« Il y a urgence à décarboner nos mobilités »
Décongestionner le trafic, promouvoir la mobilité électrique, diversifier les usages de la route, Blaise Rapior fait le point sur les objectifs pour aller vers une autoroute bas carbone
Le constat est simple : près de 90 % des déplacements se font par la route. Pour atteindre la neutralité carbone en 2050, il faut impérativement rendre les déplacements moins polluants. « Ona un volume de CO2 à faire disparaître, pose simplement Blaise Rapior, directeur général du réseau Escota de VINCI Autoroutes. 400 millions de tonnes sont émises chaque année : un tiers dans le secteur des industries, un tiers à cause du logement et un tiers pour les déplacements. »
Blaise RAPIOR
Directeur général du réseau Escota de VINCI Autoroutes
Comment faire diminuer les émissions de carbone ? Blaise Rapior :
D’un côté, elles baissent naturellement grâce à la désindustrialisation du pays ou aux progrès énergétiques. De l’autre, elles augmentent à cause de l’augmentation des mobilités. Dans le secteur du déplacement, % des émissions proviennent des mobilités par la route ; Il faut donc parvenir à décarboner l’usage de la route.
L’usage de la route doit donc inévitablement évoluer ?
Oui, c’est imparable. La route restera essentielle dans nos déplacements mais sa part d’émissions de CO doit baisser. Depuis plusieurs années, nous mettons en place de nombreuses actions « vertueuses ». À ce titre, l’engagement de la Région, très impliquée sur le plan climatique, à nos côtés avec les conventions « Autoroute Bas Carbone » et « mobilité du quotidien » est capital pour transformer en profondeur les usages.
Comment décarboner alors nos déplacements ?
À l’extérieur des grands centres urbains, la voiture reste la solution la plus adaptée. Tandis qu’à l’intérieur des centres, les transports en commun sont les plus appropriés. Il faut donc trouver des solutions pour parvenir à basculer de l’un à l’autre. Et ce, avec un temps de parcours garanti grâce à des voies dédiées et une intermodalité efficace. L’idée est que le parking de la voiture soit directement en face du quai de métro, de tram ou de train.
Quels sont les axes de travail à court terme ?
Il en existe trois. Tout d’abord, réduire les congestions en réalisant des travaux de fluidification sur les infrastructures. Il faut ensuite lutter contre l’autosolisme avec du covoiturage, des transports en commun sur autoroute associés à des pôles d’échanges multimodaux (lire ci-dessous) . Il s’agit enfin de décarboner les motorisations en promouvant l’utilisation des véhicules électriques et en proposant une offre de recharge adaptée aux déplacements longue distance.
L’électrique jouera-t-il un rôle important ?
On estime qu’un cinquième du parc automobile sera électrique d’ici . Il faut donc une accélération conséquente des aménagements pour mettre en place cette offre et accompagner le développement du véhicule électrique sur le marché. En région Sud, le réseau
VINCI Autoroutes, propose déjà plus de trente bornes électriques, presque toutes de haute puissance. D’ici fin , le nombre de bornes va tripler et toutes nos aires de services en seront équipées.
Certaines solutions sont utilisées en France depuis plusieurs années, pourquoi attendre ?
La prise de conscience globale a pris du temps. L’urgence climatique, la sensibilité croissante à l’écologie, l’évolution du rapport à la mobilité pour les jeunes générations, moins attachées à la propriété automobile ont fait évoluer les approches. On a gagné en maturité et en souplesse. La mise en oeuvre des solutions existantes requiert une coordination accentuée des acteurs pour former ensemble ces nouvelles infrastructures.
La situation des Alpes-Maritimes et du Var, positionnés entre mer et montagnes, est-elle délicate ?
On ne peut effectivement pas construire davantage mais on peut adapter les infrastructures déjà existantes. Dans les AlpesMaritimes, c’est d’autant plus complexe car le trafic se met en place d’est en ouest sur des distances longues qui les rendent inadaptées à des transports en communs. Dans le Var, la situation de Toulon, tout en étant aussi contrainte, est un peu plus avancée grâce au tunnel et à l’élargissement de l’A.
Vous menez aussi de nombreuses expérimentations inconnues du grand public...
L’idée est de toujours avancer et de continuer à innover pour trouver des solutions. Nous testons des véhicules d’exploitation électriques ou au GNV dans nos propres flottes. On a réfléchi à l’intégration de panneaux photovoltaïques dans la route mais il y avait un vrai problème de poussières. On étudie le projet d’équiper les aires de services en ombrières avec du photovoltaïque, l’intelligence artificielle aide aussi à détecter des véhicules des covoitureurs, les voitures deviendront connectées et l’infrastructure intelligente… La manière dont nous utilisons la route doit évoluer : plus propre, plus collective, plus intermodale.