L’impact de contaminants émergents
Daniel Laffitte est biochimiste et directeur de la plate-forme de spectrométrie de masse de la faculté de pharmacie d’Aix-Marseille. Avec son équipe, il entretient depuis sept ans un partenariat avec l’Ifremer dans le cadre de la préservation de la Méditerranée. « Un spectromètre de masse n’est rien d’autre qu’une grande balance, sophistiquée et très chère, qui donne la masse des molécules étudiées et permet, par la suite, leur identification », a-t-il su vulgariser. Associée à l’imagerie Maldi (un procédé récent et utilisé ici pour la première fois en Europe sur la faune marine), cette technologie permet de détecter très localement, par coupe, la présence d’une molécule dans un organe, même minuscule.
Traces de molécules anticancéreuses métabolisées
Une récente étude sur des échantillons d’eau provenant d’effluents hospitaliers présentant une « concentration notable de cyclophosphamide » – une molécule anticancéreuse utilisée dans le traitement du cancer du sein et de l’ovaire – a conduit à une découverte préoccupante : mises en contact avec ces échantillons, les moules présentent des formes métabolisées de cette molécule dans un de leurs organes, l’hépatopancréas.
« Le cyclophosphamide présente de très importants effets secondaires hématologiques, gastro-intestinaux et pulmonaires. » C’est pourquoi, poursuit le biochimiste, « ces molécules doivent être recherchées en priorité ». Une étude à plus grande échelle va donc être menée en ce sens avec l’Ifremer, grâce à des prélèvements et des analyses sur différents points de suivi en Méditerranée, afin d’évaluer l’étendue du phénomène. Parallèlement, à terre, les efforts vont se concentrer pour limiter l’impact de telles molécules susceptibles d’affecter le métabolisme d’organismes marins. Concrètement, les travaux de Daniel Lafitte aideront au développement de filtres efficaces dans les stations d’épuration pour limiter leurs rejets en mer.
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Le littoral méditerranéen français est l’un des mieux surveillés d’Europe au titre des substances chimiques”
François Houllier, président-directeur général de l’Ifremer