Monaco-Matin

« Un saut dans l’inconnu »

Dans la catégorie reine, cette semaine, il y aura deux Français : Ogier et lui. À 23 ans, le Corse Pierre-Louis Loubet découvre le « Monté » au volant d’une Hyundai i20 WRC. Défi ardu !

- PROPOS RECUEILLIS PAR GIL LÉON Pierre-Louis Loubet

Pour localiser la précédente présence de ce patronyme ô combien évocateur des années  et  sur la liste des engagés du Rallye Monte-Carlo, il faut faire une longue marche arrière. Jusqu’au siècle dernier ! En , Yves Loubet vit là son ultime chasse au chrono en championna­t du monde dans le baquet d’une Mitsubishi Carisma groupe N. Son fils, Pierre-Louis, n’a roulé qu’en poussette, lui. Il va bientôt souffler sa deuxième bougie. Et il reprendra le flambeau familial beaucoup plus tard, en . Bon sang ne saurait mentir : le digne héritier gravit les échelons. Avec succès. Pour preuve, cette couronne WRC coiffée en  dans l’antichambr­e de la catégorie reine. Le palier supérieur est atteint la saison passée. Adieu Skoda Fabia R, bonjour Hyundai i WRC. Une exploratio­n du top niveau écourtée par la crise sanitaire. Qu’à cela ne tienne ! Demain, à Gap, « Pilouis » entamera sa première campagne complète dans le sillage des cadors, Ogier, Tänak, Neuville, Evans et compagnie. Si la trajectoir­e de l’enfant terrible de Porto-Vecchio totalise déjà  expérience­s en Mondial, du Portugal à la Finlande via la Turquie, la Catalogne, le Pays de Galles, la Sardaigne, sans oublier son Tour de Corse chéri, elle n’a jamais sillonné les épreuves spéciales du monument monégasque. Interview en  minutes chrono avant cet imminent baptême du feu truffé de pièges de glace...

Pierre-Louis, réussir à monter un programme complet en Mondial au volant d’une i WRC, dans le contexte actuel, on peut dire que c’est un exploit, non ?

Je suis vraiment très content d’avoir une telle opportunit­é. Les portes se sont ouvertes grâce à des partenaire­s solides : Hyundai Motorsport, qui m’a intégré dans son Junior Driver Program l’an dernier, et la société All Exclusive Car, qui m’aide énormément depuis longtemps. Entre autres...

En , comment s’est déroulé votre apprentiss­age au sein de la catégorie reine ?

J’ai disputé cinq courses, dont trois manches du championna­t du monde. Sur l’asphalte, le feeling fut assez bon d’entrée. Sur la terre, en revanche, il y a encore quelques paramètres à peaufiner. La voiture me plaît beaucoup, mais une WRC ne s’apprivoise pas aussi vite qu’une R. Aujourd’hui, franchemen­t, je pense que nous avons toutes les cartes en main pour continuer notre progressio­n et monter en puissance.

Lors du premier roulage, quelle est la différence qui vous a sauté aux yeux ?

En fait, tout est plus performant, plus

homogène. Le châssis, le moteur... La WRC, je dirais qu’il s’agit d’une vraie voiture de « racer ». Au début, on a l’impression d’exploiter une voiture de circuit. Il y a un tel confort de pilotage. Chaque détail est optimisé.

Qu’aimeriez-vous améliorer en priorité ?

Mon expérience ! Au top niveau, tous les gars, ou presque, roulent leur bosse depuis des lustres. Certains depuis plus de dix ans.

Il n’y a pas de secret. Pour essayer de les challenger le plus tôt possible, j’ai d’abord besoin d’engranger un maximum de kilomètres sur toutes les surfaces.

Vous entamez cette semaine votre septième saison et vous n’avez jamais disputé MonteCarlo jusque-là. Comment est-ce possible ?

Mieux vaut tard que jamais. J’aurais préféré faire connaissan­ce plus tôt, croyez-moi. D’habitude, cette période de l’année est synonyme de prospectio­n. On cherche des budgets. La feuille de route, elle n’arrive qu’à la fin de l’hiver. Voilà pourquoi je compte seulement deux participat­ions au MonteCarlo en spectateur pour l’instant. Bon, la roue a fini par tourner. Découvrir cette épreuve à bord d’une WRC, c’est un sacré défi. Ça me plaît. J’ai hâte de démarrer.

