La semaine vagabonde de Denis Carreaux
Lundi
Le choix de Bertrand. Il n’y avait pas de bonne solution. Rester en dehors du processus de désignation des Républicains condamnait Xavier Bertrand à faire cavalier seul et à passer pour un diviseur. Accepter de participer au congrès de son ancien parti lui fait prendre le risque d’une élimination, à l’instar de Sarkozy et Juppé il y a cinq ans. Pour le président des Hauts-deFrance comme pour Pécresse, Barnier, Ciotti et Juvin, c’est opération sauvequi-peut. L’irruption fulgurante d’Eric Zemmour dans cette précampagne a tout chamboulé. Avec un congrès programmé dans un mois et demi, le décembre, Les Républicains ont déjà plusieurs trains de retard. En grimpant dans le wagon au dernier moment, Xavier Bertrand se donne une (petite) chance d’arriver à destination. Pas sûr que les militants LR à qui il a tourné le dos il y a quatre ans lui réservent un accueil de première classe.
Mardi
Un, deux, trois, soleil. À force d’en entendre parler, impossible de ne pas regarder à quoi ressemble
Squid Game. Dès le premier épisode, on comprend pourquoi cette série dystopique coréenne est devenue un phénomène mondial en moins de deux mois. Entre décors de jeux d’enfants, couleurs acidulées et flots d’hémoglobine, la violence sociale est omniprésente et le sang gicle à tout-va dans une mise en scène spectaculaire. C’est dur, mais diablement efficace et surtout terriblement addictif.
Squid Game est un virus dont on aimerait protéger nos enfants. Dérisoire, l’interdiction de la série aux moins de seize ans n’interdit évidemment rien. Les images circulent allègrement sur les smartphones des plus jeunes et on joue à nouveau à Un,
deux, trois, soleil, mais version hyper-trash, dans les cours d’école. Conseil aux parents qui ne l’ont pas encore fait : jetez un oeil à Squid Game.
Vous comprendrez.
Mercredi
Le coup de pompe de Pompili. Le coup de pompe de Pompili.
Elle est quand même gonflée, Barbara Pompili. Au moment où les Français subissent de plein fouet l’augmentation du prix des carburants, la ministre de la Transition écologique appelle les distributeurs à « faire un geste, dans cette période difficile, en réduisant leurs marges ».
Rappel utile : si la marge nette des distributeurs se situe autour d’un centime par litre, la part des taxes prélevées par l’État s’élève, elle, à % du prix à la pompe ! Face à une envolée des prix de % depuis janvier qui atteint % pour le gazole, carburant encore le plus utilisé en France, le gouvernement n’a aujourd’hui pas d’autre choix que faire un geste. La tentative de diversion de Barbara Pompili ne trompera personne.
Jeudi
Ne laissons pas couler le camembert. Notre pâte molle a un sérieux coup de mou. Le camembert, symbole national au même titre que la baguette et le béret, n’est plus le roi au pays des mille fromages. Les Français se sont lassés de sa croûte fleurie et lui préfèrent désormais la mozzarella, qui vient de prendre la tête des ventes de fromages à pâte molle. Si la belle italienne aux formes généreuses est en progression constante, notre calendos est sur la voie du déclin. Depuis les années , ses ventes ont
été quasiment divisées par quatre. Les nouvelles normes ne vont rien arranger. La dénomination Fabriqué
en Normandie n’étant plus autorisée pour les camemberts pasteurisés, la chute va s’accélérer. Pendant ce temps, la mozzarella, dont l’appellation n’est pas toujours protégée, va continuer à envahir nos assiettes. Peu importe qu’elle ait ou non du goût.
Vendredi
Quand Nicolas rencontre Manuel. Ils ne se tombent pas dans les bras avec effusion, mais se retrouvent avec plaisir comme deux vieux copains qui ne se seraient pas croisés depuis longtemps. Invités tous deux des Entretiens
de Nice organisés par le groupe Nice-Matin, Nicolas Sarkozy et Manuel Valls échangent autour d’un café. Plaisantent. On évoque quelques souvenirs, on parle politique, mais aussi billets d’avion et passion amoureuse. Leur âge et leurs histoires diffèrent, mais Nicolas Sarkozy et Manuel Valls ont un point commun : ce sont tous les deux des « ex » qui n’ont pas choisi de l’être. Le premier est passé à autre chose mais n’a pas perdu le feu sacré. Le second n’a nullement renoncé à ses ambitions en dépit du fiasco de la dernière primaire de la gauche, puis d’une parenthèse barcelonaise de trois ans qui s’est terminée en cul-de-sac. Plus libres qu’avant, débarrassés des carcans et des conventions, Sarkozy et Valls profitent d’une vie moins réglée. Un resto, un musée, un week-end : Nicolas avec Carla, Manuel avec Susana, les deux
« ex » s’accordent du temps et en consacrent à leurs épouses, à leur famille. Derrière une décontraction réelle et une prise de recul évidente, on sent bien que, chez l’un comme chez l’autre, la flamme politique ne demande qu’à être rallumée. « On ne profite pas assez de l’expérience des anciens
Présidents », défend d’ailleurs Manuel Valls à la tribune des
Entretiens de Nice, rendant au passage un hommage appuyé à Nicolas Sarkozy. Une manière de suggérer que les ex-Premiers ministres peuvent, eux aussi, être utiles à la France.
Samedi
Une ministre ne devrait pas dire ça. Les six tweets postés à la hâte pour tenter d’éteindre l’incendie ne suffiront pas. En expliquant lors d’un colloque que la maison individuelle est « un non-sens écologique, économique et social », la ministre du Logement, Emmanuelle Wargon, a peut-être raison sur le fond. Mais elle ne peut pas décemment expliquer à des familles avides d’espace et de grand air après plusieurs confinements qu’une maison, un jardin constituent «unrêve qui n’est plus soutenable ».
Encore moins à six mois d’une élection.
« Le camembert, symbole national au même titre que la baguette et le béret, n’est plus le roi au pays des mille fromages. »