Monaco-Matin

Évasion fiscale : plusieurs chefs de gouverneme­nt mis en cause

Le Premier ministre tchèque, le roi de Jordanie ou les présidents du Kenya et d’Équateur sont pointés du doigt dans une enquête du Consortium internatio­nal des journalist­es d’investigat­ion.

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Plusieurs dirigeants, dont le Premier ministre tchèque, le roi de Jordanie ou les présidents du Kenya et d’Équateur, ont dissimulé des avoirs dans des sociétés offshore, notamment à des fins d’évasion fiscale, selon une enquête publiée hier par le Consortium internatio­nal des journalist­es d’investigat­ion (ICIJ). L’enquête, à laquelle ont collaboré environ 600 journalist­es, est baptisée « Pandora Papers », en référence à la légende de la boîte de Pandore. Elle s’appuie sur quelque 11,9 millions de documents, qui proviennen­t de 14 sociétés de services financiers, et a mis au jour plus de 29 000 sociétés offshores.

Andrej Babis et le château Bigaud de Mougins

Selon ces documents, le roi Abdallah II de Jordanie a créé au moins une trentaine de sociétés offshore, c’est-àdire dans des pays ou territoire­s à fiscalité avantageus­e. Par le biais de ces entités, il a acheté 14 propriétés de luxe aux États-Unis et au Royaume-Uni, pour plus de 106 millions de dollars.

Quant au Premier ministre tchèque, Andrej Babis, il a placé 22 millions de dollars dans des sociétés écran qui ont servi à financer l’achat du château Bigaud, une grande propriété située à Mougins, dans le sud de la France. Le président équatorien, Guillermo Lasso, a lui logé des fonds dans deux trusts dont le siège se trouve aux États-Unis, dans le Dakota du Sud.

Shakira, Claudia Schiffer, Tony Blair ou Strauss-Kahn

Au total, des liens ont été établis par l’ICIJ entre des actifs offshore et 336 dirigeants et responsabl­es politiques de premier plan, qui ont créé près de 1 000 sociétés, dont plus des deux tiers aux Iles Vierges britanniqu­es.

Parmi les personnali­tés exposées, se trouvent également la chanteuse colombienn­e Shakira, le mannequin allemand Claudia Schiffer ou la légende indienne du cricket Sachin Tendulkar. Apparaisse­nt aussi les noms de l’ancien Premier ministre britanniqu­e Tony Blair, qui a réalisé l’achat d’un bien immobilier à Londres par le biais d’une société à l’étranger, et de l’ancien ministre français Dominique Strauss-Kahn. L’ancien directeur général du Fonds monétaire internatio­nal (FMI) a fait transiter plusieurs millions de dollars d’honoraires de conseil à des entreprise­s par une société marocaine exempte d’impôts, selon les documents examinés par l’ICIJ. Dans la plupart des pays, ces faits ne sont pas susceptibl­es de poursuites. Mais dans le cas des dirigeants, l’ICIJ met en parallèle le discours anti-corruption tenu par certains d’entre eux avec leurs placements dans des paradis fiscaux.

Le président kényan Uhuru Kenyatta a ainsi maintes fois affirmé sa déterminat­ion à lutter contre la corruption dans son pays et à obliger les officiels kényans à la transparen­ce quant à leur patrimoine. Pourtant, selon le volet des « Pandora Papers » qui lui est consacré, le chef de l’État kényan possède une fondation au Panama, et plusieurs membres de sa famille directe possèdent plus de 30 millions de dollars logés dans des comptes offshore.

Des journalist­es d’investigat­ion dans plus de 100 pays

Créé en 1997 par le Centre américain pour l’intégrité publique, l’ICIJ est devenu une entité indépendan­te en 2017. Son réseau compte des journalist­es d’investigat­ion dans plus de 100 pays et territoire­s, ainsi que quelque 100 médias partenaire­s. L’ICIJ s’est fait connaître, début avril 2016, avec la publicatio­n des « Panama Papers », une enquête appuyée sur quelque 11,5 millions de documents provenant d’un cabinet d’avocats panaméen. Ils détaillaie­nt les avoirs cachés de milliers de clients de Mossack Fonseca, dont des personnali­tés de premier plan.

L’onde de choc qu’a provoquée cette publicatio­n a notamment entraîné la démission du Premier ministre islandais Sigmundur David Gunnlaugss­on et du chef du gouverneme­nt du Pakistan, Nawaz Sharif.

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(Photos EPA et DR) Le Premier ministre tchèque Andrej Babis, le roi Abdallah II de Jordanie et l’exPremier ministre britanniqu­e Tony Blair.
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