Il a pris rendez-vous
Randal Kolo Muani a été l’auteur d’une entrée tonitruante, pleine de peps. Il a obtenu le premier penalty et il a aussi transformé son tir au but en force.
Les coachs répètent à l’envi que les remplaçants ont un rôle à jouer. Qu’un match ne se joue pas à onze mais à vingt-trois et désormais à vingt-six, dans un monde post-Covid. Dans le microcosme du football, où la titularisation est attendue comme un billet gagnant de loterie, où chacun entend jouer chaque minute de chaque match, ce discours s’apparente souvent à des éléments de langage, à une forme de communication. Il convient de ménager les ego, de garder tout le monde sous pression et dans le collectif.
Du culot
Hier, c’était bien plus que des mots et un ressort psychologique. Randal Kolo Muani a mis tout ça en pratique. Il a bondi du banc avant la pause. Il a remplacé un Ousmane Dembélé à côté de ses pompes, maladroit et incapable de faire des différences. Pendant quarante minutes, Nicolas Tagliafico n’a jamais été bousculé, pris de vitesse ou même contrarié. Il a bouclé son couloir en sifflotant.
À 24 ans, le natif de Bondy a changé la face du match. Il a ramené de la vie et de l’énergie à une équipe amorphe. Il a gagné ses duels et bataillé avec un culot monstre.
Et il a embarqué les siens dans sa foulée. Sa capacité à mettre de l’impact n’est pas une surprise. Il l’avait déjà démontrée face à la Tunisie lors du dernier match de poule (0-1), puis en demi-finale contre le Maroc (2-0), jour de son premier but en sélection. Sa moelle avait déjà de quoi susciter l’admiration. Il a encore pris du galon hier. Il a refait le coup dans une finale de Coupe du monde, dans un sommet du jeu et de pression. Il n’a pas calculé ni tergiversé. Il a pesé
sur la défense argentine jusqu’à la déchirer et l’user.
La gloire au bout du pied
Il a pris de vitesse Otamendi pour obtenir le premier penalty (80’). Puis son pied n’a pas tremblé pour convertir son tir au but. Il l’a frappé au centre et en force, devant Martinez, un spécialiste de l’exercice. Ce même gardien qui lui a fait barrage à l’ultime seconde de la prolongation. Le portier argentin s’est déployé alors que l’attaquant de
Francfort avait la balle de match au bout du crampon. Dans le sillage de Kylian Mbappé, auteur d’un triplé, il aurait pu être l’autre héros de cette finale si les Bleus avaient été sacrés. Battu, il a simplement pris rendez-vous pour l’avenir. Dans l’optique de l’Euro-2024 en Allemagne, la prochaine échéance de l’équipe de France, et s’il reste sélectionneur, Didier Deschamps se souviendra de ses entrées toniques. L’histoire est belle pour l’exattaquant du FC Nantes. Lui qui s’était invité dans l’avion pour le Qatar sur le gong, le jour du départ. Il a pallié le forfait de dernière minute de Christopher Nkunku, trahi par son genou. Il y a trois ans, il évoluait encore en National du côté de Boulogne, prêté par les Canaris. Malgré son jeune âge et son ascension fulgurante, il a vite compris où il avait mis les pieds. Dans un Mondial, tout est décuplé. « Les matchs sont de plus en plus tendus, disaitil avant la finale. Il y a beaucoup de combats, de batailles, ça devient de plus en plus physique sur la fin. Ça se ressent sur le terrain. »
À la vitesse où il apprend, Kolo Muani ne restera pas longtemps à 5 sélections.