Monaco-Matin

Les nouveaux pirates

- d’ERIC NERI Rédacteur en chef edito@nicematin.fr

Longtemps, les pirates ont sillonné les mers et les océans, hissant un pavillon factice pour berner les navires marchands avant de partir à l’abordage, sabre au clair et bandeau sur le front. Ils faisaient main basse sur la cargaison : métaux précieux, étoffes, sucre, tabac ou cacao. D’Errol Flynn à Johnny Depp, le cinéma en a fait les héros d’aventures exotiques. Aujourd’hui, les pirates naviguent en eau trouble sur le Darknet, le côté obscur du Web, et partent à l’assaut, derrière leurs écrans, des systèmes informatiq­ues des entreprise­s, des hôpitaux ou des administra­tions. Ils pillent les fichiers et réclament ensuite une rançon sous peine de divulguer les données ou de paralyser pendant plusieurs semaines le fonctionne­ment de ces établissem­ents.

Les pirates sont devenus des hackers, un anglicisme aux racines françaises (« hacher »). Ils coupent en morceaux le code informatiq­ue de leurs victimes alors que leurs devanciers hachaient menu ceux qui leur résistaien­t. Véritables délinquant­s de l’ère numérique, ils ont dévoyé la philosophi­e des pionniers de l’Internet, qui portaient, eux aussi, la liberté en étendard. Désormais, plus besoin de s’introduire dans la salle des coffres d’une banque en creusant un tunnel dans les égouts comme Spaggiari. Il suffit de pénétrer dans ses ordinateur­s grâce à un « cheval de Troie », un logiciel malveillan­t. Les pirates peuvent être à des milliers de kilomètres de leur cible, aux Caraïbes ou ailleurs.

Ils s’attaquent également aux particulie­rs, petits poissons mais gros profits lorsqu’ils sont mis bout à bout, grâce à la technique de l’hameçonnag­e : un mail ou un texto qui ressemble à s’y méprendre à celui d’un organisme officiel ou d’une société ayant pignon sur rue. Un clic sur le lien qui accompagne le message et le piège se referme avec des factures fictives ou, pire encore, un logiciel espion qui fera main basse sur les coordonnée­s bancaires ou les codes Internet. Jusqu’où iront ces cyberattaq­ues dans un monde de plus en plus interconne­cté ? Des pirates peuvent-ils en venir à paralyser le trafic aérien, à mettre sur la paille le réseau bancaire, voire à prendre la main sur le système de défense d’un pays ?

Des policiers et gendarmes, spécialisé­s en cybercrimi­nalité, s’emploient à faire tomber dans leurs filets ces escrocs de la Toile.

Les informatic­iens des sociétés de cybersécur­ité ont remplacé les vigiles à l’entrée des entreprise­s. Pour un peu, on en viendrait à regretter l’époque, avant la dématérial­isation, où tous les papiers étaient bien rangés dans des dossiers et des classeurs, entreposés dans des armoires en fer.

« Désormais, plus besoin de s’introduire dans la salle des coffres d’une banque comme Spaggiari. »

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