Bendejun : un taxidermiste compulsif rattrapé par la justice
Sous ses allures bonhommes, Robert, 79 ans, est un prédateur hors du commun. Fine gâchette et passionné par la taxidermie, il a constitué une incroyable collection d’oiseaux naturalisés en prélevant ses trophées dans la nature. Une manière de s’approprier une partie du patrimoine commun que n’apprécient pas du tout les gardes de l’Office national de la biodiversité (autrement dit les policiers de l’environnement). Au terme de leur enquête, ils ont découvert dans sa maison de Bendejun 1 057 oiseaux dont 244 espèces protégées.
« C’est une tradition familiale », se défend Robert, un ancien technicien d’ascenseur. Le retraité ne se contentait pas de tuer des espèces locales. Il se rendait en Afrique, en Amérique du Sud, en Russie, en Australie… pour compléter sa collection. Taxidermiste avisé et compulsif, il cherchait à obtenir un couple de chaque espèce rare, quitte à se livrer à du braconnage. « Certes, Monsieur n’en faisait pas commerce mais les espèces protégées étaient dissimulées dans sa cave contrairement aux autres. Il savait ce qu’il avait le droit de faire et de ne pas faire », remarque Me Victoria, avocat de la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO).
Lunette à vision nocturne
D’aucuns l’accusent d’avoir également posé des pièges. « Jamais », lance, catégorique, Robert, qui possédait dans sa maison un véritable arsenal : une vingtaine d’armes, dont certaines équipées de lunette à vision nocturne et d’un silencieux. Là où Robert passait, les oiseaux trépassaient : pigeons, cormorans, huppes fasciées, gravelots… «Jeles ai hérités de mon papa, lui aussi un amoureux des oiseaux. Tous ces oiseaux étaient chassables avant 1971, remarque le prévenu. » Habile remarque du Raboliot
de l’Estéron qui lui permet d’être relaxé du délit de destruction, à la satisfaction de son avocat Me Banere. En revanche, Robert est reconnu coupable de naturalisation, importation et détention non autorisée d’espèces protégées. Il a été condamné à trois mois de prison avec sursis. Il devra verser 8 000 euros de dommages et intérêts à la Ligue pour la protection des oiseaux, partie civile. Ses armes et ses trophées ont été confisqués et son permis de chasser suspendu.
Eric Hansen, le directeur pour la région Sud et la Corse de l’OFB, estime que « l’impact des collectionneurs d’oeufs, de plumes ou d’espèces naturalisées n’est pas neutre sur la biodiversité. » Les pièces les plus remarquables de la collection de Robert, actuellement sous scellés judiciaires, doivent rejoindre le Museum d’Histoire Naturelle à Paris.