Libération de la ville : « Des souvenirs très émouvants »
« La Perle de la France » célèbre demain, mardi 7 septembre, le 77e anniversaire de sa Libération. Trois Mentonnais confient comment on leur a évoqué cet épisode marquant.
Demain, sera célébré le 77e anniversaire de la Libération de Menton, devant le monument de la Résistance, sur la place Koenig. Un chapitre sinistre de l’histoire mentonnaise que, finalement, si peu connaissent. À cette occasion, trois Mentonnais nous confient comment on leur a raconté cette tranche de l’histoire locale, et évoquent les anecdotes et souvenirs transmis par leurs familles.
« Ils nous le rappelaient quand on se plaignait »
« J’ai entendu parler de la Libération par mes grands-parents qui m’ont élevé en partie », livre Mireille Mireux, Mentonnaise depuis quatre générations. « Ma grandmère, mon oncle et ma mère ont été évacués à Prades, comme beaucoup de familles, où ils ont été réfugiés quelque temps, poursuit-elle. Mon grand-père, lui, s’est battu au Fort de Sainte-Agnès. Mais l’occupation, la libération, c’était une période dont ils ne voulaient pas trop parler en général. Une tranche de leur vie non pas qu’ils voulaient oublier, car on n’oublie pas, mais qu’ils évoquaient rarement. Ils nous le rappelaient surtout quand on se plaignait de certaines choses. » Malgré ça, dans son enfance, Mireille Mireux entend quelques récits qui témoignent de ce qu’était la vie des Mentonnais en 1944. «Jesaispar exemple que lorsque mon grand-père est parti, il n’a emporté que trois choses avec lui : une corbeille à linge, un réveil et un calendrier PTT.
Ma grand-mère lui a plus tard demandé pourquoi il n’avait pas pris des choses plus importantes. Il a répondu que la corbeille à linge, c’était pour les vêtements, le réveil pour voir l’heure, et le calendrier pour pouvoir cocher les jours. »
À la Libération, le grand-père de Mireille Mireux, qui possédait la double nationalité française et italienne a dû en choisir une : «Samèreluia dit : c’est la France qui t’a donné l’instruction, choisis là.
C’est ce qu’il a fait. Il a été porté déserteur en Italie pendant 20 ans et n’a pas pu s’y rendre pour revoir sa famille ».
« Des bribes de conversation »
Cette réserve lorsqu’il s’agit d’évoquer la période de 1939-1945, on la retrouve aussi dans le témoignage de Patrice Novelli. « Les anciens n’aiment pas beaucoup parler de ces moments. Ce que je sais, c’est ce qui se disait entre mes grands-parents, des bribes de conversation », pose le conseiller municipal. Et puis il y a cette photo, en couverture du livre Menton dans la tourmente (1). On y voit la joie des Mentonnais, postés non loin de l’Hôtel de ville, à l’arrivée des libérateurs, dont une petite fille avec un pansement au genou (photo ci-contre) .Patrice Novelli a reconnu ici sa mère, Jacqueline Di Pasqua. « Elle était très jeune, sa famille avait été évacuée dans les Pyrénées-Orientales pendant la Guerre, retrace-til. L’une de mes tantes est d’ailleurs née là-bas, en août 1940. Ma famille a ensuite fait partie des premières à revenir à Menton, en 1943, lorsque la ville est revenue sous administration française. Beaucoup de Mentonnais de l’époque disaient qu’ils avaient été libérés par les Allemands, car ce sont eux qui, à leur arrivée, ont chassé les Italiens. »
« Elle ne pouvait s’empêcher de pleurer »
« C’est ma maman qui m’a raconté la Libération de Roquebrune-Cap-Martin et Menton, témoigne, quant à elle, Josiane Perche. Elle habitait rue Antoine Péglion, et il y avait les canons italiens. Elle connaissait très bien Charles Cravi (jeune résistant FTPF mort au combat le 5 septembre 1944, N.D.L.R.). Ce sont des souvenirs très émouvants. Lorsqu’elle me contait l’arrivée des Américains à Menton, la joie, la liesse partout, elle ne pouvait s’empêcher de pleurer. »
Demain, l’heure sera au recueillement place Koenig à l’occasion du 77e anniversaire de la libération de Menton. Comme chaque année, le Chant des partisans, les hymnes français, américain et canadien résonneront en hommage aux différentes troupes entrées dans Menton du 6 au 8 septembre 1944 pour libérer la ville. Avec toujours le même message : « Ne pas oublier ». mboscagli@nicematin.fr
(1) L’ouvrage « Menton dans la tourmente, de 1939 à 1945 » a été écrit par Jean-Louis Panicacci et édité par la Société d’art et d’histoire du Mentonnais (SAHM).