« Il était une fois... des spectateurs » à Grasse !
Le photographe de plateau Jean-Louis Paris innove en recréant, via d’innombrables clichés d’un même modèle, une salle de théâtre illusoirement remplie...de personnages de cinéma
Oui, les écrans sont noirs. Les scènes désertées. Et les rangées de fauteuils d’orchestre vides. Mais si le bonheur collectif d’une salle remplie de spectateurs enthousiastes devenait un fantasme artistique ? Celui du photographe de plateau Jean-Louis Paris. « On n’arrive pas à travailler. Alors autant créer... Je suis tombé récemment sur les réseaux sociaux sur une vidéo humoristique consacrée au « musée des restaurants ». J’ai eu l’idée d’un projet sur le thème : il était une fois...les spectateurs », explique l’artiste roquefortois, intermittent depuis trente ans.
Chaplin et Marilyn
En pied de nez à la pandémie qui a vidé les salles, le photographe de 58 ans lutte donc à sa manière. Son arme d’illusion massive, c’est son Nikon. Son projet aussi esthétique que décalé : recomposer, tableau après tableau, une foule fictive. Mais pas banale. Puisque le show s’est évanoui du grand écran, c’est le fabuleux, l’onirique, voire l’iconique qui s’invite dans le rouge cinéma des sièges du Théâtre de Grasse. Chiche ?
La costumière Florence Lesecq est venue avec ses trésors de dentelles, tulles, plumes et autre soieries d’époque. Soit une trentaine de panoplies les plus hétéroclites. «On a soif de faire quelque chose. Le projet m’a emballé tout de suite », glisse l’intermittente en ajustant la robe de starlette cubaine sur l’épaule de Melissa Loureiro, 31 ans. Passionnée de 7e art, cette jeune comédienne et modèle photo glisse sa silhouette gracile dans la peau de Chaplin, Marie-Antoinette, Marilyn, ou du Fantôme de l’Opéra. Mais joue aussi, sous le projecteur, la mariée déprimée effondrée dans la travée. La femme enceinte prostrée. Ou l’infirmière dévouée.
Distanciation
« C’est amusant de rentrer dans tous ces personnages ! ». Car pour chacun, un siège numéroté précis dans la salle aux 200 fauteuils. « Pas de soucis, sur le photomontage, il y aura aussi de la distanciation sociale », plaisante Jean-Louis Paris, en mitraillant. Clic clic clic. À chaque cliché, une posture éloquente. Une émotion différente. Après un choix parmi les 1500 clichés, le puzzle de ce montage loufoque s’affichera au Théâtre de Grasse. Miroir merveilleux du public, réalité devenue mythe dans la crise sanitaire...