De décentralisation Le moment de bascule est-il venu ?
Au terme de ce survol historique, on perçoit clairement combien la décentralisation, qui s’est désormais imposée comme un patrimoine incontestable de la République, n’a cessé d’être en mouvement et d’intégrer de nouveaux enjeux et de nouveaux défis. Malheureusement le temps presse. D’un côté, les inégalités territoriales sont un fait majeur du paysage économique et social du pays : 75 % de la croissance économique est captée par les quinze plus grandes aires urbaines et le PIB par habitant y est 50 % plus élevé dans ces villes.
Les différences de PIB entre certaines régions se sont creusées depuis 20 ans en raison de la désindustrialisation. territoriales s’administrent donc « librement » dans les limites définies dans 1583 pages. Lorsque des compétences sont déléguées au niveau local – par exemple lors du transfert aux Établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) de la gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations –, elles sont accompagnées d’un ensemble d’instructions sur comment gérer cette compétence et comment la financer.
En France, les différentes vagues de décentralisation n’ont ainsi pas conduit à donner aux collectivités territoriales une autonomie effective. efficacement, il faut rompre avec la logique de la réforme imposée « par le haut » et préférer le principe de « subsidiarité ascendante ».
Plutôt que de laisser à l’État le soin de répartir lui-même les compétences des différents échelons territoriaux, il convient d’inverser la logique et de partir du bas pour commencer par donner le choix au plus petit échelon : les communes. Elles-mêmes choisiraient quelles compétences elles exercent et lesquelles elles désirent déléguer à l’échelon plus haut (1). Il s’agit d’une idée qu’on retrouve dans la constitution telle qu’elle est depuis 2003, selon laquelle de transferts de compétences, l’État central conserve la plus décisive et la plus déterminante d’entre elles : la fiscalité. La recentralisation des taxes locales prévue par le gouvernement, comme l’a démontré la décision sur la taxe d’habitation, témoigne bien de cette résistance. Les collectivités territoriales se retrouvent toujours enlisées dans une relation de dépendance nuisible et pernicieuse vis-à-vis de l’État central.
Or, toute véritable autonomie et responsabilité des collectivités territoriales restent factices sans la réelle maîtrise de leurs ressources et de leurs finances propres. Pourquoi ne pas essayer d’achever ce processus de décentralisation en imaginant d’accorder aux communes leur autonomie fiscale ? Ce mouvement, probablement décisif, pourrait également produire plus de légitimité, car les décisions y sont prises au plus près des habitants. Or, selon un sondage du Cevipof en 2019, 71 % des Français font ainsi confiance au maire de leur commune, contre 49 % à leur conseiller régional et 40 % à leur député.
1. Selon un rapport du think tank GenerationLibre qui propose de permettre aux collectivités territoriales, et d’abord aux communes, de s’auto-saisir des compétences de leur choix.