Livrets A clôturés par La Poste : les témoignages se multiplient
Plusieurs Azuréens racontent la même mésaventure : leur compte épargne a été clôturé et le solde de leur épargne ramenée à zéro. Ils bataillent pour récupérer leur argent.
Dans nos éditions de lundi, nous évoquions l’histoire rocambolesque d’Yves Jacomet. En voulant faire porter ses intérêts sur son vieux Livret A, ce médecin niçois a découvert que son compte avait été clôturé six ans plus tôt par La Poste sans qu’il en soit informé, et que son épargne avait disparu.
Si Yves a depuis récupéré son argent, il semble que ce ne soit pas le cas de tout le monde. À la suite de cette publication, nous avons été contactés par plusieurs clients de La Banque postale qui partagent la même mésaventure.
Sans crier gare
Fait troublant, la plupart expliquent que leur compte a été fermé sans crier gare à la même époque, juste avant l’entrée en application de la loi Eckert censée justement protéger les épargnants de la déshérence des avoirs détenus par les établissements financiers (lire ci-contre). C’est d’ailleurs cette fameuse loi Eckert qui est invoquée dans le courrier que Thorsten et Teresa, deux retraités suédois installés à Cannes, ont reçu en mars dernier. La Banque postale leur y explique que faute d’activité sur leurs comptes d’épargne, elle sera dans l’obligation de les clôturer et de transférer les sommes s’y trouvant à la Caisse des dépôts et consignations. Les deux Cannois d’adoption tentent immédiatement de remédier à la situation en effectuant de « petits virements » sur leurs Livrets A respectifs, ouverts en 2008. Mais les opérations sont systématiquement refusées.
Quid des intérêts ?
À défaut, ils écrivent à La Banque postale pour exiger le transfert de leur épargne vers un autre établissement. Quatre mois et plusieurs échanges épistolaires plus tard, ils sont toujours dans l’attente.
De guerre lasse, ces expatriés suédois ont fini par écrire au ministre de l’Économie en personne : « Tout ce qu’on demande c’est de pouvoir récupérer notre patrimoine le plus vite possible ! » Ils ne sont pas les seuls. Audelà du capital, Monique veut aussi récupérer les intérêts « perdus » car on lui a expliqué, assure-t-elle, « qu’il faudrait s’asseoir dessus ». Cette habitante de Valbonne bataille pour le compte de sa mère, âgée de 95 ans. Cette dernière a reçu en décembre 2020 un courrier de La Banque postale l’invitant également à se manifester, sinon son Livret A serait clôturé, toujours en vertu de la loi Eckert. Sauf que lorsqu’elle se rend au bureau de Contes, Monique s’aperçoit que c’est déjà le cas ! Et ce depuis 2015 !
« La grande faucheuse »
Idem pour Jean-Marc. C’est en voulant faire porter ses intérêts sur son vieux livret papier que ce Niçois a découvert au bureau de poste Bottero que celui-ci avait été clôturé en 2014. Sans qu’il en ait été informé. Certes, il n’habite plus à l’adresse figurant sur son compte d’épargne, ouvert alors qu’il était adolescent. « Mais mes parents y vivent toujours » , assure-t-il. Pour lui, le problème est ailleurs : « Il semblerait que la grande faucheuse soit passée à cette époque », ironise-t-il. En effet, « sur les forums du Web », Monique a trouvé de nombreux témoignages faisant état de fermeture intempestive remontant aux mêmes années. Précisément entre la promulgation de la loi Eckert en 2014 et son entrée en vigueur effective le 1er janvier 2016.
Des questions en attente de réponses
La Banque postale, et peutêtre d’autres établissements financiers, ont-ils profité du délai de deux ans – qui leur avait été accordé afin de se préparer à cette nouvelle réglementation – pour clôturer les vieux livrets papiers ? Et combien n’ont jamais été réclamés ? L’objectif de la loi Eckert était justement que cet argent dormant, estimé à plusieurs milliards d’euros, ne reste pas éternellement à l’actif des banques. On peut se demander si elle a atteint son but...
Jean-Marc, lui, n’hésite pas à parler de « véritable captation ». Il faut dire qu’alors que le dernier solde crédité sur son Livret A fait mention de 16 186,50 euros, il n’a reçu pour l’heure, après trois mois de démarches, qu’un virement de 3 991,43 euros. Pour solde de tout compte ?