre de la guerre ». L’honneur, pour notre région, d’avoir un Niçois nommé à la tête de l’un des ministères les plus importants au lendemain du premier conflit mondial !

Depuis le 23 septembre, la France est sous la présidence d’Alexandre Millerand. Le premier ministre (appelé à l’époque président du conseil) est Georges Leygues.

Flaminius Raiberti, 58 ans, député et président du Conseil général des Alpes-Maritimes, doit son arrivée à ce poste ministérie­l à la démission inattendue du précédent ministre André Lefèvre. Celui-ci est parti à la suite du refus du gouverneme­nt de le soutenir dans sa politique de fermeté vis-à-vis des Allemands qui tardaient à rembourser les dommages de guerre. Cela était pourtant prévu par le Traité de Versailles de 1919. Raiberti avait, pour sa part, une attitude plus conciliant­e vis-à-vis des anciens ennemis.

Joie patriotiqu­e

L’Éclaireur de Nice exulte : « C’est avec une grande et patriotiqu­e joie que nous saluons l’entrée au Ministère de la guerre de cet homme éminent… Nul mieux que lui n’était désigné pour occuper ces fonctions ministérie­lles. » Hélas, l’euphorie du premier jour va rapidement diminuer. L’opposition va taxer le gouverneme­nt de faiblesse vis-à-vis de l’Allemagne. Le débat s’envenime. Pour les uns, il faut être ferme, pour les autres, il faut être réaliste : l’Allemagne n’arrivera jamais à rembourser l’immensité des dommages de guerre.

Certains considèren­t que la défaite n’est pas actée par la population allemande qui n’a pas vu les troupes françaises pénétrer sur son territoire. Doiton rappeler qu’en 1918, Foch s’était vu refuser par Clemenceau le droit pour les troupes françaises d’aller défiler à Berlin ? Les Allemands n’acceptent pas l’article 231 du Traité de Versailles, appelé par eux « Traité de la honte » (« Schandvert­rag ») qui rend l’Allemagne responsabl­e du déclenchem­ent de la guerre.

Les fêtes de la fin de l’année 1920 apaisent les querelles politiques mais dès le début de 1921, le débat reprend. Le ministre de la guerre est au premier rang des critiques. Le gouverneme­nt chancelle.

Le 7 janvier 1921, L’Éclaireur affirme à sa une : « Monsieur Leygues ne démissionn­era pas et conservera ses ministres. »

Gouverneme­nt renversé

C’était s’avancer bien vite ! Cinq jours plus tard, le 12 janvier, le gouverneme­nt est renversé par la Chambre des députés. Le mandat ministérie­l de Flaminius Raiberti n’aura duré que trois semaines ! Le 15 janvier, Raiberti faisait savoir « qu’en raison des circonstan­ces, il ne serait pas présent à l’inaugurati­on du monument de Galliéni à laquelle il devait assister à Saint Raphaël dans le Var ».

Le 16 janvier, le président de la République Alexandre Millerand nomme Aristide Briand à la présidence du Conseil (premier ministre). Celui-ci est un habitué de la fonction : il l’occupe pour la… onzième fois ! Un nouveau ministre de la guerre est nommé : Louis Barthou. L’Éclaireur de Nice, qui avait tant soutenu Raiberti, se remet difficilem­ent de son départ. Le 23 janvier, Dominique Durandy signe un éditorial intitulé La catastroph­e : « La vie ministérie­lle de M. Raiberti a été déplorable­ment courte, au grand déplaisir des bons citoyens qui se réjouissai­ent de voir en place un homme plein de talent doublé d’un patriote éclairé. Quant au départemen­t des Alpes-Maritimes, qui avait largement pavoisé en l’honneur du nouveau ministre, il est humilié et morose… M. Barthou qui lui a soufflé sa place, est certes un homme distingué, académicie­n et bibliophil­e de grande qualité. Il a éloquemmen­t écrit sur Victor Hugo, Mirabeau et Lamartine. Ce littérateu­r distingué s’est aimablemen­t substitué à M. Raiberti. Les hommes politiques ont de grandes prédilecti­ons pour les sujets qui ne semblent pas de leur compétence... »

Bonjour l’ambiance ! M. Barthou fera un plus long séjour que M. Raiberti au ministère de la guerre. Débarqué au bout de onze mois, il ne terminera pas l’année !

‘‘ Le  janvier, le gouverneme­nt est renversé. Le ministère de Raiberti n’aura duré que trois semaines !”

La réparation des dommages de guerre, qui a entraîné la chute du gouverneme­nt auquel Flaminius Raiberti participai­t, donnera lieu en  à la conférence internatio­nale de Cannes. Celle-ci réunira, du  au  janvier , les pays vainqueurs de la Première Guerre mondiale. Les discussion­s seront serrées entre le président du Conseil Aristide Briand et le premier ministre anglais Lloyd George. Aristide Briand finira par accepter un allègement des réparation­s allemandes en contrepart­ie de garanties britanniqu­es en cas d’agression de la France.

Cela ne plut pas au président de la République Alexandre Millerand qui désavoua Aristide Briand. Le  janvier , Briand quitta Cannes. La conférence de Cannes tourna court. Décidément le remboursem­ent des dommages de guerre par les Allemands était un problème inextricab­le. L’événement cannois fut suivi par de nombreux journalist­es internatio­naux dont le directeur du journal italien Popolo d’Italia, Benito Mussolini.

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 ?? (Photos DR) ?? . Flaminius Raiberti, député des Alpes-Maritimes, président du Conseil général et momentaném­ent ministre. Au-dessus, les armoiries familiales.
. L’annonce de la nomination de Raiberti par L’Éclaireur de Nice.
. Aristide Briand lors de la conférence de  à Cannes.
(Photos DR) . Flaminius Raiberti, député des Alpes-Maritimes, président du Conseil général et momentaném­ent ministre. Au-dessus, les armoiries familiales. . L’annonce de la nomination de Raiberti par L’Éclaireur de Nice. . Aristide Briand lors de la conférence de  à Cannes.
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