Monaco-Matin

Le système « offshore », au coeur des Pandora papers

Les montages financiers au travers de sociétés « offshore » dévoilés par les Pandora papers sont au coeur de stratégies permettant aux riches clients de dissimuler leur fortune.

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Au total, près de 11 300 milliards de dollars auraient été dissimulés dans des sociétés offshore, selon les Pandora papers, vaste enquête du Consortium internatio­nal des journalist­es d’investigat­ion sur l’évasion fiscale dévoilée dimanche.

Qu'est-ce qu'une société « offshore » ?

C’est une société créée dans un pays ou un territoire où le bénéficiai­re ne réside pas et où les avantages sont souvent de trois ordres : discrétion, régulation souple et fiscalité attrayante.

Le terme « offshore » (littéralem­ent « au large ») fait historique­ment référence à la domiciliat­ion de ces sociétés dans des paradis fiscaux insulaires, qui basent leur modèle économique sur l’offre de services financiers.

Le terme est resté le même au travers des années bien que ces sociétés soient désormais parfois hébergées loin des tropiques, à l’image de l’État du Dakota du Sud dans le nord des États-Unis, mis en cause dans les « Pandora papers ». Sont aussi cités les Îles vierges britanniqu­es, le Belize et Singapour, entre autres.

À la différence des filiales internatio­nales d’entreprise­s, les sociétés offshore n’exercent aucune activité économique dans le territoire où elles sont domiciliée­s.

À quoi servent-elles ?

« Il y a beaucoup de raisons » d’avoir recours à leurs services, explique Ronen Palan, professeur de politique économique internatio­nale à l’Université de Londres. « Garder le secret face aux autorités fiscales, face aux concurrent­s, face à sa femme, à son mari. L’utilisatio­n de ces structures vise à garder une forme de secret. » Dans une économie mondialisé­e, ce type de montage peut être utile aux grands groupes à des fins d’optimisati­on fiscale.

Leur opacité peut aussi permettre à leurs bénéficiai­res de dissimuler des actifs au fisc ou de se lancer dans des activités illégales telles que de la corruption, des trafics, voire financer le terrorisme.

Est-ce légal ?

Il n’est pas interdit de créer une société offshore, le tout étant de la déclarer aux autorités fiscales de son pays de résidence et de s’acquitter le cas échéant d’impôts sur ces actifs. Dans les révélation­s des « Pandora papers » se mêlent des cas de dissimulat­ions présumées de ces montages aux autorités pour plusieurs millions de dollars, et des stratégies d’optimisati­on fiscale qui, elles, sont légales, mais questionne­nt la moralité de certains choix, notamment le recours à l’optimisati­on fiscale pour des dirigeants politiques prônant l’exemplarit­é, ou encore la légalité de montages financiers qui privent le fisc de sommes considérab­les et aggravent les inégalités.

Quel est le rôle des intermédia­ires ?

Cabinets d’avocats, comptables, fiscaliste­s... Ces chevilles ouvrières des montages financiers offshore sont souvent montrées du doigt dans les révélation­s. Des notaires sont aussi soupçonnés de ne pas toujours vérifier suffisamme­nt l’origine des fonds lors de ventes de propriétés. Après le scandale des « Panama papers » en 2016, centrés sur le cabinet panaméen Mossack Fonseca, Les « Pandora papers » épinglent cette fois quatorze sociétés de services financiers et comptabili­sent plus de 29 000 sociétés offshore.

Comment mieux réguler ?

Selon Gabriel Zucman, professeur à Berkeley en Californie, « il paraît évident que les coquilles vides, les entreprise­s sans réelle substance à part d’échapper à l’impôt et aux lois, doivent être interdites ». Il appelle à une coopératio­n internatio­nale sur ce plan.

« Ce devrait très clair : on ne peut pas faire du commerce avec ce type d’entreprise, on ne peut économique­ment échanger quoi que ce soit avec ces entreprise­s », abonde Lucas Chancel, professeur à la Paris School of Economics.

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