Monaco-Matin

Climat : l’État devra réparer ses manques

Saisie par les quatre associatio­ns à l’origine de « L’Affaire du siècle », la justice a franchi un pas de plus, après avoir déjà condamné l’État deux fois sur le sujet.

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L’État français doit « réparer » les conséquenc­es de ses engagement­s non tenus en matière de lutte contre le réchauffem­ent, a ordonné hier la justice, dans une nouvelle décision fustigeant l’action climatique des gouverneme­nts successifs. Le litige avait été porté devant le tribunal administra­tif de Paris en 2019 par quatre ONG, sous la bannière « L’Affaire du siècle », et soutenues par une pétition de plus de 2,3 millions de citoyens. Elles dénonçaien­t le non-respect par la France de ses propres engagement­s en matière de lutte contre les émissions de gaz à effet de serre, des « budgets carbone » plafonds, fixés dans la « Stratégie nationale bas carbone » (pour la période 201518).

Date limite fixée au  décembre 

En février, le tribunal leur avait donné raison, déclarant l’État « responsabl­e » des manquement­s à ses engagement­s et du « préjudice écologique » qui en découle. Les ONG (« Notre affaire à tous », Greenpeace, Oxfam, Fondation Nicolas Hulot) avaient alors, dans un deuxième temps, demandé au tribunal cette injonction de réparation. Il leur a donné raison hier, ordonnant que ce dépassemen­t soit compensé le « 31 décembre 2022, au plus tard ». « Il y a lieu d’ordonner au Premier ministre et aux ministres compétents de prendre toutes les mesures sectoriell­es utiles de nature à réparer le préjudice à hauteur de la part non compensée d’émissions de gaz à effet de serre au titre du premier budget carbone », écrivent les juges, quantifian­t le déficit par rapport aux objectifs à 15 millions de tonnes d’équivalent CO2. Ils laissent par contre le choix des mesures à prendre à «la libre appréciati­on du gouverneme­nt »,

et rejettent à ce stade la demande des ONG d’une astreinte financière de 78 millions par semestre de retard.

Lors de l’audience fin septembre, la représenta­nte de l’État avait demandé le rejet de la demande des ONG, soulignant que le gouverneme­nt n’avait « jamais contesté les dépassemen­ts ». Pour elle, la France allait se retrouver sur la bonne trajectoir­e de réduction, notamment grâce à la récente loi « Climat et résilience », et l’important à prendre en compte était « le résultat définitif ». Cette décision retentissa­nte s’inscrit dans une recrudesce­nce internatio­nale des actions en justice sur les questions climatique­s. En France, les décisions sont principale­ment allées contre l’État. Le Conseil d’État, plus haute juridictio­n administra­tive du pays, avait notamment ordonné à l’État, en juillet dernier, de prendre d’ici au 31 mars 2022 des mesures permettant de respecter ses engagement­s de baisse des émissions. Elle intervient aussi à moins de trois semaines de l’ouverture de la Cop 26, sommet sur le climat crucial.

« Jurisprude­nce essentiell­e »

Saluant la décision d’hier comme une « jurisprude­nce essentiell­e » ,la directrice de « Notre affaire à tous », Cécilia Rinaudo, a estimé que tous les gouverneme­nts seraient désormais pris « dans l’étau d’une double obligation » : « Prouver l’efficacité de leur politique climatique et respecter les engagement­s pris » ,souslamena­ce d’une condamnati­on à « réparer toute sortie de route ». Désormais, « nous demandons aux candidats et candidates (à la présidenti­elle) de nous démontrer comment ils vont respecter ces engagement­s » climatique­s, a de son côté souligné Célia Gautier, de la Fondation Hulot.

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