Monaco-Matin

« On a fait des pas de géant ! »

Xavier Pelletier, préfet délégué à la reconstruc­tion des vallées, souligne les avancées réalisées depuis la tempête Alex, et défend les enveloppes « exceptionn­elles » promises par l’État.

- PROPOS RECUEILLIS PAR PATRICE MAGGIO ET CHRISTOPHE CIRONE pmaggio@nicematin.fr ccirone@nicematin.fr

Ilsedit « toujours sur le pont dans les vallées », où il remonte « trois jours par semaine ». Près d’un an après sa nomination par le président de la République, Xavier Pelletier, préfet délégué à la reconstruc­tion des vallées, est formel : l’État a été au rendez-vous de la tempête Alex. Le « préfet Tempête » salue le travail de titan accompli par chacun, défend le plan d’aides de l’État, et dessine un avenir pour ces vallées.

Un an après Alex, le plus dur est-il fait ou reste-t-il à faire ?

Il y a encore beaucoup à faire. Mais on a fait des pas de géant ! On faisait face à la pire catastroph­e en France métropolit­aine depuis la Seconde Guerre mondiale. Quand on constate la reconstruc­tion d’infrastruc­tures, que la quasitotal­ité des mobilités est rétablie, que l’ensemble des habitants a accès à l’eau et l’électricit­é…

Le vent de la reconstruc­tion souffle dans les vallées.

La réponse collective a-t-elle été à la hauteur des dégâts ?

Ce qui a bien fonctionné dans ce départemen­t, c’est le collectif. État, collectivi­tés territoria­les, opérateurs privés, associatio­ns… Tout le monde a été au diapason, sans se marcher sur les pieds. Aujourd’hui, on est dans une perspectiv­e de reconstruc­tion résiliente et durable, comme l’a promis le président de la République. Les engagement­s ont été tenus.

Est-on allé aussi vite que possible dans la reconstruc­tion des routes ?

Ce qu’ont fait les collectivi­tés territoria­les, que ce soit le conseil départemen­tal ou la métropole Nice Côte d’Azur, est absolument exceptionn­el. Il ne s’agissait pas de reconstrui­re vite et n’importe comment, mais durablemen­t !

On voit néanmoins de nettes différence­s de moyens entre la Roya d’un côté, la Vésubie et la Tinée de l’autre…

Je ne partage pas du tout cette analyse. Les contextes sont différents. Les travaux dans la Roya sont extrêmemen­t exigeants, avec une seule voie d’accès pour irriguer la haute vallée. C’est vrai que dans la Vésubie et la Tinée, la constructi­on institutio­nnelle donne à voir une métropole généreuse envers ses vallées.

Mais chaque collectivi­té a joué sa partition avec un maximum d’efficacité.

Quels grands chantiers ont été réalisés ?

La ligne de chemin de fer Nice-BreilTende a rouvert le  mai dernier. Les accès routiers sont rétablis sur toutes les vallées, à quelques exceptions près, notamment « Tout va extrêmemen­t vite ! » se félicite Xavier Pelletier, le « préfet Tempête », ici à Fontan avec le maire Philippe Oudot.

Castérino, où l’on se projette sur l’été . L’accès au Boréon était très important pour le redémarrag­e touristiqu­e. Le pont du Perthus doit être rétabli dans quelques jours, puis, en , ce sera au tour des ponts d’Ambo, du Caïros, des  Arches, de la route de Castérino… Tout va extrêmemen­t vite !

Où en est le relogement des sinistrés ?

 biens ont été impactés, dont  totalement détruits.  ménages sont encore relogés. Nous allons mobiliser le fonds Barnier pour indemniser les biens complèteme­nt détruits et acquérir les biens exposés au risque, afin de les détruire. Ce sont toujours des situations difficiles et douloureus­es. Mais l’état prendra ses responsabi­lités. Si on n’arrive pas à un accord amiable, il y aura des expropriat­ions. On ne peut pas laisser les habitants dans leur maison en ayant connaissan­ce du danger…

Êtes-vous épaté de voir les associatio­ns toujours mobilisées sur le terrain, un an après ?

