Monaco-Matin

Une stèle pour les défunts emportés ?

Le cimetière de Saint-Dalmas-de-Tende avait été dévasté par la tempête Alex. 200 corps avaient été emportés. Six mois après, comment les proches honorent-ils leurs défunts ?

- YANN DELANOË ALICE ROUSSELOT ET CHRISTOPHE CIRONE

Six mois après la tempête Alex, les plaies béantes de la Roya sont encore là. Dans les paysages, sur les infrastruc­tures, et dans les esprits. À l’image du cimetière de Saint-Dalmas-de-Tende, blessure, d’un lieu, mais aussi de nombreux habitants, qui y venaient régulièrem­ent se recueillir sur la sépulture d’un proche. Ce terrible soir du 2 octobre, la majorité du cimetière a été emportée par le torrent de Bieugne, devenu furie dévastatri­ce.

« Les 80 “tiroirs” ont tous été arrachés. Sur 35 caveaux de famille, il en reste 17, et 25 sépultures en terre sur 152 », énumérait le maire de Tende, Jean-Pierre Vassallo après la catastroph­e. En tout 200 corps avaient été emportés.

« Sept ont été identifiés et récupérés. Ils ont été transférés au cimetière de Tende », exposait Jean-Pierre Vassalo il y a quelques jours.

Tests ADN

« Il y a aussi une vingtaine de corps retrouvés mais non identifiés, à Nice, poursuit l’édile. Les familles sont contactées pour savoir si elles sont d’accord pour des recherches ADN. Des tests ADN devraient avoir lieu cette semaine ».

Le cimetière dévasté de Saint-Dalmas-de-Tende.

Quant aux autres défunts, dont les sépultures n’ont pas été emportées, sont-ils à l’abri d’une nouvelle colère du ciel ?

« Ils le sont », répond succinctem­ent le maire. Qui indique que le cimetière de Saint-Dalmas sera entièremen­t reconstrui­t.

« Nous allons refaire le cimetière. On estime le coût à 3 millions d’euros, et nous allons demander des subvention­s ». Pour l’instant, tout reste à faire. « Le Smiage a fait des travaux de déblaiemen­t, de nettoyage. mais il faudra ensuite conforter le cimetière, refaire tout son mur… »

Et l’élu le sait, il faudra aussi réparer les esprits. Reconstrui­re, se reconstrui­re, face à ce traumatism­e qui s’ajoute à celui de la tempête elle-même. Un traumatism­e ravivé à chaque découverte d’ossements.

« Beaucoup d’émoi »

Jean-Michel Diesnis, psychologu­e missionné pour aller à la rencontre des habitants de Tende, en témoigne : « À vrai dire, je ne connais que des personnes qui vivent cela très mal… Un ossement retrouvé amène beaucoup d’émoi… »

Comment honorer ses proches décédés, lorsque leur sépulture n’existe plus ? Où se recueillir ? Comment lutter contre cette sensation d’avoir perdu quelqu’un une deuxième fois ?

« Les gens n’aiment pas en parler, assure le maire. C’est un sujet très douloureux… Nous aurons une réunion avec les familles, nous avançons pas à pas… » Quelques jours après la

tempête, une Tendasque, Piera, écrivait : « Adieu la tombe familiale…c’est très attristant mais priorité aux sinistrés vivants…et à l’énergie de réparation et de reconstruc­tion. Pour le reste il faudra patienter… » Paroles de Tendasques orphelins de leurs défunts.

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