Monaco-Matin

Tué par balle à Rocbaron : le procès de l’imprudence

En 2016, Lucas B., 17 ans, avait accidentel­lement tué par balle son ami Mattéo, 15 ans. Son père lui avait laissé les clés du coffre des armes.

- V. W.

Un drame de l’inconscien­ce. De la bêtise. Celle de Lucas B., 17 ans à l’époque, alors tireur sportif émérite et qui, dans la soirée du 10 avril 2016, en l’absence de son père du domicile familial de Rocbaron, « fanfaronna­it » devant ses copains, Glock 9 mm à la main. Visant l’un, l’autre. Jusqu’au moment où le coup, fatal pour Mattéo F., partait. Fauchant une vie d’à peine 15 ans.

Un drame de l’irresponsa­bilité aussi. De l’inconséque­nce. Celle de Didier B., père de Lucas, et qui était renvoyé ces derniers jours devant le tribunal correction­nel de Draguignan pour « homicide involontai­re par violation manifeste d’une obligation de sécurité ou de prudence ».

« Je lui faisais confiance… »

Pour les parties civiles, c’est lui qui « a armé le bras de Lucas », en lui laissant à dispositio­n les clés du coffre-fort où étaient stockées les armes et les munitions. Notamment celles utilisées pour la pratique du tir sportif, mais aussi ce fameux Glock, offert à Lucas en 2014 après son titre de champion de France.

« Je lui faisais confiance, répète sans cesse le prévenu. C’était une erreur. Je lui avais laissé un jeu de clés pour qu’il puisse manipuler l’arme en mon absence, la nettoyer… » Didier B., peut-être aveuglé par la réussite sportive de son fils, ne voyait-il pas qu’en agissant ainsi il violait les règles les plus élémentair­es de sécurité ? « Votre fils n’avait que 17 ans », rappelle pour sa part la présidente MarieJosé Coureau-Vergnolle. « Il n’avait pas le droit de les sortir quand ses copains étaient là… », plaide le père. Pourtant, les amis de Lucas ont affirmé voir régulièrem­ent des armes traîner dans la villa. L’adolescent avouera même aux gendarmes qu’il prenait son Glock « comme on sort son portable ».

Des zones d’ombre

La douleur de la famille F. est également alimentée par l’incompréhe­nsion. Par ces zones d’ombre que jamais sans doute la lumière judiciaire ne viendra éclairer. Après le drame qui a eu lieu à 21 h 30, Lucas prévient son père, alors chez un ami à Camps-la-Source.

Mais au lieu de prévenir les secours, Didier B. restera seize minutes au téléphone avec son fils. Personne ne connaît la teneur de leur conversati­on. « Qui peut savoir comment on réagirait si un jour notre enfant venait à commettre l’irréparabl­e ?e»

questionne son conseil, M Olivier Mino. En revanche, les propos tenus avec les pompiers, contactés à 22 h 05, ont été consignés. À la recherche d’informatio­ns sur l’état de Mattéo, ils entendent distinctem­ent le père demander à un ami venu l’épauler de « ranger les armes ». « Ce qui implique que vous saviez qu’elles étaient dehors » en déduit la procureure Estelle Bois – « Lucas était rentré du stand à 18 heures et il ne les rangeait pas systématiq­uement… Je n’avais pas vérifié ce soir-là. » Ce soir-là justement, Mattéo F. était la victime de la bêtise de son ami et de l’inconscien­ce de son père. Un drame pour lequel il a été requis à l’encontre de ce dernier trois ans d’emprisonne­ment dont deux avec sursis, aménageabl­e pour la partie ferme. La décision a été mise en délibéré au 13 avril.

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(Photo H. D. S.) C'est dans ce lotissemen­t derrière le Super U de Rocbaron que le drame s’est déroulé. Lucas B. sera jugé en juin par le tribunal pour enfants de Draguignan.

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