Ces personnes sont formidable­s, à la fois pour leur engagement, leur humanisme, leur générosité. Tout le monde s’y est mis !

Le  juin, Emmanuel Macron avait annoncé entre  et  millions d’euros d’aides pour les vallées. Qu’en est-il aujourd’hui ?

Ce sera  millions. La mission IGA-CGEDD a estimé les dégâts à  millions d’euros.

Les collectivi­tés avaient déclaré , milliard, en incluant des projets de reconstruc­tion. C’est pourquoi l’état a rajouté une enveloppe exceptionn­elle de  millions d’euros.

Comment se traduisent ces aides sur le terrain ?

La contractua­lisation permet d’accompagne­r les projets des collectivi­tés territoria­les (tunnel de basse Vésubie, tunnel de Paganin…) et de petites communes. Les demandes transmises au titre de la dotation de solidarité sont en cours ;  millions ont déjà été versés, plus de  millions d’euros seront décaissés d’ici à fin octobre [sur un total de  millions, Ndlr]. D’autres dépenses vont être portées par le Fonds de solidarité de l’Union européenne. En outre, les collectivi­tés ne paient pas la TVA ; cela représente un retour sur trésorerie d’environ  millions d’euros. Enfin,  millions sont dédiés à la co-constructi­on de projets avec les habitants.

Certains dispositif­s sont de droit commun. N’aurait-il pas été plus efficace de mobiliser une aide d’urgence unique ?

Instrument­s de droit commun, soit, mais enveloppes exceptionn­elles ! Le fonds Barnier est budgété chaque année à hauteur de  millions ; là, on en mobilise . Ce sont des montants inédits. On explose les enveloppes !

On a l’impression que la reconstruc­tion des routes s’est faite à l’identique, dictée par l’urgence plus que par la résilience… Des tunnels vont-ils vraiment voir le jour ?

Oui, ils vont se faire. Et on n’a pas reconstrui­t à l’identique. Certains tracés ne sont pas modifiable­s. En revanche, la technique, les matériaux, l’ingénierie ont pour objectif de fortifier les ouvrages mis en place.

Comment reconstrui­re là où le foncier s’est évaporé, comme à Saint-Martin-Vésubie ? Et comment aider les commerçant­s à tenir bon, notamment à Castérino ?

Dans chaque commune, on fera du sur-mesure. Le gouverneme­nt va mettre en place des aides pour ces hôteliers. Un dispositif d’aide à l’écosystème sera mis en place assez vite dans les trois vallées.

Leur avenir est-il préservé ?

Je pense sincèremen­t qu’il y a un bel avenir pour ces vallées. Elles ont énormément d’atouts : un cadre de vie, comme on l’a vu avec la crise sanitaire. Les Ehpad et les maisons spécialisé­es peuvent donner à des personnes plus âgées ou en souffrance la possibilit­é de vivre à la montagne. En matière touristiqu­e, ce sont aussi des ressources territoria­les précieuses ; il y a mille choses à faire !

Quand s’achèvera le temps de la reconstruc­tion ?

On aura rétabli la majorité des infrastruc­tures fin . Pour les tunnels, cela prendra plusieurs années.

Quelle est votre principale satisfacti­on… et votre plus grand regret ?

Je retiens ce travail coopératif, cette dynamique que l’on a su créer. Des regrets ? Ce n’est pas mon caractère. Je suis enthousias­te, volontaire, je regarde devant. Cela n’exclut pas l’esprit critique. On peut toujours se dire que tout ça aurait pu aller plus vite. Mais je vois ce qu’on arrive à régler jour après jour, et les perspectiv­es positives.

Jusqu’à quand se poursuivra votre mission ?

Je suis là pour l’instant, et j’espère l’être aussi longtemps que ma présence sera utile.

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(Photo préfecture des Alpes-Maritimes)

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