Enquête au coeur des zones d’ombre
Cette piste de contournement du « Carbonnier » estelle légale ? Il nous a fallu des dizaines de mails, des centaines de coups de fil et d’échanges durant plusieurs semaines pour tenter de démêler le vrai du faux, l’erroné de l’imprécision. Depuis l’annonce de ce chantier, Florence Pintus, conseillère municipale d’opposition, mène un parcours du combattant pour trouver les documents d’origine qui ne datent pourtant que de 2018. «On me répondait en mairie que le dossier était introuvable »,
se désole-t-elle.
La réponse est claire : cette piste est illégale
Ce projet de piste, qui porte le nom d’un ancien maire, « Dominique Bégard », a été présenté comme « DFCI ». Comprendre : Défense des forêts contre les incendies. Ce fut notamment dit en conseil municipal, le 3 mars 2020, acté sur procès-verbal. Le nouveau maire, JeanMarc Macario lui-même, nous l’a encore affirmé la semaine dernière. Problème, selon nos investigations, cette piste de contournement n’est pas, et ne sera pas une piste contre les feux de forêt. «Il n’y a pas de piste DFCI à cet endroit, ni aucun projet, je peux vous l’affirmer », nous répond ainsi Michel Hauuy, chef de service Force 06. Même son
de cloche chez Pascal Jobert, directeur départemental des territoires et de la
mer (DDTM) : « Cela ne peut pas être une piste DFCI, car elles ont une vocation de défense et doivent figurer au plan départemental. »
Alors que contient le maigre dossier administratif ? Une autorisation de défrichement délivrée par la DDTM le 24 janvier 2019. Elle autorise la mairie à déboiser sur 0,7 ha. Elle contraint également la municipalité à compenser ce déboisement par une somme de 15 800 euros. Deux options : soit en payant, soit en replantant des essences pour une somme équivalente.
Cette autorisation de défrichement vaut-elle autorisation de faire la piste ? Le flou était entretenu sur cette
question. « Elle permet de changer la nature du lieu, pas de faire une piste », tranche
Pascal Jobert. « L’État n’est compétent que sur la partie défrichement. La commune l’est sur les autorisations d’urbanisme. Une autorisation d’urbanisme qui ne fait pas l’objet d’une transmission à la préfecture, au contrôle de la légalité, n’est pas exécutoire. » Contacté, le contrôle de la légalité n’a aucun dossier à transmettre. La réponse est donc claire : cette piste est illégale.
Douloureuse facture
Quant au reboisement - la fameuse mesure compensatoire - la DDTM a retoqué la proposition de la mairie qui voulait replanter à l’emplacement du défrichement. « Ce n’est pas permis par la compensation. » Elle a donc envoyé la facture de 15 800 euros en mairie. Restée impayée. «Ilvayavoir une relance », indique l’administration.
Si on y ajoute une somme de 11 000 euros HT que la société de BTP dit vouloir faire honorer par la commune en échange de ses services, la douloureuse monte progressivement. Si d’aventure il fallait dépolluer, voire remettre le site en état d’origine, elle pourrait exploser.