Monaco-Matin

Felix Van Groeningen et Charlotte Vandermeer­sch

Le couple belge, lauréat du Prix du jury au dernier Festival de Cannes pour Les Huit Montagnes, a réalisé un film très actuel et tourné en altitude.

- MATHIEU FAURE mfaure@nicematin.fr

Le film a été primé au Festival de Cannes, qu’est-ce que ça change aujourd’hui ?

Charlotte Vandermeer­sch : On s’est vite rendu compte que le film avait marqué lors de sa projection officielle le premier jour. C’était un défi de bien figurer dans un tel Festival mais on a toujours eu le sentiment que le film était spécial. On avait de l’espoir… La veille de la cérémonie de clôture, on est chez nous car Felix est très superstiti­eux (rires) .On attendait, on attendait… Felix est parti courir, on n’y croyait plus et puis on a reçu un appel en début d’après-midi nous demandant de revenir à Cannes. Et là, c’était incroyable.

Qu’est-ce qui vous a marqué dans le livre de Paolo Cognetti, dont vous vous êtes inspiré ?

Felix Van Groeningen : Beaucoup de choses me parlaient dans ce livre, je l’avais déjà chez moi car on m’en avait dit du bien mais ça me semblait bizarre de faire un film italien. La maison de production me rappelle plus tard et me dit qu’on a les droits et qu’elle pense à moi pour le réaliser. L’idée de filmer dans la montagne me tentait, ça parlait des gens simples, purs, sans cynisme. On a évoqué l’idée d’un film en anglais mais je voulais le faire en italien même si je ne parlais pas la langue. Charlotte a joué dans certains de mes films et je l’ai naturellem­ent associée à ce projet. On a décidé d’écrire et de réaliser ce film ensemble. Et puis la partie écriture a pris plus de temps à cause de la crise sanitaire. C’était bizarre et beau à la fois, le monde s’est arrêté et ça nous a aidés pour écrire finalement.

La crise sanitaire donne-telle une autre dimension au film ? Ce retour à

Bon

F.V.G. : Oui, l’idée de prendre du temps, de ne plus être dans ce rythme infernal... C.V. : Le confinemen­t a rendu l’histoire encore plus essentiell­e. Je ne sais pas si c’est une coïncidenc­e, le sort, mais le film reflète quelque chose, qui a du sens aujourd’hui : un silence, un moment pur, une respiratio­n profonde.

L’un des acteurs majeurs du film est la montagne, comment l’avez-vous filmée ?

F. V. G. : On a essayé de l’intégrer le plus possible avec les personnage­s. Dans le livre se développe l’idée que tous ceux qui vont en montagne trouvent une altitude spécifique, à laquelle ils se sentent bien. C’était inspirant comme idée car ça nous a guidés dans l’histoire, dans les costumes, dans les personnage­s. Il était important que le spectateur se rende compte, à chaque fois, à quelle altitude il est durant le film.

Le film aborde de nombreux thèmes : l’amitié, la quête de soi, le deuil. Quel était le fil rouge ?

C.V. : Tout ça (rires). C’est un film épique mais le thème principal reste l’amitié sans jamais perdre de vue les autres thèmes. Les femmes, par exemple, sont importante­s dans le film alors qu’elles ont des petits rôles. On voulait répondre à plusieurs questions : quelle est notre place dans le monde ? C’est quoi être frère, être ami ? Comment rester amis toute la vie ? Comment surmonter le deuil ? F.V.G. : Une vraie amitié, une amitié majeure, comporte des moments clés. Parfois, on ne roule pas sur la même route et on est amené à se recroiser à un moment donné. Une amitié évolue constammen­t au cours d’une vie.

Pietro et Bruno ne se parlent pas beaucoup, ils ont peu de points communs, c’est une amitié très particuliè­re. Comment avezvous travaillé sur cette relation ?

C.V. : Luca Marinelli, dans la vraie vie, est plutôt proche de Bruno alors qu’Alessandro Borghi, qui joue Bruno, se reconnaît beaucoup dans le personnage de Pietro. Il a des qualités de Pietro en tout cas. En inversant les rôles par rapport aux qualités humaines des acteurs, on a réussi à trouver une forme d’osmose. Ainsi, il y a une communicat­ion invisible, chacun comprend l’autre. Ils se comprennen­t très bien en tant qu’acteurs, ils sont généreux l’un envers l’autre, ils se complètent.

« C’est un film épique mais le thème principal reste l’amitié »

Vous êtes Belges et vous réalisez un film italien, tiré d’un livre italien avec des acteurs italiens en langue italienne, comment l’avezvous abordé ?

F.V.G. : On a beaucoup voyagé, on s’est rendu en Italie en 2019, 2020 et on a tourné en 2021 en s’installant plusieurs mois sur place. On a été très bien guidé par des Italiens, notamment à la production. On a appris la langue aussi. Il y a quelque chose dans la montagne également, une forme de curiosité, de charme, qui vous permet de rendre tout ça fluide et naturel. Peu importe la barrière de la langue.

Chef-d’oeuvre

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l’authentici­té, à la quête de soi.

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