« On a fait des pas de géant ! »
Xavier Pelletier, préfet délégué à la reconstruction des vallées, souligne les avancées réalisées depuis la tempête Alex, et défend les enveloppes « exceptionnelles » promises par l’État.
Ilsedit « toujours sur le pont dans les vallées », où il remonte « trois jours par semaine ». Près d’un an après sa nomination par le président de la République, Xavier Pelletier, préfet délégué à la reconstruction des vallées, est formel : l’État a été au rendez-vous de la tempête Alex. Le « préfet Tempête » salue le travail de titan accompli par chacun, défend le plan d’aides de l’État, et dessine un avenir pour ces vallées.
Un an après Alex, le plus dur est-il fait ou reste-t-il à faire ?
Il y a encore beaucoup à faire. Mais on a fait des pas de géant ! On faisait face à la pire catastrophe en France métropolitaine depuis la Seconde Guerre mondiale. Quand on constate la reconstruction d’infrastructures, que la quasitotalité des mobilités est rétablie, que l’ensemble des habitants a accès à l’eau et l’électricité…
Le vent de la reconstruction souffle dans les vallées.
La réponse collective a-t-elle été à la hauteur des dégâts ?
Ce qui a bien fonctionné dans ce département, c’est le collectif. État, collectivités territoriales, opérateurs privés, associations… Tout le monde a été au diapason, sans se marcher sur les pieds. Aujourd’hui, on est dans une perspective de reconstruction résiliente et durable, comme l’a promis le président de la République. Les engagements ont été tenus.
Est-on allé aussi vite que possible dans la reconstruction des routes ?
Ce qu’ont fait les collectivités territoriales, que ce soit le conseil départemental ou la métropole Nice Côte d’Azur, est absolument exceptionnel. Il ne s’agissait pas de reconstruire vite et n’importe comment, mais durablement !
On voit néanmoins de nettes différences de moyens entre la Roya d’un côté, la Vésubie et la Tinée de l’autre…
Je ne partage pas du tout cette analyse. Les contextes sont différents. Les travaux dans la Roya sont extrêmement exigeants, avec une seule voie d’accès pour irriguer la haute vallée. C’est vrai que dans la Vésubie et la Tinée, la construction institutionnelle donne à voir une métropole généreuse envers ses vallées.
Mais chaque collectivité a joué sa partition avec un maximum d’efficacité.
Quels grands chantiers ont été réalisés ?
La ligne de chemin de fer Nice-BreilTende a rouvert le mai dernier. Les accès routiers sont rétablis sur toutes les vallées, à quelques exceptions près, notamment « Tout va extrêmement vite ! » se félicite Xavier Pelletier, le « préfet Tempête », ici à Fontan avec le maire Philippe Oudot.
Castérino, où l’on se projette sur l’été . L’accès au Boréon était très important pour le redémarrage touristique. Le pont du Perthus doit être rétabli dans quelques jours, puis, en , ce sera au tour des ponts d’Ambo, du Caïros, des Arches, de la route de Castérino… Tout va extrêmement vite !
Où en est le relogement des sinistrés ?
biens ont été impactés, dont totalement détruits. ménages sont encore relogés. Nous allons mobiliser le fonds Barnier pour indemniser les biens complètement détruits et acquérir les biens exposés au risque, afin de les détruire. Ce sont toujours des situations difficiles et douloureuses. Mais l’état prendra ses responsabilités. Si on n’arrive pas à un accord amiable, il y aura des expropriations. On ne peut pas laisser les habitants dans leur maison en ayant connaissance du danger…
Êtes-vous épaté de voir les associations toujours mobilisées sur le terrain, un an après ?
Ces personnes sont formidables, à la fois pour leur engagement, leur humanisme, leur générosité. Tout le monde s’y est mis !
Le juin, Emmanuel Macron avait annoncé entre et millions d’euros d’aides pour les vallées. Qu’en est-il aujourd’hui ?
Ce sera millions. La mission IGA-CGEDD a estimé les dégâts à millions d’euros.
Les collectivités avaient déclaré , milliard, en incluant des projets de reconstruction. C’est pourquoi l’état a rajouté une enveloppe exceptionnelle de millions d’euros.
Comment se traduisent ces aides sur le terrain ?
La contractualisation permet d’accompagner les projets des collectivités territoriales (tunnel de basse Vésubie, tunnel de Paganin…) et de petites communes. Les demandes transmises au titre de la dotation de solidarité sont en cours ; millions ont déjà été versés, plus de millions d’euros seront décaissés d’ici à fin octobre [sur un total de millions, Ndlr]. D’autres dépenses vont être portées par le Fonds de solidarité de l’Union européenne. En outre, les collectivités ne paient pas la TVA ; cela représente un retour sur trésorerie d’environ millions d’euros. Enfin, millions sont dédiés à la co-construction de projets avec les habitants.
Certains dispositifs sont de droit commun. N’aurait-il pas été plus efficace de mobiliser une aide d’urgence unique ?
Instruments de droit commun, soit, mais enveloppes exceptionnelles ! Le fonds Barnier est budgété chaque année à hauteur de millions ; là, on en mobilise . Ce sont des montants inédits. On explose les enveloppes !
On a l’impression que la reconstruction des routes s’est faite à l’identique, dictée par l’urgence plus que par la résilience… Des tunnels vont-ils vraiment voir le jour ?
Oui, ils vont se faire. Et on n’a pas reconstruit à l’identique. Certains tracés ne sont pas modifiables. En revanche, la technique, les matériaux, l’ingénierie ont pour objectif de fortifier les ouvrages mis en place.
Comment reconstruire là où le foncier s’est évaporé, comme à Saint-Martin-Vésubie ? Et comment aider les commerçants à tenir bon, notamment à Castérino ?
Dans chaque commune, on fera du sur-mesure. Le gouvernement va mettre en place des aides pour ces hôteliers. Un dispositif d’aide à l’écosystème sera mis en place assez vite dans les trois vallées.
Leur avenir est-il préservé ?
Je pense sincèrement qu’il y a un bel avenir pour ces vallées. Elles ont énormément d’atouts : un cadre de vie, comme on l’a vu avec la crise sanitaire. Les Ehpad et les maisons spécialisées peuvent donner à des personnes plus âgées ou en souffrance la possibilité de vivre à la montagne. En matière touristique, ce sont aussi des ressources territoriales précieuses ; il y a mille choses à faire !
Quand s’achèvera le temps de la reconstruction ?
On aura rétabli la majorité des infrastructures fin . Pour les tunnels, cela prendra plusieurs années.
Quelle est votre principale satisfaction… et votre plus grand regret ?
Je retiens ce travail coopératif, cette dynamique que l’on a su créer. Des regrets ? Ce n’est pas mon caractère. Je suis enthousiaste, volontaire, je regarde devant. Cela n’exclut pas l’esprit critique. On peut toujours se dire que tout ça aurait pu aller plus vite. Mais je vois ce qu’on arrive à régler jour après jour, et les perspectives positives.
Jusqu’à quand se poursuivra votre mission ?
Je suis là pour l’instant, et j’espère l’être aussi longtemps que ma présence sera utile.
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