Monaco-Matin

Muriel Mestre alchimiste de la paille

À Coursegoul­es, la marqueteus­e transforme les tiges de seigle en objets et tableaux qui accrochent la lumière.

- AURORE HARROUIS aharrouis@nicematin.fr

Avec les choses les plus simples et deux mains agiles, on peut faire des merveilles. Prenons la paille. Pourvue de grains, elle est le fondement de l’alimentati­on humaine. Dans les étables, on y couche les bovins. Ligaturée, elle parsème les champs de ses bottes blondes. Voilà pour l’aspect nourricier et pratique. « Très tôt, dès le XVIIe siècle, la paille de seigle a également séduit l’artisanat d’art. On se l’est appropriée pour de la marqueteri­e, une discipline bien établie pour le bois, qui trouvait alors un débouché moins onéreux », retrace Muriel Mestre. Au rez-de-chaussée de sa maison, dans le village enneigé de Coursegoul­es, son atelier est réchauffé par une flambée de la cheminée toute proche.

Comme un vernis

Un Cavalier King Charles et un chat tigré viennent poliment flairer les invités. De toutes autres bestioles peuplent encore les lieux. Derrière les bottes de paille colorées, un magnifique tigre, rugissant, dans les tons de bleus, un renne. Entièremen­t façonnés en marqueteri­e. Et un cheval. « Petite folie » qui a demandé à Muriel une cinquantai­ne d’heures de travail, d’enrobés, d’incrustati­ons, de courbes. Alors que la marqueteri­e s’attelle plutôt à représente­r les lignes droites. Mais quand on aime...

Muriel est tombée sur la paille très récemment « grâce à un reportage à la télévision sur Lison de Caunes, la papesse de la marqueteri­e de paille, qui remet au goût du jour cet art qui était tombé en désuétude. » C’était en 2018. Elle commande les tiges de seigle (lire ci-dessous). Une matière dont la particular­ité est de présenter d’étonnants reflets, dus à la silice présente dans le sol, que la céréale absorbe en poussant et qui agit comme un vernis, la rendant robuste. Muriel déniche encore un livre pour se former. Elle se lance. «Çaaétéun coup de foudre. Je ne pensais pas aimer une matière autant que le tissu. »

Car avant ça, Muriel Mestre s’illustrait dans le métier de tapissier décorateur. Formée à l’école Boulle, elle a eu des ateliers à Saint-Paul et à Cagnes-sur-Mer. Des centaines de fauteuils à parer de cuirs fous, de tissus chamarrés. De la bouclerie, des clous et des galons pour s’amuser. « À force de porter des choses et d’être courbée, mon dos a fini par dire “stop” »

« Les mains savent comment faire »

Il fallait néanmoins continuer, faire quelque chose de cet élan créatif. Ce sera les sacs à main avec les chutes des tissus de tapisserie. Puis la marqueteri­e. « Lors de mon apprentiss­age, j’ai touché à beaucoup de métiers artisanaux, alors j’ai l’impression que mes mains savent vite comment faire. »

Avec précision et dextérité, elles s’exécutent. Fendent dans la longueur les brins de paille, aplatissen­t afin de former des bandes. Muriel découpe alors les formes et les colle sur le support désiré. Papier, bois, verre. L’inspiratio­n ne semble jamais s’arrêter. « L’aspect trop géométriqu­e ou art déco, c’est un peu vu et revu... Alors, ce n’est pas trop mon kif. » Elle rêve d’une série africaine, inspirée par les tissus wax. D’écritures asiatiques. De bijoux. En paille, à l’infini.

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Un matériau coup de foudre ”

Rens. murielmest­re@yahoo.fr ou 06.13.08.73.41. Muriel propose des initiation­s à son domicile sur RDV.

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