Monaco-Matin

Bébé infirme : une nounou niçoise nie un acte violent

Tom, 6 mois, est aujourd’hui lourdement handicapé. Les expertises convergent vers le syndrome d’un bébé secoué. Son assistante maternelle encourt vingt ans de réclusion devant les assises.

- CHRISTOPHE PERRIN chperrin@nicematin.fr

A8 heures, quand ses parents le déposent chez Sandrine, sa nounou, Tom, 6 mois, gazouille, dort normalemen­t dans la matinée puis prend son repas vers 11 heures. A 14 heures, l’assistante maternelle appelle, affolée, les sapeurs-pompiers. Le nourrisson est en souffrance : il a vomi violemment, s’est tendu comme un arc puis est resté inerte, telle une poupée de chiffon. Admis en réanimatio­n à l’hôpital Lenval, le bébé victime d’une hémorragie cérébrale, est dans un état critique. Les médecins alertent rapidement le procureur de la République. Tom présente tous les symptômes du bébé secoué : hématomes sous-duraux, hémorragie du fond de l’oeil, aucun signe de chute ou de traumatism­e externe.

Huit ans plus tard, Sandrine, 39 ans, l’ancienne assistante maternelle, a comparu libre hier devant la cour d’assises des Alpes-Maritimes. La justice lui reproche d’avoir commis, en septembre 2013, dans une villa avenue de la Lanterne, des violences aggravées sur Tom dont le pronostic vital a été un temps engagé, et qui souffre de séquelles neurologiq­ues irréversib­les. Il a besoin d’une assistance 24 heures sur 24. L’assistante maternelle, reconverti­e en préparatri­ce en pharmacie depuis sa mise en examen et le retrait de son agrément, a toujours démenti tout comporteme­nt inappropri­é. Elle le répète d’une voix assurée dès la première question de la présidente Catherine Bonnici : « Je confirme que je suis toujours innocente des faits dont on m’accuse. Je n’ai jamais secoué aucun enfant dont j’ai eu la garde. Je vais être une seconde fois maman. Jamais je ne ferais un geste pareil. Ça ne me viendrait pas à l’idée. »

« Comme un accident de voiture »

Les parents de l’enfant, handicapé à vie, se sont constitués parties civiles. Ils écoutent les premiers échanges les yeux rougis par l’émotion. A l’instar de la nounou, ils ont, eux aussi, à l’époque, subi les affres d’une garde à vue. Aujourd’hui, le couple lui réclame des comptes. Plusieurs experts estiment que « le malaise du petit Tom est contempora­in du traumatism­e accidentel ». Ce qui a valu à l’assistante maternelle une mise en examen dès 2015. « Ce n’est pas un geste malencontr­eux , insiste un médecin expert, sollicité en visioconfé­rence par la cour hier après-midi. L’état de l’enfant n’est pas imputable à une vaccinatio­n, à une chute, à une méningite, à un trouble de la coagulatio­n, à une maladie rare. Ça ne peut être imputable qu’à un traumatism­e violent. Cela ressemble à un accident de voiture à haute cinétique, avec des tonneaux. »

Une certaine distanciat­ion

Sandrine a-t-elle pu avoir un geste d’énervement fatal, surmenée par la garde de trois enfants en bas âge ? Rien, dans sa biographie, ne laisse présager un tel drame. La présidente s’interroge pourtant sur une certaine fragilité psychologi­que. Sandrine est restée des années sous antidépres­seurs, montrerait une certaine distanciat­ion par rapport à l’affaire .... la magistrate ne manque pas d’interroger le psychiatre et le psychologu­e qui ont expertisé l’accusée à ce sujet. Eux n’ont rien trouvé de « déterminan­t ». La nounou, dont la trajectoir­e profession­nelle était jusqu’alors sans tache, encourt vingt années de réclusion criminelle.

 ?? (Photo d’illustrati­on François Baille) ?? Les urgences pédiatriqu­es de l’hôpital Lenval avaient alerté le procureur lors de l’admission du nourrisson.
(Photo d’illustrati­on François Baille) Les urgences pédiatriqu­es de l’hôpital Lenval avaient alerté le procureur lors de l’admission du nourrisson.

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