Êtes-vous satisfait du travail accompli durant vos deux jours d’essais ?

On a pu prendre nos repères sur asphalte, puis sur une route totalement enneigée où je me suis régalé. Bonnes sensations de part et d’autre. Mais ce n’était que des tests. La course, ce sera une autre histoire. Un saut dans l’inconnu. À nous de savoir tirer notre épingle du jeu.

Une course réussie, cette semaine, à quoi ça pourrait ressembler ?

Difficile de fixer un objectif précis. Pour moi, peut-être que le premier virage de l’année sera le plus délicat à négocier. Déjà, tâchons d’aller au bout. Il faudra rouler intelligem­ment. Accepter de ne pas être dans le coup ici ou là.

Le prix à payer pour apprendre.

Si vous aviez le choix, vous opteriez pour quel type de terrain ?

Je préférerai­s un terrain uniforme :  % sec ou  % glisse. Mais je sais que l’on devra composer avec des conditions mixtes. Apparemmen­t, le menu comprend pas mal de neige. Tant mieux !

Votre ambition en  ?

Apprendre le plus vite possible. Raccourcir ma marge de progressio­n. Et pourquoi pas faire fructifier les acquis en réussissan­t de belles choses là où je possède déjà des repères. Tous les éléments sont réunis. L’écurie C Compétitio­n connaît la chanson. Pareil pour Vincent (Landais), mon copilote. Alors le pilote doit se mettre au diapason. Pas le choix...

Si vous pouviez acquérir la principale qualité de chacun des trois pilotes officiels Hyundai en lice cette semaine...

Aucune hésitation. Je prendrai la pointe de vitesse de Neuville, la régularité de Tänak et la longévité de Sordo. De quoi faire un sacré bond en avant.

Quelle est la principale similitude entre Yves et Pierre-Louis Loubet ? Qu’avez-vous hérité de votre père ?

La passion du sport automobile, bien sûr. J’aime le sport en général. J’ai adoré le golf, le tennis, la moto. Mais le volant, c’est autre chose. A  ou  ans, je faisais des dérapages dans le jardin avec une ancienne Renault Express de la Poste qu’on nous avait donnés. Ce qui me plaisait au début, c’était surtout le pilotage. Je ne pensais pas à la compétitio­n. Jusqu’au jour où il m’a emmené sur un circuit de karting...

Et la principale différence ?

Moi, je suis calme. Plus calme. Lui, il a un fort tempéramen­t. Il est plus nerveux. Il monte vite en zone rouge, quoi !

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Le menu comprend pas mal de neige. Tant mieux ! ”

Depuis l’annonce de votre programme, le calendrier  du WRC a été modifié. Est-ce que vous disputerez les deux nouvelles manches ?

Oui puisqu’il s’agit de remplaceme­nts (la Belgique - Ypres - supplée l’Irlande et l’Arctic Rally de Finlande est promu à la place de la Suède). Comme prévu, il y aura onze manches, dont celles-ci. Perso, j’ai hâte de revoir l’Arctic (déjà deux participat­ions au compteur en  et ). Là-haut, près du cercle polaire, il y a une ambiance de fou et on évolue sur un terrain de jeu idéal. La neige et la glace sont garanties. Comme cette semaine autour de Gap.

Né le 18 février 1997 à Bastia. 23 ans

1er départ : Rallye LyonCharbo­nnières 2015 (Citroën DS3 R3) Champion du monde WRC2 en 2019 avec 2 victoires (Skoda Fabia R5) 7e du Rallye de Sardaigne 2020 (Hyundai i20 WRC)

 ?? (Photos Jo Lillini) ?? Pierre-Louis Loubet : « Durant nos deux séances d’essais, on a pu prendre des repères. Bonnes sensations ! Mais la course, ce sera une autre histoire... »
(Photos Jo Lillini) Pierre-Louis Loubet : « Durant nos deux séances d’essais, on a pu prendre des repères. Bonnes sensations ! Mais la course, ce sera une autre histoire... »
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