Monaco-Matin

Quand verrat-on des joueurs de L prendre la parole ? ”

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Ont-ils entendu votre message ?

Parler à des masses peut être compliqué. J’avais pas mal d’appréhensi­on, peur qu’il y ait un silence de cathédrale et aucune question. Au final, U et U ont été tops, dans l’échange. Plein de questions ont été posées et il y a eu pas mal de commentair­es. Ils ont été très très honnêtes. C’est ce que j’ai apprécié.

Que vous ont-ils dit ?

Je n’étais pas venu pour les faire changer d’avis sur telle ou telle question. Je voulais juste partager mon expérience, assouplir certains esprits. Je n’étais pas venu en mode : « Voici la bonne parole à prêcher ». On était vraiment dans un échange. Certains m’ont dit qu’ils n’aiment pas les gays et ne savent pas pourquoi. Ils se sont ouverts et c’est bien. Des dirigeants et des adultes étaient à leurs côtés, cela pouvait être intimidant, mais le pari est gagné. Les deux séances ont été productive­s. On a pu creuser pour savoir ce qui les gêne.

Et quelle est la réponse ?

Je n’ai rien entendu de novateur. Le sport est bien un reflet de la société. Comme toujours, beaucoup d’ignorance et de peurs infondées sont ressorties. Pas mal pensaient qu’un gay saute automatiqu­ement sur un homme quand il en voit un, qu’un homo a forcément une part de féminité très prononcée. Vous pouvez être hétéro et avoir une part de féminité, être gay et avoir une part de masculinit­é. Je leur ai partagé des anecdotes. J’ai parlé de ces amis amenés dans des boîtes gays et qui n’ont pas été dérangés. Cela les a interpellé­s. La question religieuse a également été posée. Je leur ai expliqué comment j’ai réconcilié ma spirituali­té et ma sexualité. Je ne sais pas si c’est le fait qu’ils sont en centre de formation, mais je les ai trouvés plus éveillés que des jeunes vus dans d’autres lycées. Ils étaient réceptifs et curieux. l’étaient pas à mon époque, mais j’attends davantage des clubs et des joueurs de Ligue . J’aimerais les voir prendre la parole et position, dire clairement qu’être homo n’est pas un choix contrairem­ent à celui d’être homophobe. On a besoin de plus de poids de la part des instances et de la Fédération. L’environnem­ent n’est pas favorable à un coming out aujourd’hui.

Dites-vous aux gamins : « assumezvou­s, n’ayez pas peur » ?

La responsabi­lité n’incombe pas aux homos. Le jour où l’on créera un environnem­ent plus inclusif, les coming out se feront naturellem­ent. Mais les ados n’ont pas à cracher leur vérité au monde. Quasiment personne ne l’a fait. C’est trop de responsabi­lités. Le problème, ce sont les homophobes, pas les homos.

Etes-vous soutenu par le monde du foot depuis la sortie du livre ?

« oh hisse enc… »

Lives Matter,

Le racisme est-il davantage combattu que l’homophobie ?

Ça se retrouve dans les budgets. J’ai interpellé la Fédération et la Ligue. A mon avis, les chiffres sont sensibleme­nt différents entre les deux luttes. On ne voit pas du tout les mêmes campagnes de prévention. Un exemple : Pogba et d’autres joueurs disent ‘‘non au racisme’’ dans une campagne de l’UEFA diffusée partout. Quand verra-t-on quelques joueurs de L prendre la parole sur l’homophobie. Ce sont eux qui inspirent les jeunes.

Il serait temps de mettre les deux causes sur un pied d’égalité…

Complèteme­nt. Je ne cible pas que lui mais Noël Le Graët (le président de la Fédération, NDLR) semble considérer que l’on peut arrêter un match pour des cris racistes mais continuer à jouer pour des faits d’homophobie. Cela n’envoie pas le bon signal. Comment faire comprendre aux jeunes qu’il est aussi mal d’être raciste qu’homophobe ? Il faut trouver une cohérence.

 ?? (Photo Editions Fayard) ?? Ouissem Belgacem : « Je rêve du jour où un jeune de centre dira qu’il est gay et qu’il a un copain. »
(Photo Editions Fayard) Ouissem Belgacem : « Je rêve du jour où un jeune de centre dira qu’il est gay et qu’il a un copain. »

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