Toulon : « Les tirs de mortier je les entends toutes les nuits »
Nombreux sont les habitants à se plaindre de tirs de feux d’artifice.
Ce soir-là, ça fulmine au petit foyer des retraités de Pont-Neuf. Le Comité d’intérêt local y tient son assemblée générale et le président, Michel Leroux, a bien du mal à faire respecter son ordre du jour. Dans la salle, tous ne veulent parler que d’une chose : les feux d’artifice régulièrement tirés des cités HLM de la Beaucaire, Pontcarral ou de la Marquisanne et qui, depuis plusieurs mois, perturbent la tranquillité des zones résidentielles.
« Cette nuit, on a été réveillé à 3 h du matin à cause de tirs de mortiers en plein centre de La Marquisanne », enrage Bernard. « Les tirs de mortier, je les entends toutes les nuits depuis quatre jours ! », enchaîne Patrick. « Ce quartier s’enfonce dans l’insécurité ».
« Fêter le retour d’un dealer qui sortait de prison »
Si le terme « tir de mortier » semble pour le moins abusif [lire ci-dessous], il traduit néanmoins une réalité : ces dernières semaines, les feux d’artifice « sauvages » se multiplient dans les cités toulonnaises… comme un peu partout en France.
« Une fois, c’était pour fêter le retour d’un dealer qui sortait de La Farlède », croit savoir Michelle. « L’autre jour, c’est sûr, il s’agissait de célébrer la fin du Ramadan » estime Philippe. Du côté des OEillets, il se murmure que l’un de ces tirs avait été effectué pour l’anniversaire d’un chef du réseau de stupéfiants. Une autre fois, on évoque un spectacle «offert » afin de remercier les habitants du quartier pour leur coopération au trafic ou, version qui circule sur le web, pour célébrer… une livraison de drogue. D’après certains éducateurs de rue, il semblerait pourtant que la réalité soit plus prosaïque : effet de mode chez les jeunes, voire de mimétisme par rapport à un phénomène hexagonal, les tirs de feux d’artifice (facilement achetés sur internet) serviraient surtout à… tromper l’ennui. Voire à faire « plus beau et plus imposant » que la cité voisine. Reste que leur fréquence ne diminue pas, qu’ils importunent nombre de personnes et que la police voit, elle, le danger potentiel que représentent ces « armes par destination ».
De son côté, Michel Leroux, tout gendarme à la retraite soit-il, n’a guère de solutions à apporter à ses ouailles. « La police fait son maximum » rappelle-t-il. Il s’est quand même fendu d’une missive à la Ville pour rappeler « l’urgence » qu’il y aurait « à endiguer ce phénomène nouveau ». Faute de quoi, « l'exaspération des riverains risque de se transformer à un moment en réaction brutale et non contrôlable », écrit-il.
En attendant que «çase calme », une adhérente, au fond de la salle, préfère philosopher : « Moi, je trouve ça beau. Et puis, avec la Covid, ça nous avait un peu manqué les grands feux d’artifice… »