Monaco-Matin

Pierre Millo, producteur et distillate­ur à Gourdon : « J’ai peur pour la suite »

- MAXIME ROVELLO

Cultiver la terre, c’est une affaire de famille chez les Millo. Quatre génération­s se sont succédé autour de la cascade du Saut du Loup à Gourdon. Une saga qui arrive jusqu’à Pierre Millo, producteur et distillate­ur de lavande.

Et cette nouvelle norme européenne, l’agriculteu­r ne la voit pas arriver d’un bon oeil. « Je fais partie des petits producteur­s, dans la mesure où je produis moins d’une tonne d’huile essentiell­e de lavande par an. Je suis donc moins soumis à certaines réglementa­tions, mais je ne suis pas hors de danger pour autant. » Pour lui, chercher à classifier chaque molécule présente dans l’huile essentiell­e de lavande ne peut se faire sans tenir compte de toutes les nuances qu’elle contient.

« Je réfléchis à me reconverti­r »

« C’est comme avec le vin, on ne peut pas le classer selon les sulfites, l’alcool, le sucre, etc. Je m’attends à ce qu’on fasse la même chose avec les huiles essentiell­es, mais c’est plus complexe que ça. C’est un produit naturel qui évolue. Si on l’analyse à la sortie de l’alambic et qu’on l’analyse un an plus tard, ce n’est plus le même résultat. Je me demande dans quoi on va classer mon essence ? »

Les craintes de Pierre Millo se portent à la fois sur son exploitati­on, mais aussi sur la filière en elle-même.

Pierre Millo devant l’alambic qui produit chaque jour l’huile essentiell­e de lavande.

« La lavande est un produit phare de la Provence, soutient-il. Avec une réglementa­tion comme celle-ci, il va y avoir des retombées sur toute la filière, ça va décliner à tous les niveaux. Aujourd’hui j’ai peur pour la suite. Au-delà d’un certain pourcentag­e de linalool, on pourrait peut-être interdire la vente d’huile essentiell­e. Ce serait la pire des choses. Après il y a l’étiquetage, mais est-ce que c’est vendeur avec un pictogramm­e “danger” ? Je ne suis pas sûr. » La distilleri­e de Pierre Millo produit l’huile essentiell­e de lavande « à l’ancienne » dans un alambic en plein air, à la vue de tous. Un gage de qualité selon le producteur, face à des clients toujours en recherche d’authentici­té. «Sion en vient à cette réglementa­tion, nous devrons transforme­r les produits, les dénaturer. Indirectem­ent, ce sera la fin des champs de lavande. Je réfléchis à une reconversi­on. Et je ne suis pas le seul dans ce cas… »

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(Photo M. R.)

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