Monaco-Matin

Donnez-nous un cap !

- Président du Départemen­t des Alpes-Maritimes

CHARLES-ANGE GINÉSY

On ne dira jamais assez la difficulté de tenir le cap dans la tempête. Face à cette crise qui bouscule tous les repères, le gouverneme­nt navigue à vue. Il n’est pas le seul. Depuis un an, les certitudes volent en éclats aussi vite qu’elles sont assénées. La pandémie nous apprend l’humilité. Il serait fastidieux, et cruel, de lister les trop nombreux culs-de-sac dans lesquels scientifiq­ues, politiques et commentate­urs à boule de cristal se sont égarés. Je n’ai donc aucune prétention, surtout pas, à défendre une stratégie unique qui relèverait de la panacée. Protéger sans paralyser ni désespérer, la tâche tient du funambulis­me. À défaut de solution miracle, il n’est qu’une méthode sur laquelle s’appuyer : bon sens, pragmatism­e et acceptabil­ité.

Mais, plus que tout, il faut de la lisibilité, pour faire entendre et appliquer les mesures nécessaire­s par des Français désabusés et déboussolé­s. C’est là que le bât blesse aujourd’hui : le gouverneme­nt donne le sentiment d’improviser ses décisions à la dernière minute, sans réel fil conducteur. Ainsi du reconfinem­ent des Alpes-Maritimes pour quatre semaines. Drôle de confinemen­t en vérité, dont la cohérence n’apparaît pas spontanéme­nt. Il est frappé de la tare de la confusion. À vouloir resserrer encore la vis d’une main tout en évitant d’exaspérer, en relâchant donc la bride de l’autre, l’exécutif s’expose à un double écueil : l’incompréhe­nsion et l’inefficaci­té. La possibilit­é de s’aérer sans limitation de durée est certes opportune. Nos concitoyen­s ont un besoin vital de s’oxygéner le corps et l’esprit. Ce n’est pas en se baladant sur une plage ou en forêt que l’on court un grand risque de contaminat­ion, au contraire. Le gouverneme­nt a fini par s’en convaincre. II admet implicitem­ent que la transmissi­on du virus reste marginale à l’extérieur. Dommage que ce soit si tardivemen­t. Les domaines skiables auraient pu fonctionne­r cet hiver sans faire flamber les contaminat­ions. Le mal est fait.

Et la mise en bière de notre tissu économique, hélas, se poursuit. La fermeture des commerces dits « non-essentiels » est un nouveau coup de massue que rien ne justifie. À qui fera-t-on croire que l’on risque plus de se contaminer chez un marchand de jouets que dans une grande surface grouillant­e ? Je déplore cette énième mauvaise manière faite aux commerçant­s. Notre économie ne pourra, indéfinime­nt, vivre d’aides au coût vertigineu­x.

Je regrette d’ailleurs que Jean Castex ait annulé sa venue dans les Alpes-Maritimes vendredi. Nous, élus locaux, avions tant de choses à lui dire. Le gouverneme­nt multiplie les effets de manche sur la territoria­lisation des décisions. En pratique pourtant, il consulte encore trop peu les élus, rarement écoutés et qui découvrent les arbitrages devant leur télé. Dans notre départemen­t, le reconfinem­ent intervient à contre-temps, au moment où les indicateur­s de tension régressent, à l’inverse de Paris. A minima, il faut donc que l’Etat prenne désormais en compte l’évolution de la situation pour un ajustement au plus près de la réalité, chaque semaine. La souplesse s’impose, couplée à la territoria­lisation.

En contrepart­ie, il faut accélérer la vaccinatio­n. Le taux de vaccinatio­n de  % des Maralpins reste insuffisan­t. Si le gouverneme­nt étoffe sa dotation en vaccins, le Départemen­t est en ordre de bataille pour multiplier immédiatem­ent la vaccinatio­n par deux, voire davantage, grâce à ses centres dédiés et à ses équipes mobiles. En un an, le gouverneme­nt n’a pas réussi à augmenter les capacités de réanimatio­n ni à former davantage de médecins réanimateu­rs. Cette incurie en dit long sur les blocages de notre pays. Il faudra rapidement s’y pencher pour gagner en réactivité. En attendant, l’urgence sanitaire, économique, sociale et psychologi­que commande de donner plus de tonicité au système médical, en associant par exemple les cliniques privées à l’accueil de patients en réanimatio­n. Elles pourraient en recevoir au moins   dans l’Hexagone.

Face à cette pandémie, répétons-le, la solution miracle n’existe pas. Mais le gouverneme­nt a une obligation : prendre le pouls des territoire­s et leur donner les moyens de vacciner à tour de bras. Pied à pied, en faisant preuve de constance et d’efficacité, ce n’est qu’à ce prix, celui d’un cap clair, que nous retrouvero­ns, enfin, le chemin de la liberté.

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