Monaco-Matin

Bendejun : un taxidermis­te compulsif rattrapé par la justice

- CHRISTOPHE PERRIN chperrin@nicematin.fr

Sous ses allures bonhommes, Robert, 79 ans, est un prédateur hors du commun. Fine gâchette et passionné par la taxidermie, il a constitué une incroyable collection d’oiseaux naturalisé­s en prélevant ses trophées dans la nature. Une manière de s’approprier une partie du patrimoine commun que n’apprécient pas du tout les gardes de l’Office national de la biodiversi­té (autrement dit les policiers de l’environnem­ent). Au terme de leur enquête, ils ont découvert dans sa maison de Bendejun 1 057 oiseaux dont 244 espèces protégées.

« C’est une tradition familiale », se défend Robert, un ancien technicien d’ascenseur. Le retraité ne se contentait pas de tuer des espèces locales. Il se rendait en Afrique, en Amérique du Sud, en Russie, en Australie… pour compléter sa collection. Taxidermis­te avisé et compulsif, il cherchait à obtenir un couple de chaque espèce rare, quitte à se livrer à du braconnage. « Certes, Monsieur n’en faisait pas commerce mais les espèces protégées étaient dissimulée­s dans sa cave contrairem­ent aux autres. Il savait ce qu’il avait le droit de faire et de ne pas faire », remarque Me Victoria, avocat de la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO).

Lunette à vision nocturne

D’aucuns l’accusent d’avoir également posé des pièges. « Jamais », lance, catégoriqu­e, Robert, qui possédait dans sa maison un véritable arsenal : une vingtaine d’armes, dont certaines équipées de lunette à vision nocturne et d’un silencieux. Là où Robert passait, les oiseaux trépassaie­nt : pigeons, cormorans, huppes fasciées, gravelots… «Jeles ai hérités de mon papa, lui aussi un amoureux des oiseaux. Tous ces oiseaux étaient chassables avant 1971, remarque le prévenu. » Habile remarque du Raboliot

de l’Estéron qui lui permet d’être relaxé du délit de destructio­n, à la satisfacti­on de son avocat Me Banere. En revanche, Robert est reconnu coupable de naturalisa­tion, importatio­n et détention non autorisée d’espèces protégées. Il a été condamné à trois mois de prison avec sursis. Il devra verser 8 000 euros de dommages et intérêts à la Ligue pour la protection des oiseaux, partie civile. Ses armes et ses trophées ont été confisqués et son permis de chasser suspendu.

Eric Hansen, le directeur pour la région Sud et la Corse de l’OFB, estime que « l’impact des collection­neurs d’oeufs, de plumes ou d’espèces naturalisé­es n’est pas neutre sur la biodiversi­té. » Les pièces les plus remarquabl­es de la collection de Robert, actuelleme­nt sous scellés judiciaire­s, doivent rejoindre le Museum d’Histoire Naturelle à Paris.

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