Monaco-Matin

Schizophré­nie :

- DOSSIER : NANCY CATTAN ncattan@nicematin.fr

Alors que l’accès aux soins et la santé mentale des Français se sont fortement dégradés dans le contexte anxiogène lié à la pandémie de la Covid-19, l’équipe Profamille du Centre Hospitalie­r Sainte-Marie à Nice continue de proposer son programme de psycho-éducation aux familles de proches atteints de schizophré­nie. Rencontre avec cette équipe coordonnée par Marie-Dominique Ginez.

Quel recul avez-vous sur Profamille ?

Cela fait  ans que nous sommes impliqués dans ce programme canadien d’accompagne­ment des familles. Et nous avons pu fournir la preuve des bénéfices pour elles, mais aussi, par voie de conséquenc­e, pour le proche souffrant de schizophré­nie. C’est de toute façon à cette seule condition que nous restons certifiés.

Quels paramètres suivez-vous pour évaluer les bénéfices pour les familles ?

Ils sont nombreux, très divers et répondent à ce qui est prévu dans le programme originel : douleurs, arrêts de travail, prise de médicament­s, séparation pour ce qui concerne les couples parentaux (cette issue est assez fréquente lorsque la maladie fait intrusion)… Tous ces paramètres sont mesurés en début de programme, puis  fois au cours des trois années d’accompagne­ment. À ces évaluation­s, s’ajoutent des questionna­ires sur les proches, familles, et patient.

Que révèlent généraleme­nt ces questionna­ires ?

On retrouve souvent au départ ce sentiment partagé que tout déborde, qu’il n’y a plus de limites… Les tensions sont telles que cela va jusqu’à l’évitement du proche malade.

Celui-ci est-il invité à participer à certaines séances ?

Non, il n’est jamais là, c’est vraiment un temps pour les familles. Par contre, des questionna­ires lui sont transmis, l’interrogea­nt notamment sur sa perception de ses proches.

Comment les choses évoluent-elles au fur et à mesure du déroulemen­t du programme ?

Une grande majorité de familles déclare aller mieux dès la première année. Plus rarement, certaines, en prenant conscience de leur propre fonctionne­ment, peuvent se sentir un peu moins bien au début du programme. Mais une psychologu­e est présente pour réguler, et de façon générale, la situation s’améliore au cours des deux années suivantes.

Ces familles sont-elles exclusivem­ent composées de couples de parents ?

Non. Il peut s’agir de frères et soeurs du patient, de grands-parents, de parrains… Nous avons même eu une famille d’accueil. Dans tous les cas, il s’agit de proches de la cellule familiale.

Qui sont ces personnes atteintes de schizophré­nie autour desquelles les familles sont mobilisées ?

Le profil a beaucoup évolué depuis le lancement du programme, il y a  ans. Au départ, le recrutemen­t se faisait essentiell­ement via l’Unafam (Union nationale de familles et amis de personnes malades et/ou handicapée­s psychiques, Ndlr) et il s’agissait le plus souvent de malades vieillissa­nts. Aujourd’hui, il arrive même que nous soyons sollicités par les hôpitaux pédiatriqu­es pour des mineurs. En effet, il n’existe pas à ce jour de formation aux aidants de jeunes psychotiqu­es, et les familles se retrouvent démunies.

N’êtes-vous pas encore plus efficaces lorsque vous intervenez auprès des familles de ces jeunes patients ?

Pas vraiment. Souvent, ces très jeunes enfants n’ont pas de diagnostic et sont à un stade aigu de la maladie. Ce ne sont pas les meilleures conditions pour que la famille s’implique dans une longue formation.

Combien de familles accompagne­z-vous ?

Environ  proches par an, ce qui est très insuffisan­t par rapport aux besoins : plus de  familles sont concernées dans le seul départemen­t des A.-M. Mais il faut à tout prix que ce programme soit poursuivi. L’enjeu est trop important. Pour les familles qui n’ont pas l’opportunit­é de participer au programme, et pour leur proche malade, c’est une vraie perte de chances : les problèmes de communicat­ion s’enkystent, il y a beaucoup de violence verbale, et plus grave encore, la perte d’espoir.

Ce programme est une formation structurée et gratuite de 14 séances sur un an, qui se déroulent à l’hôpital SainteMari­e. L’inscriptio­n se fait après entretiens individuel­s avec l’équipe. Contact : M-D GINEZ : marie-domi.ginez@ahsm.fr

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