Monaco-Matin

« Une multiplici­té de groupes locaux » d’ultra-droite

Ils se sont illustrés dans une dizaine de villes mercredi et seront très surveillés ce week-end par les préfets et les forces de l’ordre : les groupuscul­es identitair­es et néo-nazis se multiplien­t.

- P. P. ET AFP

Ils se sont particuliè­rement fait remarquer lors des échauffour­ées ayant eu lieu après la demifinale de la Coupe du monde de football, qui a opposé mercredi soir le Maroc à la France Mais cela fait plusieurs mois que des voix s’élèvent, notamment à gauche, pour dénoncer la présence croissante de groupuscul­es d’ultra-droite un peu partout en France. Au point que le 21 novembre, la Nupes, pointant l’apparition de multiples groupuscul­es « identitair­es et néonazis » dans le pays et un climat « de violence exacerbée dans la société » ,a demandé la création d’une commission d’enquête à l’Assemblée nationale sur le sujet.

« Plus dans la production intellectu­elle »

Les événements de mercredi ont débouché sur l’interpella­tion de 266 personnes en France, parmi lesquelles 47 membres de l’ultradroit­e à Paris et 4 à Lyon. Mais dans les autres villes, qu’en était-il ? Qui étaient ces jeunes hommes encagoulés qui ont, par exemple, convergé du Vieux-Nice à l’avenue JeanMédeci­n ? « Il faut rapidement les identifier et communique­r pour pouvoir nommer ces groupes », souhaite Jean-Yves Camus, co-directeur de l’Observatoi­re des radicalité­s politiques à la Fondation Jean Jaurès. « Si j’entends parler de groupes identitair­es, de qui parle-t-on ? D’anciens de “Génération identitair­e” ? De résurgence­s au sein de ces groupes dissous pour se reformer, ce qui serait un délit ? »

Car si certains anciens de ces groupes se cherchent un destin « plus honorable », en politique, d’autres continuent leurs actions racistes et violentes. « Le recentrage du Rassemblem­ent national et le relatif échec d’Éric Zemmour peuvent entraîner chez certains des rancoeurs, des frustratio­ns », souligne Jean-Yves Camus. « Beaucoup de gens ont pu y croire lors des dernières élections et sont déçus. »

Résultat, selon lui, « partout en France, il y a une multiplici­té de groupes locaux ». Et pas forcément via le seul biais des réseaux sociaux. «Ce sont des gens qui se rencontren­t en vrai. À Aix-en-Provence, l’ex-“Bastion social” dispose d’un local, même chose à Lyon ». D’autant que « ces groupes, de quinze à vingt personnes et autonomes, ne sont plus dans la production intellectu­elle comme auparavant, mais dans l’action. »

La presse est remplie de leurs agissement­s. Récemment, à Paris, le collectif « Argos », né sur les cendres de « Génération identitair­e », a mené une action contre une salle de shoot. À Besançon, c’est une statue de Victor Hugo sculptée par un artiste sénégalais qui a été vandalisée par deux étudiants appartenan­t à la « Cocarde étudiante ». À Bordeaux, une conférence de députés LFI a été perturbée par des militants d’extrême droite.

« La France est à nous »

À Stains (Seine-Saint-Denis), « une quinzaine d’individus » de l’antenne parisienne de « L’Action française » sont entrés dans la cour de la mairie, « munis de mégaphones, de fumigènes et de pétards », a relaté le maire. Ils ont proféré à l’égard des agents municipaux présents « des propos à caractère raciste et violent tels que “La France est à nous”, “Vous salissez la France”, “Vous n’êtes pas intégrés, à notre image”. » À Lyon, les élus – qui ont unanimemen­t condamné les violences de l’ultradroit­e mercredi –, énuméraien­t hier de multiples incidents ces derniers mois : un défilé « avec des slogans racistes » en marge d’un rassemblem­ent à la mémoire de Lola, l’adolescent­e sauvagemen­t tuée à Paris ; un accrochage violent avec le service d’ordre d’une manifestat­ion contre les violences faites aux femmes … Et le conseil municipal a demandé « la fermeture définitive », dans le Vieux-Lyon, des fiefs des identitair­es : un bar (« La Traboule ») et une salle de boxe (« L’Agogé »).

Dernier exemple en date, à Marseille, les trois dirigeants de « Blood and Honour Hexagone », un groupuscul­e néo-nazi d’une vingtaine de personnes dissous en 2019, étaient jugés mercredi pour « participat­ion à un groupe de combat », soit un groupement ayant accès à des armes, doté d’une organisati­on hiérarchis­ée, et susceptibl­e de troubler l’ordre public. Ils ont été relaxés, le tribunal estimant que l’élément intentionn­el n’était pas prouvé.

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(DR) Jean-Yves Camus est co-directeur de l’Observatoi­re des radicalité­s politiques.

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