Au procès du -Novembre la douleur et les questions
Le procès abordera la semaine prochaine les dépositions des survivants des attaques, dont les nombreuses interrogations ont commencé à être abordées ces derniers jours.
La douleur et la colère, chacun le sait, sont des étapes du deuil. Beaucoup des survivants du 13 – Novembre et des parents des 131 morts sont encore dans l’une ou l’autre de ces phases, et le diront sans doute lors de leurs dépositions devant la cour d’assises de Paris, qui commencent mardi. Dans les questions posées par leurs avocats depuis l’ouverture du procès, transparaissent toutefois déjà leurs tourments. Certains ont ainsi tenté d’arracher aux médecins légistes, qui déposaient jeudi, des détails sur les dernières minutes de vie des défunts. S’est exprimée aussi une douleur atroce au souvenir de ces journées où les familles ont dû attendre longuement à l’institut médicolégal de Paris, pour voir quelques minutes le corps de leur proche derrière une vitre.
Des avocats comme Me Olivier Morice ou Gérard Chemla ont enfin, dans leurs questions, abordé les interrogations sur les supposées failles de l’action des forces de sécurité, avant les attaques et pendant la soirée du 13 novembre. Une théorie qui fait débat.
Le thème lancinant des possibles failles
Face au flot de cette souffrance qui va se déverser à la barre, le président de la cour, Jean-Louis Périès, a calmement tenté de poser une digue. « Pour ma part, je ne cherche pas à identifier des dysfonctionnements. C’était une situation de chaos inédite, ce n’est pas moi qui vais venir critiquer les policiers, d’autant que ce n’est pas l’objet du procès» , a-t-il indiqué, jeudi, lors des dépositions de deux des policiers intervenus pour
Le procès n’a, pour l’instant, pas abordé en profondeur les charges pesant sur chacun des accusés.
mettre fin à la tuerie du Bataclan.
Le commissaire de la Bac 75, qui a déposé anonymement, et Christophe Molmy, ex-patron de l’unité d’intervention BRI, ont posément exposé les conditions très difficiles de leur action, qui a « limité » le bilan à 90 morts et environ 200 blessés sur un total de 1500 à 1600 personnes présentes ce soir-là dans la salle de concert. Il est toutefois inévitable que le thème des failles ou des dysfonctionnements avant les attaques, concernant un groupe mené par un chef identifié de l’État islamique, Abdelhamid
Abaaoud, revienne sur la table avant la fin du procès, où les parties civiles ont fait citer plusieurs témoins institutionnels à ce titre, notamment l’ex-Président François Hollande.
Interventions lunaires
Avant cela, la cour va d’abord entendre mardi et mercredi les témoins des attaques du Stade de France (un mort et des dizaines de blessés), puis les jours suivants ceux des attentats des terrasses de café (39 morts et des dizaines de blessés) et enfin, du 6 au 27 octobre, les survivants du Bataclan. Ces dépositions vont aussi « cadrer » pour la cour la question des dommages à long terme des attaques. Nombre de survivants souffrent aujourd’hui de syndrome post-traumatique, une affection psychologique très invalidante.
Pour l’instant, le procès n’est finalement pas encore entré véritablement dans son objet principal : évaluer les charges qui pèsent sur les vingt accusés, dont 14 sont présents physiquement. C’est pour l’instant le plus connu d’entre eux, Salah Abdeslam, seul survivant du commando de tueurs du 13 – Novembre, qui se rappelle de temps à autre au bon souvenir des magistrats et des victimes, par des interventions intempestives et quelque peu lunaires.
La semaine dernière, il a ainsi étrangement avancé l’idée d’une « négociation pour éviter d’autres attentats ». Dans un tout aussi curieux élan, qui est peut-être aussi une thérapie, une partie de l’assistance et des victimes a éclaté de rire.