Monaco-Matin

Un tsunami, tout mini-mini, a bien touché la Côte d’Azur

Provoqué par le séisme algérien, il n’était plus qu’une minuscule vaguelette sans conséquenc­es en arrivant sur nos côtes. La menace, en Méditerran­ée, est pourtant bien réelle.

- GRÉGORY LECLERC gleclerc@nicematin.fr

Les faits

Un séisme de magnitude 6 sur l’échelle de Richter a frappé le nord de l’Algérie, près de Bejaia, à quelque 700 kilomètres de nos côtes, en début de nuit ce jeudi.

Il n’a pas fait de victimes mais a suscité un mouvement de panique dans la population. Deux secousses ont, au même moment, fait trembler la Côte d’Azur. La première, de magnitude 3,2 sur l’échelle de Richter, a été relevée par les capteurs du Bureau national de sismologie français à 1 h 12, non loin de Cagnes-sur-Mer. La seconde à 1 h 18, vers Grasse. Ces séismes ont bien été enregistré­s, mais n’ont pas été confirmés, indique Étienne Bertrand, chef du service Risque sismique au laboratoir­e de Nice.

Les appareils se sont en quelque sorte affolés, mais c’est bien le même événement. «Il n’y a pas eu de séisme sur la Côte d’Azur », souligne-t-il. Les habitants des Alpes-Maritimes ont cependant ressenti l’onde de choc et en ont témoigné.

L’alerte tsunami déclenchée

Nous avons contacté le Centre d’alerte aux tsunamis (Cenalt), basé dans une enceinte militaire à Saclay, en région parisienne. Dans la nuit, vers 1 h 04, un opérateur, d’astreinte 24h / 24, a immédiatem­ent repéré le séisme algérien. Il s’est produit dans une zone qui comporte un faisceau de failles très actives. «Ila d’abord été classé en dessous de 6, puis très rapidement relevé à 6 », explique Hélène Hebert, experte tsunami au Cenalt.

« L’opérateur a un quart d’heure, dans ces cas-là, pour envoyer un message à tous les services concernés, mais aussi à nos homologues étrangers. »

L’alerte tsunami « orange » a été déclenchée pour les côtes algérienne­s. Ce n’est que la deuxième fois depuis 1980 qu’elle est activée. Au cours du XXe siècle, selon un rapport sénatorial, une centaine de tsunamis ont été enregistré­s en Méditerran­ée, soit 10 % des tsunamis mondiaux. Cette nuit, le niveau d’alerte tsunami était jaune pour les côtes françaises, donc sans danger particulie­r. La catégorie ultime, jamais déclenchée depuis le début des mesures est le rouge.

Le séisme est bien arrivé sur nos côtes

Selon l’experte tsunami du Celnat, l’alerte a été levée vers 3 h 20 du matin. Pour autant, même si le tsunami n’a pas été dangereux, il a bien eu lieu. Il a été observé en Sardaigne et est venu mourir sur nos côtes : une vaguelette de un à deux centimètre­s y a été enregistré­e. « Nous sommes encore en train de l’analyser, pour mieux l’estimer », explique Hélène Hebert. Dans les tsunamis, ce n’est d’ailleurs pas tant la taille de la vague qui compte, que la masse d’eau, colossale, déplacée d’un coup. Elle peut provoquer des courants, ou des phénomènes de siphons.

Nos côtes peuvent-elles un jour subir des dégâts ? La Côte d’Azur s’y prépare, comme à Cannes ou à Nice. « Elle en a connu notamment en 1887, lors du séisme qui a frappé la Ligurie et les AlpesMarit­imes. » Le long des côtes françaises, la mer s’y était tout d’abord retirée à de nombreux endroits et des variations de hauteur d’eau de deux mètres avaient été observées à Cannes et Antibes. Même phénomène en 2003 avec le séisme de Boumerdès en Algérie. Une vague de 0,5 mètre à 1,5 mètre avait touché Cannes et Antibes. On se souvient également de la catastroph­e de l’aéroport de Nice. Une vague provoquée par un glissement de terrain sur le chantier aéroportua­ire avait fait plusieurs morts en 1979. Un peu plus loin, en 1908 en Italie, un séisme de 30 secondes avait provoqué un tsunami qui avait détruit les villes de Messine, Reggio de Calabre et Palmi. La catastroph­e a fait de 75 000 à 200 000 morts selon les estimation­s.

■Serons-nous prévenus à temps ?

C’est tout l’enjeu de la veille permanente assurée par le Centre d’alerte aux tsunamis. « Tout dépend de la localisati­on, explique Hélène Hébert. S’il se produit en Algérie, on peut compter une heure de délai. Dans le cas d’un séisme en Ligurie ou face à nos côtes, le temps d’alerte est très restreint. » Quelle taille de vague peut-on redouter ? Là encore, la magnitude et la distance jouent un rôle. Si, dans le cas du scénario le plus catastroph­ique et fort peu probable, on évoque des vagues jusqu’à trois mètres, il y a beaucoup plus à redouter, selon l’experte tsunami, d’événements de cinquante centimètre­s à un mètre. Avec l’urbanisati­on, et la population qui peut se trouver sur les plages à ce moment-là, des dizaines de milliers de personnes pourraient alors être impactées.

 ?? (Photo DR) ?? C’est d’ici, au Centre d’alerte aux tsunamis de Saclay en région parisienne, que le message est parti. Le tsunami a été surveillé par l’opérateur de permanence.
(Photo DR) C’est d’ici, au Centre d’alerte aux tsunamis de Saclay en région parisienne, que le message est parti. Le tsunami a été surveillé par l’opérateur de permanence.

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