Monaco-Matin

Dutton et son passé fantasmé de héros

- CH. P.

Au milieu d’un choeur de douze présumés innocents, qui expliquent l’un après l’autre qu’ils sont injustemen­t accusés, une voix dissonante se fait entendre. Les mots sont en anglais. Philip Dutton répond avec la concision et la rigueur de l’ancien militaire qu’il fut. Il est accusé d'avoir tenté d'enlever Mme Veyrac en 2013 et d'avoir organisé le rapt réussi de 2016. Il est présenté comme « le chef opérationn­el ». «A aucun moment je n'ai nié ma culpabilit­é », rappelle-t-il, d'emblée.

En situation très précaire à Jersey, il y fait la connaissan­ce d'Enrico Fontanella, hébergé comme lui par la Sanctuary Trust, une associatio­n caritative. Il réparait le plancher d’une église quand Fontanella, ami d'enfance de Giuseppe Serena, parle « d'une possibilit­é de faire de l'argent. »

Il se présente à Nice en espérant, dit-il, trouver du travail.

« Qui vous a donné l'idée de commettre ces faits ? », demande le président Veron.

« Mister Serena », répond l'accusé du tac au tac.

Devant l’enquêteur de personnali­té, Dutton n’a pas la même franchise. Il a manifestem­ent enjolivé son passé d’ancien soldat britanniqu­e.

Un casier judiciaire anglais très chargé

Il s’est inventé des missions au Koweit, en Bosnie, en Afghanista­n, s’est attardé sur son intégratio­n dans les Forces spéciales, la perte de deux camarades à Bagdad et lui gravement blessé... L’enquêteur de personnali­té a tout noté scrupuleus­ement...

Le président Véron intervient et rappelle aux jurés que la carrière militaire de M. Dutton s’est limitée à trois années sans jamais aucune mission à l’étranger.

Ce qu’admet l’accusé sans difficulté. Autre précision fâcheuse : son casier judiciaire anglais apparaît très chargé. Il a notamment été condamné à huit ans de prison pour viol et plusieurs fois pour des vols avec effraction. « Un passé beaucoup moins glorieux », constate le président Veron.

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