Monaco-Matin

Adrien Gallo

- AMÉLIE MAURETTE amaurette@nicematin.fr Adrien Gallo. (Parlophone)

Flûte enchantere­sse, guitare acoustique, envolées de cordes, tambourin et légers gazouillis. Là où les saules ne pleurent pas, morceau qui ouvre l’album du même nom, est comme un soir d’été en rab. Une bulle de légèreté que la rentrée n’a pas.

Cette deuxième escapade en solo du leader de BB Brunes (après Gemini en 2014) confirme son goût pour la chanson française et la variété élégante. Deux ans après le retour de son groupe de rockeurs (avec le disque Visage en 2019), Adrien Gallo troque ses santiags et son cuir contre une paire de Richelieu et une cravate en crochet, et il s’en retourne à ses premières amours. Autour d’un piano et d’un quintette à cordes, le Parisien de trente-deux ans cisèle douze titres tout en délicatess­e.

« Je voulais que ce disque soit une sorte d’Eden qui, j’espère, existe. Je n’ai pas envie d’être défaitiste… Je voulais que cet album soit porteur de lumière, d’espoir, de tendresse, explique l’auteur-compositeu­r. Qu’il soit comme un refuge. La musique a toujours été ça pour moi. Une meilleure amie qui, quand ça ne va pas, quand le monde autour ne tourne absolument pas rond, nous apaise, nous aide dans nos peines et nos questionne­ments. » Une amie un brin décalée aussi, qui balancerai­t un Le Forestier en soirée quand tout le monde attend un set électro. À contre-courant ce dernier Gallo ? « Il y a quelque chose d’un peu anachroniq­ue, oui. Je voulais un disque qui ne soit pas marqué par une époque, qui sonne classique, intemporel. J’avais envie d’enregistre­r de vrais instrument­s, j’ai travaillé avec des musiciens que j’ai choisis avec attention. Je voulais revenir à une certaine chaleur, retrouver des aspérités aussi, et cette magie qui opère quand dix musiciens jouent dans la même pièce. Il y a un côté très humain qui me plaît beaucoup », poursuit Adrien Gallo qui, contrairem­ent à ses habitudes de guitariste, a tout composé au piano.

« J’ai composé sur le Pleyel que m’avait offert mon père [le réalisateu­r Jean-Pierre Gallo, disparu en 2014, ndlr]. Quand j’avais cinq ans, je voulais un piano, mes parents m’ont d’abord offert un jouet et ça ne m’a pas plu du tout ! Ensuite j’ai eu celui-là. C’est un lien avec mon père sur ce disque. »

Avec son père, Adrien Gallo a appris à aimer la poésie de René Char – « il m’avait offert Les Matinaux en me disant que c’était mon poète » –, et les textes de Brassens et Barbara. « Mon père écrivait beaucoup de poésie, je me suis replongé dedans. Il y a beaucoup de clins d’oeil à lui dans l’album. En fait, avec ce disque, je voulais faire un pont entre mon père et mes enfants. Cette idée de transmissi­on, de filiation, était très importante », glisse le jeune papa. « Les gazouillis qu’on entend, au tout début, ce sont les voix de mes enfants… J’ai eu des jumeaux. Leur naissance a ponctué cet album. C’est une révolution totale, c’est bouleversa­nt, dans le bon sens du terme. Ce disque leur est dédié aussi. »

Georges Brassens, Barbara, Michel Berger aussi, cite Adrien Gallo quand il évoque son éducation musicale. Il glisse que Ram de Paul et Linda McCartney et One Year de Colin Blunstone, deux disques de 1971, ont également flotté dans le studio pendant l’enregistre­ment. On a envie de rajouter Cosma, Moustaki, Chedid, qui, au détour d’une ligne de flûte sautillant­e, de l’utilisatio­n d’une double voix féminine ou d’une sortie de refrain, semblent avoir imprimé leur marque dans l’oreille de Gallo. À l’écriture, celui qui a signé des textes pour Vanessa Paradis, HollySiz ou Yelle (lire ci-dessous), penche plutôt pour la sobriété, la poésie quotidienn­e et la langue française, toujours. Et tant pis si ces modèles l’intimident. « Barbara, Brassens, Gainsbourg, Moustaki, Anne Sylvestre… Tellement de belles choses ont été faites dans le passé, c’est dur d’oser continuer à écrire. »

Compliqué de gagner sa légitimité de chanteur français aussi, quand on a commencé comme « bébé rocker » ? « Non, j’aime me dire que j’ai le droit de passer d’un registre à l’autre, que je peux surprendre, me surprendre aussi. Je ne me verrais pas rester dans un style toute ma vie. Non, ce qui m’inquiète le plus, c’est de pouvoir continuer à faire de la musique. J’ai la chance de pouvoir en vivre donc la seule inquiétude ce serait cellelà. »

Adrien Gallo en concert. Jeudi 28 avril 2022, à 20 h. Espace Julien, à Marseille. Tarif : 29,50 euros. Rens. www.adamconcer­ts.com

Là où les saules ne pleurent pas.

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